Cannes : Breillat adapte Barbey d'Aurevilly

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
"Une vieille maîtresse" de Catherine Breillat est le dernier film français en compétition à Cannes ce vendredi. La réalisatrice propose sa vision du premier grand roman de Jules Barbey d'Aurevilly. Celle qui a parfois défrayé la chronique s'est sensiblement assagie. Le film sortira en France le 30 mai.

Les films de la sulfureuse Catherine Breillat sont toujours très attendus. Cette fois, la réalisatrice de "Romance" et de "Anatomie de l'enfer" adapte le foisonnant roman de Barbey d'Aurevilly, "Une vieille maîtresse". Un libertin doublé d'un don juan, Ryno de Marigny (Fu'ad Aït Attou, dont c'est le premier rôle), va épouser une jeune fille de la plus haute noblesse, Hermangarde (Roxane Mesquida, dont c'est la troisième collaboration avec Breillat). Marigny se confie à la grand-mère d'Hermangarde, la marquise de Flers (Claude Sarraute), peu avant son mariage et lui narre sa liaison tourmentée avec une Malagaise, la Vellini (Asia Argento), avec laquelle il vient en principe de rompre. Le mariage se fait mais on n'oublie pas si facilement une vieille maîtresse avec laquelle on a entretenu une liaison dix années durant et fuir Paris pour passer sa lune de miel dans un manoir de Normandie n'est pas une échappatoire sûre. Comme tout écrivain d'envergure du XIXe siècle qui se respecte, Barbey d'Aurevilly a une puissance descriptive inimaginable, tant de l'âme de ses personnages que des lieux qu'ils hantent. Ses descriptions de la côte normande en particulier sont saisissantes. Mais, dans l'un et l'autre cas, le film, lui, se montre plat. Catherine Breillat a dû surmonter une attaque puis une hémorragie cérébrale, survenues en 2004, pour mener à bien ce film, " le plus lourd financièrement que j'aie jamais fait ", a-t-elle déclaré vendredi en conférence de presse à l'issue de la projection de son long métrage, troisième et dernière entrée française en compétition. La réalisatrice est fidèle à l'oeuvre de Barbey d'Aurevilly dans sa narration, au point que l'on retrouve parfois dans le scénario des phrases entières ou des expressions du roman retranscrites telles quelles. Elle a bien sûr dû opérer des coupes et inventer des dialogues mais il n'aurait pas été possible autrement de concentrer en un peu moins de deux heures le foisonnant roman. Surtout, elle avait voulu rompre avec des films de sexualité provocante au budget limité. " Je n'ai pas laissé la provocation derrière moi ", a-t-elle expliqué. " Mais il était évident que le dixième film avec un grand X (ndlr - "Anatomie de l'enfer ") était le dernier ", a-t-elle ajouté. " C'est un film qui n'est pas plus apaisé ; il est plus apaisé pour le spectateur ". Dressant un parallèle entre les scandales qu'ont pu provoquer les ouvrages de Barbey d'Aurevilly au XIXe siècle et les coulées d'encre qu'ont suscité ses propres films, Breillat a jugé qu' "un artiste n'a aucune limite ; la société a des limites ".