VIDÉO - Interpellé par un homme dans la rue, Jean-Michel Aphatie réagit : "J'ai gardé mon calme parce que j'ai compris qu'il y avait un enjeu"

  • Copié
Après avoir été vivement interpellé par un homme se présentant comme un "journaliste gilet jaune" lundi, Jean-Michel Aphatie a réagi sur Europe 1 vendredi matin.
VIDÉO

Dans une vidéo mise en ligne lundi 7 janvier sur Youtube et intitulée "Aphatie journaliste millionnaire anti 'gilet jaune'", l'éditorialiste d'Europe 1 Jean-Michel Aphatie est vivement interpellé dans la rue par un homme se présentant comme un "journaliste 'gilet jaune". Dans cet échange qui dure six minutes,  notre journaliste y est enjoint de répondre à des "questions" portant sur le choix des thèmes de ses chroniques, sur son traitement journalistique du mouvement des "gilets jaunes" par Europe 1, mais aussi sur un supposé appartement dans le 16e arrondissement de Paris qu'il posséderait et sur de prétendus "millions" qu'il aurait sur son compte en banque. 

Pour Europe 1, Jean-Michel Aphatie revient sur cette séquence, durant laquelle il estime que les conditions d'une discussion sereine n'ont pas été réunies.

"J'avais envie d'expliquer à cette personne qui m'interrogeait la manière dont on travaille. Et j'avais envie de le dissuader de l'idée - même si je savais que c'était inutile - que les journalistes en France ne sont pas au service du pouvoir et des puissants, mais qu'on essaie de raconter les choses telles qu'elles sont, telles qu'on les voit. Je n'ai donc pas ressenti personnellement cela comme une agression, plutôt comme un questionnement. Mais j'ai bien compris, et je sais aujourd'hui, que ce questionnement est chargé de haine, que c'est un questionnement intolérant, que c'est ce questionnement-là qui amène des gens, ailleurs, à agresser des journalistes pendant des manifestations des 'gilets jaunes'. Je sais que l'homme qui me posait ces questions, qui ne m'agressait pas moi, est un homme menaçant par l'idéologie qu'il véhicule et qu'il faut casser évidemment.

Si je suis parvenu à garder mon calme, c'est précisément pour ça. Parce que je sais qu'il y a un enjeu dans toutes ces situations. L'enjeu, c'est de parvenir à expliquer ce que sont les journalistes en France, c'est-à-dire des professionnels honnêtes au service de l'actualité, et pas d'intérêts privés. Il faut expliquer ce qu'est le journalisme. Moi, j'aime faire ça parce que j'aime ce métier. Je considère dans cette période, encore davantage que dans d'autres, que c'est important de le faire.

J'ai donc gardé mon calme parce que sans doute, sans trop y réfléchir d'ailleurs, j'ai compris qu'il y avait un enjeu dans cette rencontre. L'enjeu, c'est de dissiper toutes les idées haineuses que des responsables politiques ou d'autres journalistes ont instillées depuis des années. '9 milliardaires possèdent les médias ! On vous ment ! On ne vous informe pas ! On vous désinforme !' Ça donne ça ! Ça donne des postures extrêmement agressives dont souffrent des journalistes quand ils couvrent des manifestations de 'gilets jaunes'. Certains ont dû être extraits de manifestations par des gardes du corps parce que c'était leur vie qui était en jeu, ou du moins leur intégrité physique. En France, du fait de Français. C'est énorme tout de même ! 

À ma petite place, parce que moi je n'ai pas été menacé, j'essayais de porter tout ça. Les journalistes font un travail sincère, d'informer les gens. 

Entendu sur europe1 :
Il faut que chacun ait la responsabilité de traiter ces sentiments de méfiance sans agressivité

Les agressions de journalistes sont le symptôme d'une méfiance importante de beaucoup de citoyens vis-à-vis de tous les modes de représentation, que ce soit des responsables politiques, des intellectuels, des journalistes… Que la méfiance soit là, c'est un fait. Mais il faut que chacun ait la responsabilité de traiter ces sentiments de méfiance sans agressivité. On ne peut pas entrer, et on y est presque, dans une logique de guerre civile.

Il n'y a pas des Français supérieurs parce que souffrant dans leur vie quotidienne, et des Français inférieurs, à la citoyenneté réduite, parce qu'ils sont au service d'intérêts privés, d'intérêts minoritaires. Ça ne peut pas exister. Nous sommes entrés dans cette logique et il faut la casser. Il faut évoquer tous les problèmes qui se posent, mais savoir le faire en étant respectueux les uns des autres. Et on commence à s'éloigner de cette règle simple et indispensable à la vie sociale.

Je n'avais pas imaginé en mettant cette vidéo hier en ligne qu'elle aurait cet impact. Mais si elle permet de réfléchir un petit peu à la manière dont nous devons vivre les uns et les autres - s'interpeller, nous rendre compte de notre travail - et à permettre ce dialogue, ce sera utile.