"Ils n'ont jamais connu la révolution internet" : la génération Z décryptée

  • Copié
Mathilde Durand , modifié à
Engagée, née avec internet, explorant les notions de genres, de corporalité : la revue l'ADN dresse le portrait de la génération Z, née après 1995, qui représente 32% de la population mondiale. "Au-delà de la définition de l'âge, ce qui nous intéresse ce sont les valeurs qui agitent ces catégories", explique sur Europe 1, Alexandre Kouchner, rédacteur en chef de l'ADN Le Shift. 
INTERVIEW

Comprendre la génération Z. Voici l'objectif ambitieux de la revue trimestrielle L'ADN, qui sort son vingt-quatrième numéro consacré à cette génération, née après 1995 et qui constitue 32% de la population mondiale. Cent cinquante pages, grand format, pour décrypter les tendances, rétablir un dialogue et comprendre. "C'est une tranche d'âge, comme les 'millenials' ou les 'boomers' avant eux. Ils ont moins de 25 ans en 2020. Comme toute génération, ils ont une particularité mais celle-ci les distingue très fortement : ils n'ont jamais connu la révolution internet. Ils sont tombés dedans nativement", analyse sur Europe 1 Béatrice Sutter, directrice de la rédaction. 

Les difficultés du dialogue intergénérationnel 

Si les appellations générations Z ou Y (ou millenials, 1980-1995) sont plutôt des initiatives marketing, l'appellation génération X (1965-1980) provient en revanche d'études de sociologues américains. Par ailleurs, la génération Z est nommée différemment selon les pays.

"Au Royaume-Uni, c'est la génération 'Me, me, me' en quête d'individualisme et de libertés. En Allemagne il s'agit de la génération 'poule mouillée' car elle a plus peur du risque que les jeunes européens. Et les Allemands se montrent plus réticents à envisager la création d'entreprises : 30% contre 47% en France par exemple", explique Elodie Gentina, professeure en marketing et auteure de nombreux ouvrages sur la génération Z, citée dans la revue.

"Au-delà de la définition de l'âge, ce qui nous intéresse ce sont les valeurs qui agitent ces catégories. C'est de comprendre l'impossible dialogue qu'il pourrait y avoir avec des gens qui sont nés en Internet et des gens qui l'ont découvert", décrypte Alexandre Kouchner, rédacteur en chef de l'ADN le shift, un collectif s'apparentant à un think-thank allant à la rencontre des acteurs du changement.

La revue revient notamment sur l'expression "Ok Boomer". "Ok boomer dit quelque chose de ce rapport compliqué entre des jeunes générations qui ne veulent pas attendre qu'on leur dise quoi faire et des plus anciennes générations qui ont l'impression d'avoir tout compris", poursuit-il. "Les boomers sont issus du baby-boom, nés dans les années 1945-1960. Ils ont connu les 30 glorieuses, ils ont un rapport au monde très différents", ajoute Béatrice Sutter. 

Un nouveau rapport au corps, au genre, à l'engagement

Dans ce nouveau numéro, il est écrit que la génération Z n'est pas tant vouée à refaire le monde qu'à "empêcher que le monde ne se défasse", en paraphrasant Albert Camus. Plusieurs typologies se distinguent parmi la classe d'âge : les "Body positivist", les "Fluid performers", les "Hypebeats", les "Teen-preneurs"... Des termes anglo-saxons très répandus sur les réseaux sociaux. "Ce ne sont pas des catégories fixes, mais des tendances, des activités auxquelles vont s'adonner certaines jeunes personnes. Certains vont explorer leur rapport à la corporalité, à l'histoire, aux genres", décrypte la directrice de la rédaction. "Contrairement aux générations précédentes, ils ont un moyen d'impacter plus directement la société", ajoute Alexandre Kouchner.

Certaines caractéristiques restent communes parmi les natifs de la génération Z. "Il y a un désir d'égalité très central dans ces générations-là. On a envie de défendre sa cause, quelle que soit sa cause. Il y a eu une génération Greta qui a fortement émergé, mais ce n'est pas la seule. Il y a le féminisme qui ressort mais le masculinisme aussi", déchiffre Béatrice Sutter.

L'ADN est né d'une newsletter à destination des professionnels, avant de devenir un site internet puis une revue il y a six ans, diffusée à 5.000 exemplaires et vendue 15 euros. L'objectif : "cristalliser les tendances repérées chaque jour", selon la directrice de la rédaction.