J’ai lu le dernier Bakchich Hebdo

La Une du dernier numéro de Bakchich hebdo.
La Une du dernier numéro de Bakchich hebdo. © Bakchich
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Plana Radenovic , modifié à
Le dernier numéro de Bakchich Hebdo sort vendredi. Retour sur une aventure audacieuse et décalée.

"Voilà c’est fini…", proclament tout simplement des lettres blanches sur fond noir, à la Une du 53e et dernier numéro de l’hebdo satirique Bakchich. Le groupe dépose le bilan, et sera placé dans les dix jours en liquidation judiciaire. La fin d’une expérience de quatre ans et demi pour le site internet, de quinze mois pour l’hebdo papier.

J’ai parcouru ce dernier numéro avec une certaine nostalgie. Lorsqu’une personne décède, on se remémore les bons moments passés avec elle. Feuilleter Bakchich le jour de sa mort m’a fait le même effet : je me suis rappelé les instants forts de la vie du journal, ce qui fait qu’il va manquer dans le paysage médiatique.

Humour satirique

Pour la dernière fois, Bakchich propose à ses quelque 10.000 lecteurs (une moyenne) un concentré d’humour satirique, de second degré, avec ce regard très particulier sur l’information qui a fait son identité. "Notre hebdo n’était pas de droite, ni de gauche non plus. On a cogné sur les politiques de tous bords, ce qui est très rare dans la presse écrite française", précise le rédacteur en chef Nicolas Beau, joint par Europe1.fr.

La preuve pages 6 et 7, avec "le petit Mélenchon illustré", un abécédaire qui dézingue le très médiatique président du Parti de Gauche. Dernière lettre le "Z", car "Mélenchon est un zigoto de la politique".

Scoops

Mais en politique, Bakchich n’était pas seulement dans le commentaire. Sa vie a été rythmée par de nombreux scoops, dont le plus gros était la révélation, en septembre 2008, de l’implication de Nicolas Sarkozy dans l’affaire des frégates de Taïwan.

Dans l’hebdo, peu de place est accordée à tout ce qui n’est pas politique, rangé dans les pages "Bazar". Un mot qui peut sembler péjoratif pour un contenu de valeur, puisqu’on peut notamment lire page 9 un reportage à Kinshasa, capitale de la république démocratique du Congo (RDC). "On voulait développer le sport, le people, ce qui fait vendre, mais nous n’en avions pas les moyens humains", explique Nicolas Beau.

Dessins de presse

Pour se démarquer avec peu de moyens, une seule solution : l’originalité. Bakchich revendique sa "langue épicée et satirique", dès la deuxième page de ce dernier numéro. Ainsi, page 11, le journaliste Jacques Gaillard note malicieusement : "la prime à la casse ayant coûté 1 milliard d’euros, il est mathématiquement incontestable que chaque Français, nourrissons compris, a craché environ 15 euros pour faire jeter à la décharge plein d’autos en parfait état de marche. L’Everest du gaspillage a été atteint, sous un vague prétexte écologique, comme d’habitude". Sans oublier les nombreux dessins de presse qui émaillent les articles, ADN de l’hebdo.

Arrivée à la page 10, voilà que je me sens un peu visée : "depuis que Bakchich a déposé le bilan, le téléphone ne cesse de sonner". Oups, je viens juste d’appeler Nicolas Beau. "Les grands médias semblent nous découvrir. Il était temps". Europe1.fr encaisse cette petite pique post-mortem. Après tout, c’est ce qui fait le charme de Bakchich.