Nancy Pelosi envisage de se rendre à Taïwan. 1:37
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avec AFP , modifié à
La Chine a averti mardi que les Etats-Unis porteront la "responsabilité" d'une visite à Taïwan de la présidente de la Chambre des représentants américaine Nancy Pelosi et qu'ils devront en "payer le prix". La Russie accuse aussi les États-Unis de "déstabiliser le monde".

La Chine a averti mardi que les États-Unis porteront la "responsabilité" d'une visite à Taïwan de la présidente de la Chambre des représentants américaine Nancy Pelosi et qu'ils devront en "payer le prix". "Les États-Unis auront assurément la responsabilité (des conséquences) et devront payer le prix de leur atteinte à la souveraineté et à la sécurité de la Chine", a indiqué devant la presse une porte-parole de la diplomatie chinoise, Hua Chunying.

La Russie accuse les États-Unis de "déstabiliser le monde"

La Russie a accusé mardi les États-Unis de "déstabiliser le monde" en provoquant des tensions autour de Taïwan, où une possible visite de la présidente de la Chambre des représentants américaine Nancy Pelosi suscite la colère de Pékin. "Washington déstabilise le monde. Pas un seul conflit réglé dans les dernières décennies, mais plusieurs provoqués", a déclaré sur son compte Telegram la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova.

Une tournée en Asie du Sud-est

Pékin considère l'île comme une partie de son territoire à réunifier, par la force si nécessaire, et a plusieurs fois mis en garde Washington contre une visite de la haute responsable qui serait vécue comme une provocation majeure. Nancy Pelosi était en Malaisie mardi, où elle a rencontré le Premier ministre et le président de la chambre basse du Parlement, lors de sa deuxième étape d'un voyage en Asie qui suscite depuis plusieurs jours des spéculations autour d'une potentielle visite à Taipei. Des journalistes de l'AFP ont vu Nancy Pelosi sortir d'un hôtel de la capitale malaisienne et entrer dans un SUV. Son cortège est ensuite reparti sous haute sécurité.

Après Singapour et la Malaisie, son itinéraire prévoit des étapes en Corée du Sud et au Japon. Le flou est sciemment entretenu autour d'une possible visite à Taïwan. Dans un communiqué, la présidente de la Chambre des représentants américaine a simplement indiqué : "nous sommes engagés dans un large éventail de discussions sur le moyen d'atteindre nos objectifs communs et sécuriser l'Indo-Pacifique".

Visite "très probable"

Plusieurs médias taïwanais ont relayé des commentaires du vice-président du Parlement de l'île, Tsai Chi-chang, affirmant qu'il était "très probable" que Nancy Pelosi se rende sur place dans les prochains jours. Le journal taïwanais Liberty Times a cité des sources anonymes selon lesquelles Nancy Pelosi atterrirait sur l'île mardi soir et rencontrerait Tsai Chi-chang, le lendemain avant de repartir dans l'après-midi.

Si la Maison Blanche se montre gênée par la situation, John Kirby, son porte-parole a affirmé lundi que Nancy Pelosi avait "le droit de visiter Taïwan". "Il n'y a pas de raison pour que Pékin fasse de cette visite, qui ne déroge pas à la doctrine américaine de longue date, une forme de crise", a-t-il ajouté.

Même si la plupart des observateurs jugent faible la probabilité d'un conflit armé, des responsables américains ont dit se préparer à de possibles démonstrations de force de l'armée chinoise, comme des tirs de missiles dans le détroit de Taïwan ou des incursions aériennes massives autour de l'île.

Une relation ambiguë avec Taïwan

Mardi, le ministère de la Défense taïwanais s'est dit "déterminé" dans un communiqué à protéger l'île contre les menaces de la Chine. La présidente de la Chambre voyage à bord d'un avion militaire et bien que Washington ne craigne pas d'attaque directe, le risque d'une "erreur de calcul" est bien présent.

Les États-Unis pratiquent à l'égard de Taïwan une diplomatie dite d'"ambiguïté stratégique", consistant à ne reconnaître qu'un seul gouvernement chinois, celui de Pékin, tout en continuant à apporter un soutien décisif à Taipei. Washington s'abstient toutefois de dire si les États-Unis défendraient ou non militairement l'île en cas d'invasion.

John Kirby a réitéré que cette politique restait inchangée. Le gouvernement taïwanais s'est pour sa part abstenu de tout commentaire concernant une visite de Nancy Pelosi. Le Premier ministre Su Tseng-chang n'a pas confirmé la visite mardi lorsque les journalistes lui ont posé la question, mais a remercié Nancy Pelosi pour son soutien.

"Très dangereuse"

Les 23 millions de Taïwanais vivent sous la menace constante d'une invasion de la Chine, cette crainte s'étant renforcée depuis l'arrivée au pouvoir du président Xi Jinping, qui a fait de la réunification une priorité. La semaine dernière, à l'occasion d'un entretien téléphonique avec le président américain, M. Xi avait appelé les États-Unis à ne "pas jouer avec le feu".

"Telle que nous la voyons, pareille visite semble très dangereuse et très provocatrice", a renchéri lors d'une conférence de presse l'ambassadeur chinois aux Nations unies, Zhang Jun. "Si cette visite a lieu, elle affaiblira également la relation entre la Chine et les Etats-Unis, je suis sûr que les États-Unis comprennent cela".

"La probabilité d'une guerre ou d'un incident grave est faible"

Pour appuyer leur message, les militaires chinois ont diffusé lundi sur internet une vidéo au ton martial montrant des soldats criant qu'ils sont prêts au combat, des chasseurs en train de décoller, des parachutistes sauter d'un avion ou encore une pluie de missiles qui anéantissent diverses cibles.

"La probabilité d'une guerre ou d'un incident grave est faible", a cependant tweeté Bonnie Glaser, directrice du programme Asie du think tank américain German Marshall Fund. "Mais la probabilité que (la Chine) prenne une série de mesures militaires, économiques et diplomatiques pour montrer sa force et sa détermination n'est pas négligeable", a-t-elle ajouté. "Il est probable qu'elle cherchera à punir Taïwan de multiples façons".

La présidente de la Chambre des représentants serait, si sa visite se confirme, la plus haute responsable américaine à visiter Taïwan depuis son prédécesseur Newt Gingrich en 1997.