Un rapport rwandais affirme que la France "porte une lourde responsabilité" dans le génocide

Selon un rapport commandé par Kigali à un cabinet d'avocats américain, la France "porte une lourde responsabilité" dans le génocide "prévisible" des Tusti en 1994 au Rwanda.
Selon un rapport commandé par Kigali à un cabinet d'avocats américain, la France "porte une lourde responsabilité" dans le génocide "prévisible" des Tusti en 1994 au Rwanda. © SIMON WOHLFAHRT / AFP
  • Copié
avec AFP , modifié à
Selon un rapport commandé par Kigali à un cabinet d'avocats américain, la France "porte une lourde responsabilité" dans le génocide des Tusti en 1994 au Rwanda. "L'Etat français n'était ni aveugle ni inconscient au sujet d'un génocide prévisible", assurent les auteurs du rapport", écrivent les auteurs. 

La France "porte une lourde responsabilité" dans le génocide "prévisible" des Tusti en 1994 au Rwanda et refuse toujours de reconnaître son rôle dans cette tragédie, estime un rapport commandé par Kigali à un cabinet d'avocats américain et publié lundi. Cette enquête de près de 600 pages, commandée en 2017 par le Rwanda au cabinet Levy Firestone Muse, qualifie la France de "collaborateur indispensable" du régime hutu qui a orchestré le massacre en trois mois de plus de 800.000 personnes, essentiellement au sein de la minorité tutsi, selon les chiffres de l'ONU.

"L'Etat français n'était ni aveugle ni inconscient au sujet d'un génocide prévisible"

Elle rejette par ailleurs l'idée que Paris était "aveugle" face au génocide qui se préparait, comme l'a récemment conclu une commission d'historiens français dirigée par Vincent Duclert et mise sur pied par le président Emmanuel Macron. "L'Etat français n'était ni aveugle ni inconscient au sujet d'un génocide prévisible", assurent les auteurs du rapport. Au contraire, ils estiment que la France savait qu'un génocide se préparait mais a continué à apporter "un soutien indéfectible" au régime hutu du président Juvénal Habyarimana, même lorsque ses intentions génocidaires "étaient devenues patentes".

Selon le rapport Muse, aucun Etat ne travaillait aussi étroitement avec le régime hutu que la France, alors présidée par François Mitterrand, désigné comme le principal "responsable de l'appui inconsidéré" de son pays à un régime qui se préparait au génocide. La France a fourni un soutien militaire et politique afin de protéger ses propres intérêts et a ignoré les alertes internes, tandis que les discours haineux et les violences contre les Tutsi progressaient, selon le texte.

"Un espace politique nouveau" pour "se projeter vers un avenir commun"

Leur enquête n'a cependant pas pu établir de preuves quant à la participation de responsables ou du personnel français aux tueries qui se sont déroulées entre avril et juillet 1994. Le rôle de la France, accusée de n'avoir pas assez fait pour prévenir ou interrompre les massacres voire d'en avoir été complice, empoisonne depuis des années les relations entre Paris et Kigali. 

Le rapport publié par le Rwanda sur le rôle de la France et la réaction de Kigali excluant la complicité de Paris ouvrent "un espace politique nouveau" pour "se projeter vers un avenir commun", a réagi lundi la présidence française. La France se félicite également que les autorités rwandaises excluent des poursuites judiciaires.

 

Il a vécu le génocide des Tutsi à Kigali, au Rwanda. Découvrez le témoignage fort de Jean-Hervé Bradol, urgentiste et ancien président de Médecins sans frontières dans le podcast "Première Ligne".