Tunisie : va-t-on vers une nouvelle explosion sociale ?

la mort d'un chômeur de 28 ans à mis le feu aux poudres dans le centre du pays.
la mort d'un chômeur de 28 ans à mis le feu aux poudres dans le centre du pays. © FAWZI DRIDI / AFP
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avec AFP , modifié à
La mort d’un jeune chômeur de 28 ans a mis le feu aux poudres à Kasserine dans le centre du pays.

Le contexte. La Tunisie va-t-elle connaître une deuxième révolution ? Des manifestations ont lieu depuis samedi dernier dans la région de Kasserine, après la mort d’un jeune chômeur de 28 ans. Des évènements qui ne sont pas sans rappeler la mort du jeune Mohamed Bouazizi, en 2011, qui avait été le point de départ du Printemps arabe.

Mort d’un jeune chômeur. Tout est parti du décès samedi à Kasserine d'un chômeur de 28 ans, Ridha Yahyaoui. Il a été électrocuté après être monté sur un poteau alors qu'il protestait avec d'autres contre son retrait d'une liste d'embauches dans la fonction publique.

" C'est comme si nous étions encore à la fin 2010-début 2011 "

Un air de déjà-vu. En Tunisie, ce drame et les violences qui ont suivi ont un air de déjà-vu. "C'est comme si nous étions encore à la fin 2010-début 2011", écrit jeudi le quotidien arabophone Al Chourouk. "De Bouazizi à Yahyaoui, les motifs et la manière se répètent. Les résultats seront-ils les mêmes ?", se demande le journal en allusion à Mohamed Bouazizi, le vendeur ambulant qui s'était immolé par le feu en décembre 2010 à Sidi Bouzid, non loin de Kasserine. Ce geste, à l'origine du Printemps arabe, avait déclenché un soulèvement populaire et la chute de la dictature de Zine el Abidine Ben Ali.

La colère monte dans d’autres villes. Mais si la Tunisie a réussi la transition politique née de la révolution, l'exclusion sociale et les disparités régionales persistent. Les vives tensions à Kasserine, où les forces de l'ordre ont fait usage de gaz lacrymogène et de canons à eau lors de rassemblements de plusieurs centaines de personnes, se sont propagées à d'autres villes du pays.

A Tunis, 150 personnes environ ont également manifesté mercredi et brandi des portraits du chômeur décédé, en clamant "Le travail est un droit". A Feriana, à une trentaine de kilomètres de Kasserine, un policier de 25 ans est décédé durant la dispersion d'une manifestation, selon le ministre de l'Intérieur. Une source de sécurité a affirmé que le véhicule du policier s'était renversé lors de la dispersion du cortège. Plus d'un millier de personnes, souvent jeunes, se sont à nouveau rassemblées jeudi matin devant le gouvernorat à Kasserine.

Un taux de chômage de 15%. Dans la presse, plusieurs titres rappellent qu'à l'origine des troubles, figure "l'effrayante réalité des inégalités régionales". Alors que la Tunisie ne parvient pas à relancer son économie, le chômage dépasse 15% au niveau national et atteint le double chez les diplômés. Ces taux sont encore supérieurs dans l'intérieur du pays. En 2015, la croissance devrait être inférieure à 1%, notamment plombée par la crise du secteur touristique, conséquence de l'instabilité et des attaques djihadistes. Le gouvernement a récemment été remanié, après une première année jugée décevante.

Le président Béji Caïd Essebsi a fait valoir mercredi que celui-ci avait "hérité d'une situation très difficile" avec "700.000 chômeurs et parmi eux, 250.000 jeunes diplômés". "On ne peut résoudre des situations comme ça par des déclarations ou un coup de pouce. Il faut (laisser) du temps au temps", a-t-il argué.