À la veille d'un Eurogroupe, Tsipras dégaine l'arme du référendum

© LOUISA GOULIAMAKI / AFP
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B.B et N.M. avec AFP , modifié à
L'initiative inattendue du Premier ministre grec est un coup de théâtre sans précédent dans les négociations engagées voici cinq mois entre son gouvernement et ses créanciers.

Coup de théâtre dans la nuit de vendredi à samedi Grèce. Le Premier ministre Alexis Tsipras a en effet annoncé la tenue d'un référendum le week-end prochain, dimanche 5 juillet. Ce vote portera sur le texte de l'Eurogroupe. Samedi après-midi, une énième réunion a lieu à Bruxelles entre Athènes et ses créanciers. Objectif : éviter un défaut de paiement au pays, à court d'argent. 

"La Grèce doit envoyer un message de démocratie retentissant". Cette annonce d’Alexis Tsipras a quelque peu semé le trouble à quelques heures d’une nouvelle réunion de la dernière chance. D’autant plus qu’il a agi sans préavis, même s'il avait déjà prévenu qu'un référendum était envisageable en cas de désaccords. Le Premier ministre grec, apparu le visage grave sur toutes les chaînes de télévision nationales, a annoncé que le conseil des ministres venait d'adopter "à l'unanimité" une proposition de référendum, pour le dimanche 5 juillet. L'Assemblée nationale grecque doit aussi se prononcer sur la proposition de référendum samedi à minuit mais le vote ne serait ici qu'une formalité. 

Pas de consigne de vote mais... Même s'il n'a pas clairement donné de consignes de vote à ses concitoyens, le Premier ministre issu de la gauche radicale a donné des indications à mots couverts. Il a en effet parlé dans sa prise de parole de l'"ultimatum exorbitant" proposé par le FMI, la BCE et l'UE. Il a également assuré que le choix des Grecs ferait "honneur à l'Histoire de notre pays et enverra un message de dignité au monde entier". 

"La question qui sera posée au référendum sera de savoir si nous acceptons ou rejetons la proposition" des créanciers, a-t-il expliqué. "La Grèce, qui a vu naître la démocratie, doit envoyer un message de démocratie retentissant", a-t-il ajouté, s'engageant à "respecter le résultat quel qu'il soit".

L'opposition grecque crie au scandale. Les leaders de l'opposition ont tous vivement réagi à cette soudaine annonce. L'ancien Premier ministre de droite Antonis Samaras a accusé Alexis Tsipras de mener le pays "à l'impasse", le Pasok (le parti socialiste) a appelé à sa démission et à des élections anticipées, tandis que le parti de centre-gauche Potami accusait le gouvernement d'être "le lobby de la drachme". Néanmoins, avec une majorité de 162 députés sur 300, la coalition gouvernementale, qui appellera sans surprise à voter "non", devrait faire adopter sans problème son projet de consultation.

Les créanciers, unanime dans leur déception. À leur arrivée samedi à la réunion de l'Eurogroupe, les créanciers de la Grèce ont plutôt déploré le fait qu'Athènes ait opté pour le référendum. Pour Jeroen Dijsselbloem, président de l'Eurogroupe, c'est "une triste décision" qui "ferme la porte à la poursuite des discussions". Le ministre des Finances allemand, Wolfgang Schaüble, connu pour sa sévérité avec Athènes, "il n'y a plus de base pour des négociations, aucun des collègues à qui j'ai parlé n'a une idée de ce que l'on peut faire maintenant". Alexander Stubb, ministre finlandais des Finances, a, pour sa part, écarté l'idée de prolonger de quelques jours le plan d'aide à la Grèce afin de le faire durer jusqu'au référendum. Athènes a, pour le moment, jusqu'au mardi 30 juin pour bénéficier d'un versement de 7,2 milliards d'euros. L'Etat hellène doit également rembourser mardi au FMI la somme de 1,5 milliard d'euros.

Seul le FMI a insisté sur la nécessité de poursuivre le travail. Christine Lagarde, sa présidente, a déclaré lors de son arrivée à l'Eurogroupe, que le FMI va "continuer à travailler" afin de restaurer la stabilité financière de la Grèce.