Juan Guaido 5:00
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Pascal Meinau , modifié à
Juan Guaido, président autoproclamé du Venezuela, peut se targuer d'un soutien international croissant, mais pour prendre les rênes du pays, le principal opposant de Nicolas Maduro doit encore obtenir le ralliement de l'armée.
REPORTAGE

Depuis mercredi, le Venezuela se retrouve avec deux présidents. L’un qui a gagné des élections contestées, Nicolas Maduro. Et l’autre qui considère le pouvoir vacant, et qui s’est donc autoproclamé président en charge avec le soutien du parlement, Juan Guaido. Reconnu par de plus en plus de pays, comme les Etats-Unis, la France, l’Australie, le Canada ou encore le Brésil, ce nouveau président, inconnu jusqu’à la semaine dernière, entend relever un défi de taille : sortir son pays de la faillite.  

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La presse internationale comme porte-voix

Dimanche, le président autoproclamé assistait dans le centre de Caracas à une messe en hommage aux prisonniers politiques et aux victimes des violences policières. Assis avec sa femme au premier rang, Juan Guaido fixe la croix, devant un mur de caméras et de téléphones portables, tandis qu'au micro une voix égrène le nom des manifestants tués ces derniers jours. À la sortie, ce sont plus de 150 journalistes internationaux qui l’attendent.

En fin communiquant, Juan Guaido joue à fond la carte de la presse internationale présente au Venezuela, car il sait qu'elle est devenue son assurance-vie face à Nicolas Maduro. Il prend alors à témoin le monde entier pour affirmer qu’il ne négociera jamais avec le président en poste. "Personne dans l’opposition ne participera à ce faux dialogue", lâche-t-il. "C’est important de le dire à la communauté internationale. Car nous, les Vénézuéliens, on le sait, mais le régime de Maduro essaie de faire croire qu’il pourrait y avoir un dialogue. On va continuer à manifester et on retournera dans la rue. Car après toutes ces années, nos sacrifices et nos combats ont enfin un soutien international."

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À Caracas dimanche, Juan Guaido a assisté au premier rang, entouré de nombreux partisans, à une messe en hommages aux victimes du régime. ©AFP-Montage Europe 1

Un homme pour assurer "la transition"

Face à la situation économique catastrophique, Juan Guaido s'impose comme l'homme qui redonne espoir à des millions de Vénézuéliens. Ce père de famille de 35 ans, qui a fait ses études aux Etats-Unis, met régulièrement en scène sa femme et sa petite fille de trois ans. Il aime raconter que son père est chauffeur de taxi et qu’il a fui le pays, précisément à cause de la crise.

Juan Guaido cultive l'humilité, répétant à l’envi qu’il n’est que de passage. Le but, comme le martèlent ses soutiens, est d’organiser des élections, pas de rester au pouvoir. "Juan c’est simplement le leader qui conduit l’opposition pour amener au changement. C’est une transition", explique à Europe 1 le député Stalin Gonzales. "Il n'est pas un super-héros ou quelqu’un de supérieur. C’est juste que c’est lui qui aura la responsabilité d’aider les Vénézuéliens à se débarrasser de Maduro."

Mais la seule chose que Juan Guaido ne possède pas pour le moment, c’est le soutien de l’armée. Faiseuse de roi au Venezuela, elle reste, pour l'heure, fidèle à Nicolas Maduro. Mais Juan Guaido a promis une amnistie aux militaires qui le rejoindraient. Et son message commence tout doucement à porter : ce week-end, le colonel José Luis Silva, l’attaché militaire à l’ambassade du Venezuela aux Etats-Unis, a reconnu qu'il était le nouveau président légitime. Il est, à ce stade, l’un des plus hauts gradés du pays à avoir changé de camp.

Une économie à la dérive

Au Venezuela, la monnaie ne vaut plus rien et l’inflation atteint des chiffres stratosphériques. Un tiers des Vénézuéliens sont au chômage. On estime que plus de 90% de la population vit désormais sous le seuil de pauvreté. Résultat, les Vénézuéliens fuient leur pays dès qu’ils le peuvent. Chaque jour ce sont environ 2.000 personnes qui passent la frontière pour aller vivre en Colombie. Depuis cinq ans, ce sont ainsi plus de trois millions et demi de Vénézuéliens qui se sont réfugiées à l’étranger, soit un habitant sur dix.