Pour le Nobel Muhammad Yunus, Aung San Suu Kyi "a fait un demi-tour complet et jeté ses propres valeurs"

Muhammad Yunus
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L'inventeur du micro-crédit, prix Nobel de la Paix en 2006, a expliqué mercredi sur Europe 1 ne plus reconnaître Aung San Suu Kyi, largement critiquée pour sa gestion de la crise des Rohingyas.
INTERVIEW

Ils avaient posé côte à côte en 2014, brandissant une pancarte "Peace". Muhammad Yunus, inventeur du micro-crédit et prix Nobel de la Paix 2006, et Aung San Suu Kyi, nobélisée dans la même catégorie quinze ans plus tôt, affichaient alors leur détermination à lutter contre la pauvreté en Asie du sud-est. Invitée mercredi de la matinale d'Europe 1, Muhammad Yunus n'a pourtant pas ménagé ses mots à l'égard de la Birmane, fustigeant son attitude vis-à-vis des Rohingyas. "De mon point de vue, elle a fait un tour à 180 degrés", a-t-il déclaré. "Elle a fait un demi-tour complet et jeté ses propres valeurs".

Un silence accablant. Largement critiquée par la communauté internationale pour son silence alors qu'un demi-million de Rohingyas, une minorité indo-européenne de confession musulmane, a dû fuir vers les Bangladesh pour échapper aux persécutions dont ils font l'objet en Birmanie, Aung San Suu Kyi a estimé début septembre que cette crise faisait l'objet d'un "iceberg de désinformations". Mais pour Muhammad Yunus, sa passivité "déclasse les citoyens de son propre pays". "Elle permet aux Rohingyas d'être victimes de violences : maintenant il y a plein de réfugiés qui arrivent au Bangladesh, dans un état de panique pour survivre", a encore souligné l'économiste. 

"Elle est chef du gouvernement, mais n'a rien fait pour protéger les Rohingyas", déplore encore Muhammad Yunus, avant de conclure, sans ménagement : "C'est quelqu'un de complètement différent de celle que j’ai connue".