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Romain David , modifié à
L'historienne Galia Ackerman, invitée de Pierre de Vilno sur Europe 1, voit dans la contestation qui s’organise en marge des élections municipales à Moscou l’essoufflement de la mainmise de Vladimir Poutine sur la vie politique russe.
INTERVIEW

La Russie est à l’aube d’une campagne électorale très agitée pour conquérir la mairie de Moscou. Samedi dernier, plus de 20.000 personnes ont défilé dans la capitale russe, lors d’un rassemblement non autorisé, et 1.400 ont été arrêtées par les forces de l’ordre, parfois directement chez elles, dans des scènes rappelant les heures les plus sombres de l'URSS. Les États-Unis et l'Union européenne ont condamné un usage "disproportionné de la force". Pour Galia Ackerman, spécialiste de la Russie, et auteure du Régiment immortel. La guerre sacrée de Poutine, cette contestation qui enfle "est le signe évident de la faiblesse du régime".

"On sait que la cote de popularité de Vladimir Poutine a baissé, et la cote du parti présidentiel encore plus", relève mardi, au micro de Pierre de Vilno sur Europe 1, cette historienne. "Ça n’est pas un événement sporadique. Mais c’est la première fois [que l’on assiste à de telles manifestations] depuis la grande vague de manifestations de 2011-2012, quand il s’agissait de contester les législatives et ensuite la réélection de Vladimir Poutine", rappelle-t-elle. "L’opposition, ou plutôt ce qu’il en reste, relève la tête", affirme encore cette spécialiste du monde russe.

Les élections à Moscou, point de départ d'un ras-le-bol généralisé

Et pour preuve : le faible enjeu politique des municipales à Moscou, qui servent d’abord de catalyseur à la grogne contre le pouvoir en place. "En soi, ces élections ne sont pas très importantes. La Douma de Moscou ne joue aucun rôle politique, c’est un organe municipal", explique Galia Ackerman. "Quelques délégués de l’opposition se sont présentés pour cette élection. On les en a empêchés sous de faux prétextes, de sorte qu’aucun candidat de l’opposition n’a pu se présenter aux élections", pointe-t-elle. "Cela a provoqué des remous. L’enjeu maintenant n’est plus seulement Moscou, car pendant la dernière manifestation, réprimée avec beaucoup de sévérité, une part importante des manifestants venaient d’autres régions de la Russie."

Pour cette spécialiste, deux éléments peuvent justifier ce brusque ras-le-bol contre la mainmise de la majorité de Vladimir Poutine sur la vie politique. D’une part, les forts écarts de richesse qui fragmentent la société russe, dans la mesure où "à peu près la moitié des ménages n’a assez d’argent que pour manger et s’habiller". Et d’autre part, des réformes vécues comme punitives : "La réforme des retraites qui entre en vigueur a relevé très brutalement l’âge de départ alors que l’espérance de vie en Russie reste relativement plus basse que dans le reste du monde occidental.", constate Galia Ackerman.