L'UE espère se doter d'une liste noire des paradis fiscaux

Les pays membres devraient ensuite appliquer des sanctions aux pays "blacklistés" © EMMANUEL DUNAND / AFP
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avec AFP

Les ministres des Finances des 28 pays membres devraient se mettre d'accord jeudi sur une liste contenant une vingtaine de noms de paradis fiscaux européens.

Les 28 ministres des Finances de l'UE se réunissent mardi à Bruxelles dans l'espoir de se doter d'une liste noire d'environ 20 noms de paradis fiscaux opérant hors de leurs frontières, une première pour l'Union.

Une unanimité nécessaire sur les noms. Jusqu'au tout dernier moment, cette liste, très attendue après les scandales récents qui ont révélé différents systèmes d'évasion fiscale - "LuxLeaks" fin 2014, "Panama Papers" en avril 2016 et "Paradise Papers" en novembre 2017 -, devrait encore faire l'objet de tractations entre les États membres. Car, conformément aux règles européennes sur les questions fiscales, les 28 doivent s'entendre à l'unanimité sur le nom des pays "blacklistés".

Deux listes à venir. Plusieurs sources ont indiqué lundi que deux listes de pays doivent être publiées mardi : une première liste "noire", comportant autour de vingt juridictions (une source parlant de 19) et une seconde "grise", avec 45 autres qui se sont engagées à améliorer leurs pratiques. La liste noire devrait être régulièrement actualisée, selon plusieurs sources européennes.

Trois critères principaux. Épaulés par la Commission européenne, qui pousse depuis deux ans pour l'établissement de cette liste, les 28 États membres ont passé au crible un total de 92 juridictions [États et territoires] susceptibles de poser problème - parfois des îles minuscules -, à l'aune de trois critères :
- La transparence fiscale : pratiquent-elles ou non l'échange automatique d'informations ?
- L'équité fiscale : appliquent-elles ou pas, par exemple, des mesures fiscales préférentielles dommageables ?
- La lutte contre l'optimisation fiscale : mettent-elles en oeuvre ou pas les mesures de l'OCDE contre l'optimisation fiscale agressive ?

Au moment de l'élaboration des critères, certains États membres de l'UE avaient plaidé pour qu'un taux d'imposition zéro sur les sociétés soit également pris en compte, mais d'autres comme les Britanniques y étaient opposés.  En février dernier, les 28 s'étaient finalement entendus pour que le taux d'imposition zéro soit simplement identifié comme "indicateur" dans l'évaluation d'une juridiction.

35 pays désignés selon ces critères. Mardi dernier, l'ONG Oxfam a publié sa propre liste, en révélant que 35 pays au moins répondent aux critères sélectionnés par les Européens, dont "des paradis fiscaux notoires comme la Suisse et les Bermudes, mais aussi Jersey ou la Nouvelle-Calédonie". Oxfam avait également pointé du doigt quatre pays européens : l'Irlande, le Luxembourg, Malte et les Pays-Bas, qui devraient figurer sur cette même liste si les critères européens leur étaient appliqués.

Des mesures punitives en perspective. Mardi, les pays européens devraient assortir leur liste noire d'une possibilité de sanctions. Parmi les mesures punitives évoquées, "on peut imaginer le refus que des juridictions épinglées accèdent à certains programmes ou certains fonds de l'UE", observe une source européenne.

Là encore, les 28 de l'UE ne sont pas d'accord entre eux : un premier bloc composé de la Belgique, la France, l'Autriche, l'Allemagne, la Roumanie, l'Italie, l'Espagne, le Portugal, la Slovénie et la Commission européenne, prône de sanctions dures. Un autre bloc - Royaume-uni, Malte, Suède, Irlande, Pays-Bas, Luxembourg, Lituanie, Finlande et Grèce - plaide pour des sanctions plus souples, qui passeraient surtout par une surveillance accrue des États épinglés.