Italie : un décret obligeant les migrants à payer une caution de 5.000 euros jugé «inconstitutionnel»

Giorgia Meloni
Une juge de la ville de Catane, en Sicile, juge un décret anti-immigration de Giogia Meloni «inconstitutionnel» © FILIPPO MONTEFORTE / AFP
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avec AFP // Crédit photo : FILIPPO MONTEFORTE / AFP
Un décret anti-immigration adopté en septembre et prévoyant le versement d'une caution de 5.000 euros de la part de migrants déboutés du droit d'asile, sous peine d'être envoyés en centre de rétention pendant l'examen de leur recours, a été jugé inconstitutionnel par une juge de la ville de Catane. Giorgia Meloni s'est dite "stupéfaite par la sentence". 

La Première ministre italienne Giorgia Meloni a critiqué lundi une juge ayant considéré le dernier décret anti-immigration de son gouvernement ultraconservateur comme contraire à la Constitution et au droit européen.

Confrontée à de nombreuses arrivées de migrants sur les côtes italiennes, la coalition dirigée par Giorgia Meloni, arrivée au pouvoir il y a un an avec un programme résolument anti-immigration, a adopté une série de décrets, notamment pour accélérer les procédures d'expulsion des personnes ne pouvant invoquer le droit d'asile.

 

Un décret inconstitutionnel et contraire au droit européen

Vendredi, une juge de Catane (deuxième ville de Sicile), a libéré un migrant tunisien après avoir jugé inconstitutionnel et contraire au droit européen un décret adopté en septembre prévoyant que les migrants déboutés du droit d'asile devront verser une caution de 5.000 euros sous peine d'être envoyés en centre de rétention pendant l'examen de leur recours.

 

Giorgia Meloni, cheffe du parti post-fasciste Fratelli d'Italia, s'est dite sur Facebook "stupéfaite par la sentence de la juge de Catane, qui (...) libère un immigrant clandestin, déjà visé par une mesure d'expulsion, déclarant unilatéralement la Tunisie comme un pays dangereux (une tâche qui ne relève pas de la responsabilité du pouvoir judiciaire) et s'en prenant aux mesures d'un gouvernement démocratiquement élu". 

Le gouvernement a créé un centre de rapatriement "accéléré" à Pozzallo (Sicile) pour accueillir les migrants en provenance de Tunisie et Egypte, pays ayant conclu des accords avec l'Italie pour faciliter les rapatriements. L'Italie considère la Tunisie comme un "pays sûr" ce qui ne donne pas droit à une protection internationale à ses ressortissants. Dans la décision de vendredi consultée par l'AFP, la juge récuse le décret, estimant qu'il ne permet pas aux demandeurs d'asile venant de pays sûrs d'être évalués sur une base individuelle. 

"Neuf législations en matière d'immigration en un an"

La magistrate reproche aussi au texte de ne pas permettre aux tierces parties, comme les associations de migrants, de payer la caution de 5.000 euros pour le compte des migrants. Selon l'Association italienne pour les études juridiques sur l'immigration, les mesures du gouvernement sont "une mauvaise façon de légiférer dérivant d'une approche politique erronée". "Le gouvernement actuel, en un an seulement, est intervenu avec neuf législations en matière d'immigration et de droit d'asile, transposant dans l'ordre juridique la confusion politique, l'incapacité administrative (...) et les pulsions autoritaires", pointe l'association.

La cheffe du Parti démocrate (PD, principal parti de gauche) Elly Schlein a accusé Giorgia Meloni, en s'attaquant à un juge, "d'alimenter un conflit entre institutions nuisant au pays", alors que le gouvernement "rédige des lois clairement inconstitutionnelles". Le gouvernement va faire appel de la décision de la juge.