Israël-Hamas : aux portes de Gaza, le chef de l'ONU appelle à mettre fin au «cauchemar»

© MURTADHA AL-SUDANI / ANADOLU AGENCY / ANADOLU AGENCY VIA AFP
  • Copié
avec AFP / Crédit photo : MURTADHA AL-SUDANI / ANADOLU AGENCY / ANADOLU AGENCY VIA AFP , modifié à
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres est attendu samedi en Égypte à la frontière avec la bande de Gaza. Sur le territoire palestinien, l'inquiétude grandit sur la situation humanitaire. La crainte d'une prochaine offensive terrestre israélienne dans la ville surpeuplée de Rafah.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, en visite à la lisière de la bande de Gaza, a de nouveau appelé samedi à un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, pour mettre fin au "cauchemar" dans ce territoire palestinien au bord de la famine.

Les informations à retenir :

  • Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres est en visite en Égypte, à la lisière de Gaza, ce samedi
  • Il a de nouveau appelé samedi à un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas
  • Le peuple palestinien est prisonnier "d'un cauchemar sans fin", a insisté Antonio Guterres
  • L'armée israélienne a affirmé samedi avoir tué plus de 170 combattants palestiniens
  • Le ministre israélien des Affaires étrangères Israël Katz a qualifié sur X samedi l'ONU d'"organisation anti-israélienne"
  • Le ministère de la Santé du Hamas a fait état de 19 personnes tuées samedi par des tirs israéliens en attendant une distribution d'aide aux abords de la ville de Gaza

"Cauchemar sans fin"

Après cinq mois et demi d'une guerre dévastatrice dans la bande de Gaza, qui l'a plongée dans une situation humanitaire catastrophique, Antonio Guterres s'est rendu côté égyptien de la ville frontalière de Rafah, où il a dit être venu pour attirer l'attention sur la "douleur" des habitants de Gaza, prisonniers d'"un cauchemar sans fin". "Rien ne justifie les attaques horribles du Hamas le 7 octobre. Et rien ne justifie la punition collective subie par le peuple palestinien. Maintenant plus que jamais, il est temps d'un cessez-le-feu humanitaire immédiat", a-t-il lancé.

Les affrontements ne connaissent aucun répit dans ce territoire assiégé, notamment dans et autour de l'hôpital al-Chifa de la ville de Gaza (nord), où l'armée israélienne a affirmé samedi avoir tué plus de 170 combattants palestiniens et arrêté des centaines de suspects depuis le début de la semaine. Des avions de combat ont frappé par ailleurs une trentaine de "cibles terroristes" à travers la bande de Gaza vendredi. À Rafah, dans le sud, un bombardement nocturne sur une maison a tué une grand-mère, Nadia Kawareh, 65 ans, et quatre de ses petits-enfants âgés entre 3 et 12 ans, selon des proches et le ministère de la Santé du Hamas qui a fait état aussi de 14 blessés. "La maison entière a été détruite", a déclaré Fawzy Kawareh, un membre de la famille, selon qui d'autres personnes sont encore coincées sous les décombres.

Israël nie avoir tiré sur des Gazaouis attendant de l'aide, le Hamas annonce 19 morts

L'armée israélienne a nié avoir tiré samedi sur des Palestiniens qui attendaient une distribution de l'aide dans le nord de la bande de Gaza, comme l'accuse le Hamas qui a fait état d'un nouveau bilan de 19 morts. "Les informations affirmant que les forces israéliennes ont attaqué des dizaines de Gazaouis près d'un convoi d'aide sont incorrectes", a indiqué l'armée dans un communiqué. Selon "de premiers éléments", "il n'y a pas eu de frappe aérienne contre le convoi, ni de tirs par des forces (israéliennes) sur les gens près du convoi d'aide", a-t-elle ajouté.

9 personnes tuées par des tirs israéliens en attendant de l'aide

Le ministère de la Santé du Hamas a fait état samedi de neuf morts dans des tirs israéliens sur une foule attendant une distribution d'aide dans le nord de la bande de Gaza. Dans un communiqué, le ministère mentionne "au moins neuf martyrs et des dizaines de blessés par des tirs de chars et obus de l'armée d'occupation israélienne", au moment où "ils attendaient des camions d'aide au rond-point de Koweït". Sollicitée par l'AFP, l'armée israélienne a indiqué qu'elle vérifiait ces informations.

"Les blessés ont été transportés à l'hôpital Baptiste-Ahli", a dit Mahmoud Basal, un porte-parole de la défense civile à Gaza, décrivant "des blessures très sérieuses, certaines blessures par éclat d'obus". Le 14 mars, le ministère de la Santé du Hamas avait déjà fait état de 20 morts et plus d'une centaine de blessés dans des "tirs israéliens" dans des circonstances similaires, dans le même secteur. Le lendemain, l'armée israélienne avaient évoqué des tirs de "Palestiniens armés", niant ces accusations. Le 29 février, une distribution d'aide avait aussi tourné au drame dans l'ouest de Gaza-Ville, faisant 120 morts, selon le ministère, alors que la famine menace le territoire palestinien.

Le chef de la diplomatie d'Israël qualifie l'ONU d'"organisation anti-israélienne"

Le ministre israélien des Affaires étrangères Israël Katz a qualifié sur X samedi l'ONU d'"organisation anti-israélienne", après la visite au bord de la bande de Gaza du secrétaire général Antonio Guterres qui a appelé à un "cessez-le-feu humanitaire immédiat". "Sous son leadership, l'ONU est devenue une organisation antisémite et anti-israélienne qui abrite et encourage le terrorisme", écrit sur son compte X M. Katz, ajoutant que "Antonio Guterres est venu aujourd'hui du côté égyptien du passage de Rafah et a blâmé Israël pour la situation humanitaire à Gaza (...)".

"Assez"

Tôt samedi, le ministère de la Santé du Hamas a fait état de 67 morts au cours de la nuit et de la soirée à travers le territoire. "Nous en avons assez, je vous assure. Lâchez une bombe sur nous et libérez-nous de cette vie (...) Aucun être humain ne pourrait supporter ce qui nous arrive", dit en pleurant Turkiya Barbakh, proche de victimes de frappes dans le sud de Gaza. Le patron de l'ONU doit rencontrer samedi des travailleurs humanitaires du "côté égyptien" de Rafah, ville de Gaza adossée à la frontière dans laquelle s'entassent 1,5 million de Palestiniens, d'où les craintes pour la population en cas d'opération terrestre sur place.

La question a été au cœur des échanges vendredi à Tel-Aviv entre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken, qui s'opposent sur la façon d'affaiblir militairement le Hamas. "J'ai dit que nous n'avions pas la possibilité de défaire le Hamas sans entrer dans Rafah et sans éliminer les bataillons qui y restent. Je lui ai dit que j'espérais le faire avec le soutien des États-Unis, mais s'il le faut, nous le ferons seuls", a dit Benjamin Netanyahu après la rencontre avec le secrétaire d'État américain.

Ce dernier a affirmé qu'une telle opération "risque de tuer davantage de civils (...), d'isoler Israël davantage au niveau mondial et de mettre en danger sa sécurité à long terme". "Nous avons les mêmes objectifs qu'Israël : la défaite du Hamas. Mais une opération terrestre majeure à Rafah n'est pas le moyen d'y parvenir", a-t-il ajouté sur X, précisant qu'il rencontrerait la semaine prochaine des responsables israéliens à Washington pour en discuter.

"Hypocrite"

Antony Blinken a achevé vendredi une nouvelle tournée dans la région, qui l'a conduit en Égypte et en Arabie saoudite, pour tenter également d'accroître l'aide humanitaire dans la bande de Gaza et soutenir les pourparlers au Qatar en vue d'une trêve. Pendant ce temps à l'ONU, un projet de résolution au Conseil de sécurité, présenté par les États-Unis, sur un "cessez-le-feu immédiat", n'a pas été adopté vendredi en raison des veto russe et chinois.

Depuis le début de la guerre, les États-Unis s'étaient opposés à l'utilisation du terme "cessez-le-feu" dans les résolutions onusiennes, bloquant trois textes en ce sens. Ils ont finalement décidé de mettre aux voix ce nouveau texte qui mentionnait "la nécessité d'un cessez-le-feu immédiat et durable".

Mais la Russie et la Chine ont critiqué une formulation ambiguë n'appelant pas directement à faire taire les armes. L'ambassadeur russe Vassili Nebenzia a notamment dénoncé le "spectacle hypocrite" des États-Unis alors que "Gaza a quasiment été effacée de la carte". Un nouveau vote sur un nouveau projet de résolution exigeant un cessez-le-feu "immédiat", préparé par huit des dix membres non permanents du Conseil, est prévu lundi.

La guerre a éclaté le 7 octobre quand des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza ont mené une attaque sans précédent dans le sud d'Israël, qui a entraîné la mort d'au moins 1.160 personnes, essentiellement des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

Aide insuffisante

Selon Israël, environ 250 personnes ont été enlevées et 130 d'entre elles sont toujours otages à Gaza, dont 33 seraient mortes. En représailles, Israël a juré de détruire le Hamas au pouvoir à Gaza depuis 2007, qu'il considère comme une organisation terroriste de même que les États-Unis et l'Union européenne. Son armée a lancé une offensive qui a fait 32.070 morts à Gaza, selon le dernier bilan du ministère de la Santé du mouvement islamiste.

Israël impose un siège complet au territoire palestinien depuis le début de la guerre et contrôle strictement l'aide qui arrive principalement depuis l'Égypte via Rafah. Or ces contrôles ont pour effet, selon l'ONU, de réduire le nombre de camions entrant dans le territoire.

"Avant le 7 octobre, une moyenne de 500 à 700 camions entraient chaque jour à Gaza. Aujourd'hui, la moyenne est d'à peine 150", a chiffré sur X Philippe Lazzarini, le patron de l'Agence de l'ONU pur les réfugiés palestiniens (Unrwa). "Le siège, la faim et les maladies deviendront bientôt les principales causes des morts à Gaza", avait-il récemment averti. Pour soulager la population, plusieurs pays organisent des parachutages de vivres et ont ouvert un couloir maritime depuis Chypre vers Gaza. Mais l'aide reste insuffisante face aux besoins des 2,4 millions d'habitants de Gaza. L'armée israélienne a affirmé samedi avoir tué plus de 170 combattants palestiniens