Etats-Unis : la militante blanche dit "s'identifier comme noire"

Rachel Dolezal AFP 1280
Rachel Dolezal sur le plateau de la télévision NBC après le scandale sur ses origines noires © AFP/NBC/ANTHONY QUINTANO
  • Copié
P.H. avec AFP
La militaire blanche, qui se disait noire, s'est expliquée à la télévision américaine. Elle dit s'être toujours identifiée comme appartenant à la communauté afro-américaine.

Une militante des droits des Noirs, au cœur d'une polémique aux Etats-Unis après avoir prétendu être noire alors qu'elle est blanche, s'est expliquée pour la première fois mardi en affirmant "s'identifier comme noire" depuis sa plus tendre enfance.

Dans sa première interview télévisée nationale sur NBC, Rachel Dolezal, 37 ans, cheveux crépus et peau caramel, a reconnu, visiblement avec difficulté, qu'elle était blanche, en concédant le fait qu'une photo d'elle à 16 ans montrait une jeune fille, dont elle parle à la troisième personne, "identifiable en tant que blanche par ceux qui la voient".

"Je n'évite pas le soleil". Figure locale de la lutte pour les droits des Noirs à Spokane dans l'Etat de Washington, Rachel Dolezal a démissionné lundi de la direction de la section locale de la grande organisation militante NAACP après que ses propres parents biologiques, blancs, avec lesquels elle est brouillée, ont révélé la supercherie. Elle est depuis la semaine dernière au centre d'une polémique qui porte autant sur son histoire personnelle embrouillée que sur ce qu'elle signifie pour la cause noire aux Etats-Unis.

Lors de son interview mardi, la militante a affirmé s'identifier comme noire "depuis son plus jeune âge". "Je dirais que cela a commencé vers l'âge de cinq ans. Je me dessinais avec un crayon marron, pas un crayon couleur pêche, avec des cheveux noirs bouclés", a-t-elle dit. Quant à sa peau bronzée, Rachel Dolezal a répondu prosaïquement qu'elle "n'évitait pas le soleil".

Une crise d'identité. Poussée dans ses retranchements pour expliquer cette "tromperie" qui durait depuis une dizaine d'années, la jeune femme a répondu, de manière vague, que "la question est plus complexe que de s'identifier comme noire ou répondre à la question de savoir si on est noir ou blanc". Elle a reconnu ne pas avoir rectifié par le passé des articles de presse la qualifiant de métisse, "parce que les choses sont plus complexes que la vérité ou le mensonge à un moment donné".

Dans d'autres émissions sur NBC tout au long de la journée, Rachel Dolezal a affirmé qu'elle n'était "absolument pas blanche. Rien de ce qui est blanc ne peut me décrire". Les "gens ne me connaissent pas, ne savent pas par quoi je suis passée", a-t-elle encore ajouté en affirmant qu'il ne s'agissait pas d'une simple "crise d'identité". "Ma vie a été une survie et ce que j'ai fait tout du long, y compris mon identification, a été fait pour survivre", a-t-elle ajouté de manière là encore obscure.

Une histoire troublante. Depuis que ses parents Lawrence et Ruthanne Dolezal ont révélé la supercherie la semaine dernière, l'histoire personnelle de la jeune femme a émergé : une adolescence dans le Mississippi où elle côtoie la culture noire, des études à la Howard University, grande université noire de la capitale, des années de militantisme dans le nord-ouest du pays. Avec des détails troublants : une bataille pour la garde d'un de ses quatre frères noirs adoptés par ses parents, un ami noir qu'elle fait passer pour son père, jusqu'à une plainte classée sans suite pour discrimination raciale anti-blancs quand elle était étudiante – blanche – à Howard.

La sincérité de son engagement convainquait peu mardi des sociologues experts sur les questions d'identités raciales. Plonger à ce point dans une identité noire "sape l'excellent travail qu'elle a fait" pour la cause noire, a ajouté G. Reginald Daniel, de l'Université de Californie, "cette posture d'imitation et d'appropriation finit par être irrespectueuse".