Un Rennais a combattu en Libye

© Fabien Thelma
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avec Sébastien Guyot et Martin Feneau , modifié à
- Adel est de retour en Bretagne, après avoir tout plaqué pour aller combattre Kadhafi.

Un Rennais en guerre contre Kadhafi. Il y a deux mois, Adel, un Libyen installé en France depuis 10 ans, a décidé de partir faire la révolution en Libye. Cet ingénieur de quarante ans conçoit des stations d'épuration en Bretagne. Rien ne le prédestinait à partir au combat. Et pourtant. Adel a tout plaqué, même son job, pour devenir un combattant de la liberté.

Tout commence dans le salon de sa maison de Rennes où il est aujourd’hui rentré. "Quand j’ai vu le sang le couler, quand il a commencé à tirer sur les gens, je me suis dit ‘Adel, c’est le moment d’y aller", se souvient-il pour Europe 1. "J’ai acheté mon billet et le lendemain j’ai pris l’avion. On était avec trois femmes et un petit enfant, soit cinq passagers. Je suis sorti de l’aéroport de Tripoli et là j’ai vu des immeubles brûlés, des voitures calcinées. J’ai eu le sentiment que j’allais me venger", explique Adel.

L’ingénieur se rend à Zaouia, le premier front des forces rebelles contre Kadhafi. Et là tout va très vite. "J’ai vu le chef des opérations militaires. Il m’a donné une kalachnikov, on a pris le petit déjeuner avec tous les combattants et là j’ai entendu la première explosion. Ca a été terrible", raconte-t-il. "Pendant quelques minutes, j’ai eu vraiment peur. J’ai pensé : "Adel qu’est ce que tu fais ici ?", reconnaît l’ingénieur.

"Ce n’est pas humain"

Son premier coup de kalachnikov ? Adel s’en souvient encore. "Un officier était coincé dans un immeuble avec deux snipers. Il ne m’a pas vu. J’ai mis la kalachnikov sur la position continue et j’ai tiré. Il est tombé directement, devant moi, à quelques mètres".

Mais ce geste, même dans un contexte de guerre, Adel a dû mal à l’accepter. "Tirer sur quelqu’un comme ça, aussi gratuitement, ce n’est pas humain", admet le Rennais. "Mais je sais bien aussi que je suis dans un combat et qu’il faut que je fasse mon devoir".

"J’ai tué un soldat de Kadhafi" :

D’autres ont succédé. "Peut-être quatre ou cinq", précise-t-il. Après douze jours de combats, la ville est reprise par les forces de Kadhafi. Adel est obligé de se cacher. Mais il est bientôt arrêté. "Ils m’ont mis dans une salle les yeux bandés. Ils ont accroché mon pied à une chaîne au plafond. Ils m’ont laissé à peu près 3 heures. J’ai senti que ma tête allait exploser", se rappelle l’ingénieur.

"Je suis sorti mais je ne sais pas pourquoi"

Adel se met alors à crier "Lâchez moi, lâchez moi !". "Ils ont commencé à me frapper avec un câble ou un tuyau. J’étais inconscient. Ils ont jeté un saut d’eau sur moi et ils m’ont laissé par terre", raconte le Breton. "Cette nuit-là, j’ai perdu l’espoir de sortir. Le lendemain, un gardien est venu avec une petite liste et m’a dit : "vous allez sortir aujourd’hui". C’est comme ça que je suis sorti mais je ne sais pas pourquoi".

Adel a donc pris la fuite vers la Tunisie, puis Paris avant de finalement rentrer chez lui à Rennes. Mais deux semaines après ce cauchemar, l’ingénieur parle déjà de repartir avec un projet en tête... "Quand Kadhafi sera tombé, dit-il, avec toute la famille on part s'installer à Tripoli".