Tunisie : le coup de force des Anonymous

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Mounia Van de Casteele , modifié à
Des hackers se sont attaqués au Premier ministre tunisien et à des membres d'Ennahda.

Après les pages Facebook de sites islamistes et le ministère de la Justice et des Droits de l'Homme, c'est au tour du Premier ministre, Hamadi Jebali, d'être visé par les pirates informatiques se revendiquant des Anonymous. Le collectif dit avoir publié quelque 2.725 courriers électroniques de membres d'Ennahda, le parti islamiste au pouvoir en Tunisie, parmi lesquels certains seraient signés du Premier ministre.                

Cette action "en signe de protestation" vise à dénoncer l'incompétence du gouvernement actuel, accusé de ne pas tenir ses promesses. Si le gouvernement a assuré qu'il n'y aurait finalement pas de référence à la charia dans le préambule de la nouvelle Constitution, les extrémistes font néanmoins souffler un vent d'inquiétude au sein de la population tunisienne. Les incidents ne cessent de se multiplier depuis le début de l'année et les islamistes radicaux sèment le trouble un peu partout, comme dans les universités où des salafistes ont tenté d'imposer en cours des jeunes filles voilées de la tête aux pieds. Récemment, ce sont des artistes qui ont été agressés par des militants salafistes alors qu'ils fêtaient la Journée mondiale du théâtre.  

Une manifestation numérique ?

"Gouvernement tunisien, nous avons gardé une très grande partie de vos données secrètes. Si vous ne voulez pas les voir publiées sur internet nous vous demandons de rester à la hauteur de vos compétences, d'éviter la censure sur internet et de respecter les droits de l'homme ainsi que la liberté d'expression en Tunisie", menace un représentant du mouvement, affublé du masque des Anonymous, dans un enregistrement vidéo diffusé samedi sur une page Facebook au nom d'Anonymous TN. Il fait notamment allusion aux adresses emails personnelles, aux numéros de téléphone, aux transactions ba,caires ainsi que certaines factures de la campagne électorale.   

"Nous n'acceptons pas le piratage, ce n'est pas un comportement correct ou civilisé", a répliqué Ameur Larayedh, chef du bureau politique du parti, sans confirmer l'authenticité des documents. "Quoiqu'il en soit, le Premier ministre Hamadi Jebali est une personnalité publique et n'a rien à cacher", a-t-il dit.

Une authenticité mise en doute

"Quelques-uns des mails sont véritables, mais la plupart des données ont été truquées", a pour sa part estimé Nejib Gharbi, le porte-parole d'Ennahda. Celui-ci a par ailleurs ajouté qu'une plainte était à l'étude.

La publication de ces mails a mis les réseaux sociaux tunisiens en émoi, de nombreux internautes s'étant mis en quête des plus compromettants dans les quelque 2.725 courriers publiés, certains apparaissant très anodins.

Quelques rares internautes se sont élevés contre l'action des pirates au nom du respect de la vie privée et de la confidentialité.

Mais pour Ezzedine Kchok, président du "Parti pirate" tunisien, qui défend les hackers, "c'est ça la vraie démocratie, tout doit être transparent".