Quand le Channel faisait peur aux Anglais

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A la construction du tunnel, certains craignaient par exemple l’arrivée de la rage outre-Manche.

"Est-ce que la rage va arriver ? Est-ce que les Russes vont nous envahir en passant par le tunnel. Est-ce que la Grande-Bretagne ne devrait pas rester une île ? Je compatis avec ces arguments d’émotion, mais je ne peux pas croire qu’ils sont rationnels" : voilà la réponse très sérieuse faite par le secrétaire d’Etat anglais aux Transports, Nicholas Ridley, à un élu de la Chambre des communes, le 10 février 1986. Presque cinq ans plus tard, le 1er décembre 1990, une première galerie entre la France et l’Angleterre était finalement creusée. Malgré les peurs collectives exprimées outre-Manche.

Phobie, peur, crainte...

En Grande-Bretagne, les prises de position des anti-tunnel sous la Manche "ont souvent pris un tour passionnel (…) distillant comme à plaisir les sujets d’alarme : phobie de l’invasion, peur de la rage, crainte d’actions terroristes…", rappelle Jean-Pierre Navailles, dans son ouvrage Le tunnel sous la Manche : deux siècles pour sauter le pas.

Parmi les "peurs" les plus fréquemment exprimées outre-Manche, celle de l’arrivée de la rage. Et pour cause : la maladie n’a plus fait parler d’elle en Grande-Bretagne depuis 1902. Les Anglais, insulaires par nature, craignaient par exemple que des renards empruntent le tunnel et transmettent au passage la rage de l’autre côté de la Manche.

La menace serait toujours là

Pour répondre à ces peurs collectives, le très officiel traité de Canterbury, signé entre la France et l’Angleterre en 1986 pour donner un cadre législatif au tunnel, comprend des dispositions spéciales pour le contrôle des maladies. "De nombreuses infrastructures ont été ajoutées pour garantir que la rage ne passerait pas", précise aussi le site History1900.

Deux décennies plus tard, ces peurs n’ont pas totalement disparu. En juillet 2009, le tabloïd The Sun, sous le titre "Ils sont là", et avec un photomontage de l’animal toutes canines dehors, relatait une invasion d’écureuils de Corée, des animaux échappés d’animaleries mais aussi venus de France, dans les "sacs à dos ou les coffres de voitures" de touristes qui auraient emprunté le tunnel sous la Manche.