Mexique : une marche contre les "Narcos"

© MAX PPP
  • Copié
avec Léonore Mahieux et agences , modifié à
85.000 mexicains ont défilé dimanche à Mexico contre les violences liées au trafic de drogue.

C’est une longue marche pour exprimer un ras-le-bol. Plus de 85.000 personnes ont défilé dimanche en silence à Mexico, selon la municipalité, contre la violence provoquée par les narcotrafiquants et la riposte militaire de l'Etat. Ce défilé était la dernière étape d’une marche partie jeudi de Cuernavaca, à 90 km au sud de la capitale mexicaine.

34.6000 morts depuis 2006

La manifestation était organisée par l’écrivain Javier Sicilia, dont le fils a été abattu en mars avec six amis. Il a rédigé un appel dans lequel il met dos à dos l’Etat, qu’il considère incompétent et corrompu, et les narcotrafiquants, dont il dénonce la barbarie. Depuis 2006 et l’arrivée au pouvoir de Felipe Calderon, l’Etat a décidé d’engager l’armée dans la lutte contre les narcotrafiquants.

Les manifestants ont ainsi demandé la fin des affrontements, dont le bilan est très lourd : selon les chiffres officiels, 34.600 personnes ont trouvé la mort entre décembre 2006, date du début de l’offensive de l’armée, et décembre 2010 l’offensive de l’armée a fait. 3.000 personnes supplémentaires auraient trouvé la mort depuis début 2011, selon la presse mexicaine. La politique de Felipe Calderon a permis de capturer des dizaines de barons de la drogue depuis décembre 2009, mais n’a pas endigué la violence, notamment dans le nord du Mexique.

Zapatistes et catholiques ensemble

Des Zapatistes à l’Eglise catholique, l‘appel de Javier Sicilia a fédéré une large partie des Mexicains. Pour l’écrivain, "la sécurité nationale, ce n'est pas seulement lâcher les troupes dans la rue, c'est beaucoup d'autres choses". "Nous devons nous asseoir autour d'une table et réfléchir à la stratégie, parce que ce qui a été fait jusqu'à maintenant a été une erreur", a plaidé le poète.

Dans le cortège, nombreux sont les manifestants à dénoncer également la communication de l’Etat. Patricia Lopez, interrogée par Europe 1, a manifesté "car beaucoup de gens qui meurent sont innocents". Pour elle, "le gouvernement fait passer ces gens pour des narcotrafiquants et c’est un mensonge. On en a marre".

Pacte pour la dignité nationale

Le but de la marche était aussi symbolique. Les manifestants voulaient saluer la mémoire des victimes de ce que tous considèrent comme une véritable guerre. Il s’agissait de "donner des visages, des noms, des dates, à chacune des 40.000 victimes", a expliqué Javier Sicilia. Dans la foule, des milliers de ballons blancs affichaient ainsi les noms de celles et ceux tombés sous les balles de l’affrontement entre l’Etat et les narcotrafiquants. Beaucoup de manifestants portaient aussi des photos d'hommes ou de femmes morts ou disparus au cours des quatre dernières années.

Javier Sicilia ne compte pas s’arrêter là. En juin, un pacte pour la dignité nationale sera signé à Ciudad Juarez, dans le nord du Mexique, la ville la plus touchée par la violence avec plus de 3.000 morts en 2010.