Ils laissent un détenu mourir asphyxié

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Fabienne Cosnay , modifié à
En Suisse, des gardiens sont soupçonnés d'avoir délibérement laissé mourir Skander Vogt.

"Ça fait 50 minutes qu'il respire la fumée, il peut crever..." raconte au téléphone, un surveillant du centre pénitentier de Bochuz, en Suisse au sujet de Skander Vogt. "Eh bien… Ca lui fait du bien" lui répond son interlocuteur, un policier. Echanges de rires entre les deux hommes.

Le 11 mars dernier, peu après minuit, Skander Vogt, un détenu âgé de 30 ans, met le feu à son matelas. Il veut ainsi protester contre le fait qu'on lui ait confisqué sa radio. Il sera retrouvé mort asphyxié dans sa cellule deux heures plus tard. Un mois après, des enregistrements téléphoniques accablants pour l’administration pénitentiaire suisse sont révélés par le quotidien le Matin qui a retranscris en intégralité les bandes sonores, l’affaire n’en finit pas de faire scandale.

Les geôliers ont-ils agi délibérément ?

Les trois gardiens, présents dans le centre pénitentier de Bochuz, ont-ils délibérément refusé de porter assistance à Skander Vogt ? Plusieurs indices le laissent penser. Ses geôliers ont expliqué ne pas avoir ouvert la porte à barreaux de la cellule, se basant ainsi sur les directives du répertoire informatique du Service cantonal pénitentiaire. Le détenu étant classé "dangereux", il ne pouvait être extrait de sa cellule qu’en présence du DARD (Détachement action rapide et dissuasion), le groupe d’intervention de la police cantonale. Sauf que cette police spéciale n’arrivera sur les lieux qu’à 2h43 du matin, soit 1h50 après que le détenu a mis le feu à son matelas.

Plainte pour "homicide par négligence"

Dans un premier temps, le directeur de la prison annonce à la famille que Skander Vogt s'est suicidé. Avant que les bandes sonores ne soient rendues publiques. Les avocats du détenu ont décidé de porter plainte pour "homicide par négligence". Du côté des services pénitentiaires suisses, on minimise l’affaire. Dimanche, dans Le Matin, le commandant de la police cantonale vaudoise reconnait que les bandes sonores ne sont "évidemment pas à notre gloire". "Les propos tenus sont regrettables et inadmissibles". Avant d’ajouter : "Mais (ils) n’ont pas eu d’influence sur la rapidité de la prise en charge de la police. Une enquêté pénale a été ouverte lundi par la justice suisse.

 

Skander Vogt avait été condamné en 2001 à 20 mois de prison pour "dommages à la propriété, vol, injures, menaces", mais il est incarcéré depuis presque dix ans. L'administration pénitentiaire l'avait jugé "dangereux" -il était monté sur le toit de sa prison en 2008 pour protester contre ses conditions de détention- et le code pénal suisse permet d'isoler ce type de détenu pour une durée illimitée au-delà de sa peine.