Affaire du Sofitel : DSK est-il protégé par une immunité ?

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Ses avocats vont défendre le rejet de la plainte civile en invoquant son "immunité".

Un nouveau volet judiciaire s'ouvre mercredi dans l'affaire du Sofitel. A New York, s'ouvre la procédure civile dans l'affaire qui oppose DSK à Nafissatou Diallo, la femme de chambre qui l'accuse de viol, le 14 mai dernier. Le tribunal du Bronx est chargé d'étudier cette requête et de se prononcer sur l'abandon ou non des poursuites.

Benjamin Brafman et William Taylor, les deux avocats de Dominique Strauss-Kahn, comptent faire valoir "l'immunité" de l'ancien président du FMI pour retoquer cette plainte. Un pari risqué selon Christopher Mesnooh, avocat aux barreaux de Paris et de New York interrogé par Europe1.fr. "Le dossier est compliqué, le juge qui va trancher cette affaire devra examiner le droit international et la jurisprudence américaine", indique l'avocat. Qui peut bénéficier d'une telle "immunité" et sous quelles conditions ? Europe1.fr fait le point.

DSK bénéficiait-il de son immunité le jour de son arrestation ? C'est toute la question qui sera débattue mercredi. Le juge Douglas McKeon, chargé du dossier à la Cour suprême du Bronx, devra décider si l'ancien directeur général du FMI bénéficiait de l'immunité lors de son arrestation. La défense souhaite prouver que Dominique Strauss-Kahn était protégé par une immunité diplomatique "y compris pour des actes commis à titre personnel".

"Les avocats de DSK vont certainement plaider que sa présence à New York le week-end de son arrestation s'inscrit dans la continuité de ses fonctions et non pas dans un cadre purement privé", analyse Me Christopher Mesnooh. À son retour en Europe, après ce vol New York-Paris, l'ancien directeur du FMI devait en effet rencontrer la chancelière Angela Merkel puis d'autres responsables.

En quoi consiste cette immunité ? Elle évite à certains hauts fonctionnaires internationaux de faire l'objet de poursuites judiciaires durant l'exercice de leur mandat. Elle permet aux diplomates d'échapper à toute sanction judiciaire en cas de délits ou d'infractions.

Quelle convention régit l'immunité ? Cette protection découle de la convention des Nations unies de 1947 sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées. L'article 21 précise que le président du FMI bénéficie de cette immunité diplomatique, prévue par la convention de Vienne de 1961, rapporte Le Point.

L'article 39 de cette convention précise : "Lorsque les fonctions d'une personne bénéficiant des privilèges et immunités prennent fin, ces privilèges et immunités cessent normalement au moment où cette personne quitte le pays ou à l'expiration d'un délai raisonnable qui lui aura été accordé à cette fin, mais ils subsistent jusqu'à ce moment."

DSK a quitté le sol américain le 25 août dernier, le jour de la remise de son passeport par les autorités. Sauf que la plainte au civil de Nafissatou Diallo a été déposée le 8 août dernier époque à laquelle l'ancien président du FMI bénéficiait donc toujours de son immunité diplomatique.

Cette convention est-elle appliquée aux États-Unis ? "Ces conventions ont été ratifiées par un certain nombres de pays, mais pas par les États-Unis. Toutefois, le pays respecte de manière officieuse les droits de cette convention", décrypte Me Christopher Mesnooh.

Les avocats de DSK veulent faire valoir "l'immunité absolue accordée aux diplomates selon le droit international". Ils rappellent que le 14 mai, lorsqu'il a été arrêté à l'aéroport new-rorkais JFKennedy, leur client voyageait avec un passeport français et un laissez-passer de l'ONU et non avec un passeport diplomatique, rappelle Le Figaro.

Y-a-t-il une loi fédérale américaine sur l'immunité des diplomates ? Dans le droit fédéral américain, seulement deux textes - une loi américaine de 1945, et une convention des Nations Unies de 1961 – prévoient l'immunité des dirigeants d’organisations spécialisées. Ces deux textes ne rentrent pas les cadres de l'affaire DSK.

Dans leur plaidoirie longue de 25 pages, les avocats de Dominique Strauss-Kahn demandent donc  au tribunal "d'ignorer le droit fédéral qui sans ambiguïté n'octroie qu'une immunité limitée aux chefs d'organisations internationales telles que le Fonds monétaire international".

Que prévoit la réglementation interne du FMI ? L'article 9 section 8 des statuts du FMI, consultable sur le site de l'institution, stipule que les fonctionnaires et employés "ne peuvent faire l'objet de poursuites en raison des actes accomplis par eux dans l'exercice officiel de leurs fonctions, sauf si le Fonds renonce à cette immunité".

Le 17 mai dernier, soit trois jours après l'arrestation de Dominique Strauss-Kahn, le porte-parole du FMI William Murray avait d'ailleurs rappelé que "l'immunité du directeur général est limitée et n'est pas applicable dans cette affaire." Cette décision de l'institution "ne va pas dans le sens de l'ancien directeur du FMI, qui devra prouver, qu'au moment des faits, il bénéficiait bien de son immunité", indique Me Christopher Mesnooh à Europe1.fr.