A quoi va ressembler le Smic allemand ?

© THIERRY CHARLIER / AFP
  • Copié
avec AFP , modifié à
KEZAKO - Le 1er janvier 2015 entrera en vigueur le salaire minimum, une première en Allemagne.

En juillet dernier, les députés du Bundestag, l’équivalent de l’Assemblée nationale française, avaient adopté à une écrasante majorité le projet de loi instaurant un salaire minimum. Celui-ci, fixé à 8,50 euros brut l'heure - contre 9,61 euros en France - entrera en vigueur le 1er janvier 2015. Une période de transition de deux ans est toutefois prévue pour les secteurs encore sous le coup d'un accord salarial négocié entre partenaires sociaux. Il faudra donc attendre le 1er janvier 2017 pour que le salaire minimum soit étendu à tous. Europe1.fr vous dit tout sur cette première dans l'histoire de l'Allemagne.

>> LIRE AUSSI - L’Allemagne a désormais son salaire minimum

• Qui sera concerné ?

Le ministère du Travail assure que l'instauration du salaire minimum gonflera la paie de quelque 3,7 millions de personnes au 1er janvier 2015, et un million de plus au 1er janvier 2017, sur 39 millions de salariés. Le gouvernement a opté pour un même montant sur tout le territoire, qui correspond à un salaire mensuel de 1.473 euros brut pour une personne travaillant 40 heures par semaine.

• Quelles sont les exceptions ?

Au terme d'un âpre marchandage politique, le législateur a introduit plusieurs exceptions au principe du salaire minimum. Les moins de 18 ans sans qualification ne seront ainsi pas concernés, et ce afin de ne pas créer d'incitation à entrer sur le marché du travail au lieu de commencer un apprentissage ou des études. Une logique qui prévaut également pour les apprentis. Afin de favoriser leur réinsertion sur le marché du travail, les chômeurs de longue durée (au chômage depuis plus d'un an) ne seront pas non plus visés pendant les six mois suivant leur embauche.

>> LIRE AUSSI - Pourquoi les Allemands avaient supprimé le Smic

Deux corps de métiers sont également exemptés du salaire minimum. Les livreurs de journaux, d'abord, pourront percevoir en 2015 jusqu'à 25% de moins que le salaire minimum, 15% de moins en 2016 et ils toucheront 8,50 euros en 2017, même si le salaire plancher légal est supérieur à cette date. Enfin, les saisonniers percevront le salaire minimum, mais les agriculteurs ont obtenu sur la dernière ligne droite de pouvoir en déduire le gîte et le couvert.

• Sera-t-il réévalué ?

Comme en France, un groupe d'experts, composé de neuf personnes (représentants du patronat, des syndicats, économistes), examinera tous les deux ans une éventuelle réévaluation. Le premier examen aura lieu en 2016, pour un ajustement possible au 1er janvier 2017.

• Comment sera-t-il contrôlé ?

Pas question pour les entreprises de se défausser sur leurs sous-traitants. La ministre de l'Emploi Andrea Nahles les a déjà prévenus fermement. La loi prévoit d'ailleurs que soit engagée la responsabilité des entreprises qui font appel à des sous-traitants qui eux-mêmes enfreignent les règles du salaire minimum. Plus globalement, pour vérifier la bonne application de la mesure, les effectifs des douanes, en charge des contrôles sur le marché du travail, seront étoffés, avec la création de 1.600 nouveaux postes.

• Quel impact sur l'économie allemande ?

C'est LE débat qui agite la classe politique allemande depuis des mois : cette avancée sociale va-t-elle se traduire par des destructions d'emplois ? La fédération des chambres de commerce a ainsi chiffré à 200.000 le nombre d'emplois menacés dans le pays. Ce que le président de l'Agence pour l'emploi dément.

>> LIRE AUSSI - "La France a la même chance de réussir que l'Allemagne"

Si le pouvoir d'achat de nombre d'Allemands va mécaniquement augmenter, les coûts salariaux supplémentaires pourraient néanmoins se traduire par des hausses de prix, de la course en taxi à une coupe chez le coiffeur. Tous secteurs confondus, 26% des employeurs concernés par le salaire minimum prévoient d'augmenter leurs tarifs, 23% de rogner les primes aux salariés et 22% de supprimer des emplois, selon un sondage de l'institut économique Ifo, réalisé en novembre auprès de 6.300 sociétés.