Quelles peines pour les auteurs de l'incroyable braquage du Musée d'art moderne ?

Les prévenus s'étaient rendus coupables d'un vol très spectaculaire en 2010, au Musée d'art moderne. © AFP
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avec AFP , modifié à

Les auteurs présumés d'un braquage au Musée d'art moderne de Paris en 2010 vont connaître leur peine cet après-midi. Ils avaient subtilisés des toiles de maîtres après un braquage spectaculaire.

Un vol audacieux, des alarmes en panne et cinq toiles de maître toujours introuvables : l'"homme-araignée" et deux receleurs seront fixés lundi après-midi sur le sort que leur réserve la justice pour un casse inouï au Musée d'art moderne de Paris en 2010.

Des toiles de Picasso, Matisse ou Modigliani... Des peines de sept à dix ans de prison, assorties des amendes maximales, ont été requises début février contre ces hommes, pour avoir soustrait au regard de l'humanité des trésors irremplaçables : cinq merveilles de Picasso, Matisse, Modigliani, Braque et Léger, qu'un receleur dit avoir détruites sans convaincre personne.

Les toiles ont été évaluées à 109 millions d'euros par leur propriétaire, la mairie de Paris, partie civile au procès. Mais cette perte a "quelque chose d'absolument indicible", pour l'avocat de la ville, William Bourdon.

Jusqu'à 10 ans de prison. La peine la plus lourde a été requise à l'encontre du voleur, Vjéran Tomic, dit "l'homme-araignée", 49 ans : dix ans de prison, 300.000 euros d'amende et une interdiction d'exercer toute activité dans la vente de bijoux et d'oeuvres d'art pendant cinq ans.

Tomic, un as de la varappe autant qu'un voleur talentueux, avait reconnu le vol dès son arrestation. Le cambrioleur, dont "le professionnalisme frise l'excellence", "n'a rien d'un gentleman" avec ses quatorze condamnations au casier, a relevé à l'audience le procureur Anaïs Trubuilt.

Le commanditaire du vol serait un riche Saoudien. Contre Jean-Michel Corvez, un antiquaire de 61 ans pour qui Tomic avait déjà "fait des coups", le procureur a demandé 8 ans de prison et 150.000 euros d'amende, ainsi que la confiscation de sa propriété et une interdiction d'exercer dans le commerce d'oeuvres d'art pendant cinq ans.

L'accusation a décrit cet homme élégant comme un délinquant chevronné, à "l'absence totale de culpabilité" : il a refusé de donner l'identité de son commanditaire - un riche Saoudien selon ce que Tomic a entendu dire - et a à peine reconnu avoir relayé "une demande, et pas une commande" pour un tableau de Fernand Léger.

Les voleurs ont récusé leurs liens. Sept ans d'emprisonnement et 150.000 euros d'amende ont été réclamés à l'encontre de Yonathan Birn, 40 ans, un horloger qui, "tombé amoureux" de la Femme à l'éventail (1919) de Modigliani, avait accepté de garder les toiles avant de "s'en débarrasser". Un "menteur", selon l'accusation, que Corvez lui-même pense "trop malin" et "amateur d'art" pour "s'avilir en détruisant les oeuvres". Le parquet a demandé à l'encontre de ces trois hommes, des "associés" qui comparaissent libres, des mandats de dépôt à l'audience.

A la barre, les trois hommes ont nié toute association de malfaiteurs: le voleur a dit n'agir que sur commande sans connaître le receleur, l'antiquaire n'a reconnu qu'une commande au voleur. Corvez assure que Birn ignorait tout du vol et n'a fait que "dépanner" en gardant les toiles avant de les détruire, "pris de panique".

Où sont les toiles volées ? Leurs avocats ont tonné contre des réquisitions "très lourdes". Me David Olivier Kaminski a rappelé que son client, Vjeran Tomic, n'était qu'un "monte-en-l'air", qui "a agi seul", profitant d'une incroyable défaillance des systèmes de sécurité du musée, où les détecteurs de mouvement étaient en panne depuis deux mois.

Venu pour la Nature morte au chandelier (1922) de Léger, il était reparti avec cinq oeuvres majeures, embarquant aussi le Modigliani, Le Pigeon aux petits pois (1911) de Picasso, L'Olivier près de l'Estaque (1906) de Braque et une Pastorale (1906) de Matisse.

Que sont-elles devenues ? L'accusation ne croit pas une seconde à leur destruction. Et de rappeler que les prévenus "savent très bien que le jour où ils sortiront de prison, les toiles n'auront pas perdu de valeur et ils pourront les revendre".