5 mois de prison avec sursis pour l'ex-élue PS qui a refusé de marier deux femmes

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C.P.-R. avec AFP , modifié à
L'élue qui avait refusé de célébrer un mariage homosexuel a été condamnée à cinq mois de prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Marseille, mardi.

L'élue PS Sabrina Hout, qui avait refusé de célébrer un mariage entre deux femmes en mettant en avant ses convictions religieuses, a été condamnée mardi à cinq mois de prison avec sursis. L'adjointe de la sénatrice socialiste Samia Ghali, maire des XV et XVIe arrondissements de Marseille, a en effet été reconnue coupable de discrimination par personne chargée d'une mission de service public en raison de l'orientation sexuelle des victimes. Selon le parquet, il s'agit de la première affaire de ce type après 17.500 mariages homosexuels célébrés en France, depuis la promulgation de la loi sur le "mariage pour tous", le 17 mai 2013.

Les lois de la République priment. L'élue du Parti socialiste avait été assignée en justice pour discrimination en raison de l'orientation sexuelle par les deux femmes dont elle avait refusé d'enregistrer le mariage, Claude et Hélène. Celui-ci, avait en effet été célébré à la mairie des XV et XVIe arrondissements de Marseille, avant d'être annulé. Lors de l'audience devant le tribunal correctionnel de la cité phocéenne, début septembre, le parquet avait rappelé que "pour celui ou celle qui exerce un mandant d’élu, les croyances religieuses ne peuvent pas prévaloir sur les lois de la République", comme l'avait rapporté Libération. Une seconde enquête pour discrimination avait été ouverte sur la base d'une plainte de l'association LGBT Mousse.

Une condamnation au-delà des réquisitions du parquet. Le tribunal correctionnel de la cité phocéenne s'est montré encore plus sévère que le ministère public, qui avait requis trois mois de prison avec sursis et 1.500 euros d'amende, début septembre. Sabrina Hout a été condamnée à indemniser les deux épouses à hauteur de 1.200 euros chacune. Elle devra également verser 150 euros aux associations de défense des droits des homosexuels, qui s'étaient constituées partie civile, LGBT Mousse et SOS Homophobie, qui a d'ailleurs salué une "condamnation exemplaire".

Un simulacre d'union civile. Le 16 août 2014, jour du mariage de Claude et Hélène, Sabrina Hout avait confié à un adjoint, non habilité pour le faire, le soin de marier ces deux femmes vivant ensemble depuis une douzaine d'années. Lors de l'audience devant le tribunal, le déroulé de ce simulacre de mariage était ressorti avec évidence grâce à l'audition de trois témoins : l'agent d'accueil de la mairie, l'officier d'état civil et le conseiller d'arrondissement qui avait officié à sa place sans y être habilité. L'enchaînement des faits, non contesté par la prévenue, s'était déroulé ainsi : avant de sortir, Sabrina Hout avait disposé le chevalet avec le nom d'un autre élu, non présent, et signé le registre de mariage et le livret de famille où son nom était déjà consigné comme officiant. Le mariage des deux épouses avait ensuite dû être annulé. Elle ont ensuite été remariées le 14 février 2015 par Samia Ghali elle-même.

Elle "irait en enfer", si elle célébrait ce mariage. Dans son jugement, le tribunal correctionnel de Marseille considère comme "accablantes" les déclarations des trois fonctionnaires. Tous ont clairement indiqué que Sabrina Hout "ne voulait pas célébrer ce mariage car c'était contraire à ses convictions religieuses, qu'elle irait en enfer". Selon l'officier d'état civil, l'élue était même "très excitée et tapait des pieds".

A l'audience, Sabrina Hout avait oscillé entre excuses et justifications. "Je suis vraiment désolée. J'ai honte d'avoir fait ce que j'ai fait, si ça été interprété comme de l'homophobie", avait expliqué cette femme de 39 ans. Mais elle avait également évoqué un simple "mauvais concours de circonstances", niant tout sentiment homophobe et intention discriminatoire.

"Mascarade" et "mauvaise foi". Le tribunal évoque, lui, une mise en scène de la part de l'élue, une "mascarade" pour ne pas avoir à célébrer ce mariage alors qu'elle a, ce jour-là, uni les quatre autres couples, hétérosexuels ceux-là. Les juges pointent "non seulement la mauvaise foi de l'argumentaire de l'élue, mais aussi l'intention de discriminer le couple pour des raisons découlant de l'orientation sexuelle des futures conjointes".

Dans sa décision, la juridiction rappelle notamment qu'il "est impératif qu'aucun citoyen, quelque soit notamment son âge, son handicap, sa race, ses opinions politiques et naturellement son orientation ou identité sexuelle, ne doute ou n'ait à douter de la neutralité du service public et de la loyauté républicaine des élus et fonctionnaires".