Transportés à l'hôpital, ils sont tous les deux décédés en dépit d'un massage cardiaque pratiqué sur place. 1:19
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Mayalène Trémolet et Thibaud Hue avec AFP / Crédit photo : NICOLAS GUYONNET / HANS LUCAS / HANS LUCAS VIA AFP , modifié à
Nouveau drame après un refus d'obtempérer : selon la police, deux jeunes circulant à scooter sont morts après avoir percuté un véhicule en tentant d'échapper à un contrôle routier dans la nuit de samedi à dimanche à Limoges, en Haute-Vienne.

Nouveau drame après un refus d'obtempérer: deux jeunes circulant à scooter sont morts après avoir percuté un véhicule en tentant d'échapper à un contrôle de police, dans la nuit de samedi à dimanche à Limoges (Haute-Vienne). Un peu plus d'un mois après la mort du jeune Nahel tué par le tir d'un policier à Nanterre, qui avait déclenché plusieurs nuits d'émeutes dans tout le pays, ces deux décès ont provoqué des échauffourées à Limoges, avec des incendies de véhicules, rapidement maîtrisées.

Une course poursuite à plus de 100 km/h

Selon la version des faits donnée par plusieurs sources policières et confirmée par le parquet de Limoges, le deux-roues a pris la fuite à la vue d'une voiture de la brigade anticriminalité qui s'apprêtait à le contrôler dans le nord de la ville, vers 22h50 samedi soir. Une course-poursuite s'est engagée, avant que les policiers y renoncent "compte tenu de la vitesse du véhicule, estimée à plus de 100 km/h, et des risques pris par le conducteur du scooter", relate le procureur dans un communiqué.

Le scooter, un puissant Yamaha T-Max, a alors grillé un feu rouge selon plusieurs témoins, percutant violemment un véhicule tiers. La voiture de police se trouvait à "au moins 150 mètres" de là au moment du choc, d'après ces témoins cités par le parquet. "La police a fait correctement son travail", assure au micro d'Europe 1, le maire de Limoges Émile Roger Lombertie. "Nous sommes dans une dérive de l'esprit des lois dans la tête des amis et des familles qui fait que, pour eux, la police n'a pas le droit de poursuivre. Le refus d'obtempérer devient un droit. Et ce qui m'inquiète, c'est que lorsqu'on met en cause systématiquement la police et qu'on veut se débarrasser de la police, on met fin à nos libertés, on met fin à la démocratie, on met fin à la République", s'indigne-t-il.

Le conducteur du deux-roues, mineur, et l'autre victime, majeure, ont été projetés "à plus de 20 mètres". Transportés à l'hôpital, ils sont tous les deux décédés en dépit d'un massage cardiaque pratiqué sur place. Ils portaient tous les deux un casque. "Le conducteur du scooter est un mineur de 17 ans. L'identité du passager demeure à confirmer, ses empreintes digitales conduisant à plusieurs identités différentes", a précisé le procureur.

"Tragique accident"

La voiture percutée avait à son bord un père de famille et ses jeunes enfants, qui sont "choqués et traumatisés", a indiqué la mairie de Limoges. "Nos pensées vont évidemment aux familles des victimes disparues", a réagi Émile Roger Lombertie, maire de Limoges, déplorant un "tragique accident". Un produit s'apparentant à de la résine de cannabis a été retrouvé dans une sacoche appartenant à l'une des victimes. Un proche, interrogé par l'AFP, a précisé que le conducteur était originaire du quartier de Beaubreuil, où il aurait eu "quelques soucis avec la police". "Il a sans doute pris peur car son T-Max n'était pas en règle, il n'avait pas les papiers", a-t-il ajouté.

Le parquet a confirmé que le certificat d'assurance du scooter était périmé. Le conducteur était connu de la police pour des faits de destruction de biens publics avec circonstance aggravante et remise d'objets à des détenus (livraison de colis par-dessus les murs de la prison de Limoges). Deux enquêtes ont été ouvertes, confiées à la Sûreté départementale: l'une pour refus d'obtempérer aggravé par la mise en danger délibérée, l'autre pour homicide involontaire.

Échauffourées

Après les faits, des échauffourées se sont produites dans la ville avec, selon les pompiers, des véhicules incendiés à Beaubreuil. "Je pense que ça va encore chauffer", estimait le proche des victimes interrogé par l'AFP. Le quartier est resté calme dimanche dans la journée. La compagnie CRS 8, unité spécialisée dans la lutte contre les violences urbaines, et un escadron de gendarmes mobiles ont été déployés à Limoges. "Aucune violence ne ramènera ces deux garçons à la vie", a dit le maire de la ville, appelant à "l'apaisement".

Ces deux décès interviennent un peu plus d'un mois après la mort, fin juin, de Nahel, 17 ans, tué par un tir policier après un refus d'obtempérer à Nanterre. Sa mort avait déclenché plusieurs nuits de violences urbaines dans le pays, avec des heurts entre émeutiers et forces de l'ordre, des scènes de pillages, des tirs de mortiers d'artifice sur des bâtiments publics et des incendies. Deux semaines plus tôt, à Angoulême, un Guinéen âgé de 19 ans avait trouvé la mort, tué par le tir d'un policier lors d'un contrôle routier.

Un drame qui relance le débat sur la manière de gérer ces interventions. Le directeur central de la police judiciaire, Mathieu Valet, réclame une justice plus sévère. "Il faut restaurer l'autorité de l'Etat et ça passe par une justice implacable. Si les peines étaient dissuasives, si elles étaient appliquées, si elles étaient fermes, même de courtes durées pour marquer le coup, on sait que derrière, on aurait des personnes qui seraient moins soumises à passer à l'acte, que ce n'est le cas aujourd'hui parce que l'impunité, c'est la première arme de ces délinquants", affirme-t-il au micro d'Europe 1.