Crash du Rio-Paris en 2009 : Airbus et Air France au tribunal à partir de lundi

228 personnes sont mortes dans le crash de l'avion.
228 personnes sont mortes dans le crash de l'avion. © Evaristo SA / AFP
  • Copié
avec AFP
Plus de treize ans après le crash du Rio-Paris au large du Brésil qui avait tué 228 personnes, le constructeur Airbus et la compagnie Air France sont jugés à partir de lundi et pour deux mois à Paris. C'est la catastrophe la plus meurtrière de l'histoire d'Air France. L'épave n'a été retrouvée que deux ans après le drame.

Plus de treize ans après le crash du Rio-Paris au large du Brésil qui avait tué 228 personnes, le constructeur Airbus et la compagnie Air France sont jugés à partir de lundi et pour deux mois à Paris. Le 1er juin 2009, le vol AF447 reliant Rio de Janeiro et Paris s'est abîmé en pleine nuit dans l'Atlantique, 3H45 après son décollage, entraînant la mort de ses 216 passagers et 12 membres d'équipage. C'est la catastrophe la plus meurtrière de l'histoire d'Air France. Les premiers débris, ainsi que des corps, ont été retrouvés dans les jours qui suivent, mais l'épave n'a été localisée que deux ans plus tard, le 2 avril 2011, à 3.900 mètres d'un fond entouré de hauts reliefs sous-marins, lors de la quatrième phase de recherches.

"Nous attendons que ce procès soit bien le procès d'Airbus et d'Air France"

Les boîtes noires, repêchées un mois plus tard, ont confirmé que les pilotes, désorientés par le givrage des sondes de vitesse Pitot dans la zone instable du Pot au noir près de l'Équateur, n'ont pu rattraper le décrochage de l'appareil, qui a eu lieu en moins de cinq minutes. Après une longue succession d'expertises, les juges d'instruction ont prononcé un non-lieu le 29 août 2009. Scandalisés, les proches des victimes et les syndicats de pilote ont fait appel et, le 12 mai 2021, la chambre de l'instruction a prononcé le renvoi pour homicides involontaires des deux entreprises devant le tribunal.

À l'issue d'un "combat judiciaire" et d'une instruction "chaotique", "nous attendons que ce procès soit bien le procès d'Airbus et d'Air France" et non "celui des pilotes", a déclaré à l'AFP Danièle Lamy, présidente de l'association de proches de victimes Entraide et Solidarité AF447. "Nous attendons un procès impartial, exemplaire, pour que cela ne se reproduise plus et que, par ce procès, les deux prévenus mettent la sécurité aérienne au centre de leurs préoccupations plutôt que seulement la rentabilité", a-t-elle ajouté.

Air France "garde en mémoire le souvenir des victimes de ce terrible accident et exprime sa plus profonde compassion à l'ensemble de leurs proches", selon un communiqué de la compagnie. "Air France, qui avait bénéficié d'un non-lieu à l'issue de l'instruction, continuera à démontrer qu'elle n'a pas commis de faute pénale à l'origine de l'accident et plaidera la relaxe", a notamment poursuivi l'entreprise. L'avionneur européen Airbus, qui n'a pas souhaité s'exprimer avant le procès, conteste lui aussi toute faute pénale.

"Former" et "informer"

L'avion immatriculé F-GZCP et mis en service quatre ans plus tôt transportait des passagers de 33 nationalités différentes, dont 61 Français, voyageant pour des vacances ou pour raisons professionnelles. Au total, 476 proches se sont constitués partie civile. Cinq demi-journées seront consacrées à ceux souhaitant témoigner. "C'est un procès qui va être très technique", a souligné Me Alain Jakubowicz, avocat d'Entraide et Solidarité. "Bien sûr qu'on va aller sur ce terrain-là, nous y sommes prêts, mais notre souci aussi c'est de redonner cette dimension humaine. (...) Ce sont des hommes, des femmes, des enfants, qui sont morts, qui pouvaient être vous ou moi", a-t-il affirmé.

À la barre se succèderont surtout de nombreux experts et pilotes : la 31e chambre correctionnelle du tribunal de Paris devra en effet déterminer si Airbus et Air France, qui encourent 225.000 euros d'amende, ont commis des fautes en lien certain avec l'accident. Dans son arrêt de renvoi, la cour d'appel a estimé qu'il existait des charges suffisantes contre Air France pour s'être "abstenu de mettre en œuvre une formation adaptée (et) l'information des équipages qui s'imposait" face au givrage des sondes, "ce qui a empêché les pilotes de réagir comme il le fallait".

Airbus a été renvoyé pour avoir "sous-estimé la gravité des défaillances des sondes anémométriques équipant l'aéronef A330, en ne prenant pas toutes les dispositions nécessaires pour informer d'urgence les équipages des sociétés exploitantes et contribuer à les former efficacement". Les défaillances de sondes s'étaient multipliées dans les mois précédant l'accident. Après la catastrophe, le modèle concerné a été remplacé dans le monde entier. Le drame a aussi entraîné d'autres modifications techniques dans le domaine aéronautique et une formation renforcée au décrochage ainsi qu'au stress des équipages.