Clichy-sous-Bois : Me Mignard dénonce un '"apartheid judiciaire"

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Me Jean-Pierre Mignard, à Rennes, après l'annonce lundi de la décision du tribunal correctionnel. © AFP
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L'avocat des familles de Zyed et Bouna, morts dans le drame de 2005, revient sur la relaxe des deux policiers jugés pour non-assistance à personne en danger.
INTERVIEW

En 2005, le drame avait coûté la vie à deux jeunes adolescents et enflammé les banlieues françaises pendant trois semaines d'émeutes. Après 10 ans d'attente, les proches de Zied et de Bouna ont appris lundi la relaxe des deux policiers poursuivis pour non-assistance à personne en danger dans cette affaire.

L'avocat des familles, Me Jean-Pierre Mignard a réagi lundi à cette décision dans Europe Soir. Une décision que le conseil accueille avec beaucoup d'"amertume".

"C'est comme si nous n'avions pas été là". "Ce jugement ne prend en charge que les arguments des prévenus. Aucun argument des parties civiles, et dieu sait si depuis dix ans nous en avions présenté, n'est repris par le tribunal. Rien, absolument rien. C'est d'ailleurs comme si nous n'avions pas été là. Donc évidemment, c'est une première grande amertume", déplore l'avocat. "La seconde, vient d'une appréciation des faits que nous ne partageons évidemment pas et que je critique très durement. C'est une décision de justice, donc je la respecte. Mais je ne l'estime pas", regrette-t-il. 

"Nous voulions que les faits reçoivent leur qualification". Jean-Pierre Mignard refuse cependant de regretter l'absence de condamnations des policiers, préférant commenter les faits. "Nous n'avons jamais été vengeurs dans cette affaire. Nous avons toujours voulu une seule chose : que les faits reçoivent leur qualification, c’est-à-dire de non-assistance à personne en péril", assure-t-il."Que demandions-nous ? Nous demandions simplement à ce que l'on crie, à ce qu'on les appelle pour leur dire 'attention, c'est très dangereux. Ne bougez plus, nous allons appeler, peut-être les pompiers, peut-être EDF, qui seraient venus très tôt'. Nous ne demandions que cela, et même cela a été refusé", confie l'avocat.

Le risque de devenir "un pays vieillissant, médiocre et méchant". Me Mignard craint-il des débordements à Clichy-sous-Bois et dans les banlieues françaises suite à cette décision ?  "Je ne sais pas et en tout cas je ne le souhaite pas, assure-t-il, Parce que je sais très bien que les violences entrainent encore plus de violences". Puis l'avocat, proche de François Hollande, reprend les termes prononcés par Manuel Valls en janvier dernier sur la ghettoïsation.  "Il y a peu de temps, le Premier ministre parlait d'"apartheid", certains ont évoqué un apartheid social, en évoquant les quartiers", rappelle-t-il.

Me Mignard :

 

Entendu sur europe1 :
Je n'hésite pas à dire qu'il y a des décisions de justice qui s'apparentent à un apartheid judiciaire. Celle-ci notamment..

 

Puis Jean-Pierre Mignard lance un appel en forme d'avertissement sur la politique des banlieues. "Faisons très attention : si la France ne porte pas un autre regard social sur les populations des quartiers, sur les jeunes Français d'origine arabe ou africaine, cela se terminera très mal. Et cela va être pour la France un handicap considérable. Ce grand pays ne pourra devenir un très grand pays qu'à la condition d'intégrer tous ceux et toutes celles qu'il rassemble. Sinon, ce sera un pays vieillissant, médiocre, refermé sur lui-même, et méchant".