Brétigny : les juges à la peine pour enquêter sur l’accident de train

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Sept personnes sont mortes dans l'accident ferroviaire du 12 juillet 2013, à Bretigny-sur-Orge. © KENZO TRIBOUILLARD / AFP
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Julien Pearce et et AFP , modifié à
Les magistrats chargés de l’enquête sur la catastrophe ferroviaire ayant fait sept morts demandent à être dessaisis du dossier. Ce que le procureur d’Evry refuse.

C’est une démarche rarissime. Faute de moyens pour mener à bien leurs investigations, les trois juges chargés d’enquêter sur l’accident de train qui avait coûté la vie à sept personnes, le 12 juillet 2013, ont demandé à être dessaisis, révèle jeudi Le Parisien. Le déraillement de cet Intercités Paris-Limoges en gare de Brétigny-sur-Orge dans l'Essonne, avec 385 personnes à bord, reste l'une des plus importantes catastrophes ferroviaires françaises.

Un manque de moyens. Dans un courrier envoyé en début d’année au procureur d’Evry, les juges invoquent un poste de magistrat toujours non pourvu ou encore un manque de greffes. A l’appui de ces arguments, les juges expliquent qu’ils sont, dans ces conditions, "en difficulté pour gérer ce dossier exceptionnel par son ampleur".

La SNCF et Réseau ferré de France mis en examen

En juillet 2013, le déraillement d’un Intercités Paris-Limoges a coûté la vie a sept personnes et fait 32 blessés en gare de Bretigny-sur-Orge, dans l’Essonne. A la suite de ce drame, une enquête a été ouverte et confiée à trois juges d'instruction pour déterminer les causes de l’accident, provoqué par le basculement d'une éclisse, pièce métallique raccordant deux rails.

En septembre 2014, Réseau ferré de France et la SNCF ont été mis en examen pour "homicides et blessures involontaires". Cette mise en examen a permis à la SNCF d'accéder au dossier de l'instruction. En janvier dernier, la compagnie ferroviaire a remis en cause le rapport d'expertise sur l'accident, dénonçant un "manque de sérieux" et "des erreurs", et a demandé une contre-expertise. 

Requête rejetée. Les magistrats ont donc demandé à être déchargés de l’affaire, au profit du tout nouveau pôle spécialisé en matière d'accidents collectifs, créé en décembre 2014 à Paris. Mais le procureur d’Evry, Eric Lallement, a refusé cette requête et assume. Si la situation financière du parquet est contrainte, pour autant, "le plus dur est passé", écrit le magistrat estimant que les causes de l’accident ayant été déterminées, il ne reste plus qu’à établir les responsabilités.

Eric Lallement a également expliqué à l'AFP que si l'enquête avait été transférée à Paris, "il y aurait eu une perte de connaissance du dossier". Il juge par ailleurs que cette demande fait partie d'un "dialogue institutionnel normal entre des juges d'instruction et un procureur".

Les familles écrivent au président. Ce discours ne convainc pas les familles des victimes de cet accident. Quelques jours après le drame, la garde des Sceaux, Chistiane Taubira, leur avait assuré que tous les moyens seraient donnés pour que l’enquête se déroule dans de bonnes conditions. "On ne veut pas arriver au procès avec un dossier sans éléments", s’inquiète auprès d'Europe 1 Thierry Gomez, qui a perdu ses parents dans l’accident ferroviaire. "Il faut que les victimes soient rassurées, les juges d'instruction font un travail remarquable et il n'y aura pas d'incidence sur le traitement du dossier", a, de son côté, tenter de rassurer le procureur d'Evry.

Toutefois, pour demander des explications, les familles enverront, jeudi matin, deux lettres : l’une pour la ministre de la Justice, l’autre pour François Hollande.