Béziers : la prof "n'en pouvait plus"

Le procureur de la République de Béziers a évoqué "une tentative de suicide en lien avec l'activité professionnelle de la professeur.
Le procureur de la République de Béziers a évoqué "une tentative de suicide en lien avec l'activité professionnelle de la professeur. © MAXPPP
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avec Raphaële Schapira , modifié à
- L'auteure de Madame, vous êtes une prof de merde ! décrit un "malaise" global.

"Je suis véritablement révoltée". Pour Charlotte Charpot, une ancienne enseignante de français, auteure de Madame, vous êtes une prof de merde !, le geste de la professeur qui s'est immolée par le feu jeudi dans un lycée de Béziers, est symptomatique d'une profession en plein mal-être. "Tout cela fait remonter chez moi tout le malaise que j'ai pu vivre pendant des années", a-t-elle confié.

Un mal-être qui s'est révélé avec une terrible violence, jeudi, dans la cour du lycée Jean-Moulin de Béziers, dans l'Hérault. Vers 10 heures, au beau milieu de la récréation, une enseignante de mathématiques, âgée de 44 ans, s'est placée au centre de la cour du lycée, un bidon d’essence à la main, en criant avant de s'asperger de carburant et de mettre le feu. Transférée au service des grands brûlés au CHU de Montpellier, l'enseignante se trouverait dans un état grave, mais ses jours ne seraient pas en danger.

Le mal-être d'une profession

L'enseignante n'a laissé aucun document permettant d'expliquer son geste. Mais selon les premiers témoignages, elle était en conflit avec de nombreux élèves qui la trouvaient trop sévère. Des relations confidentielles qui ne surprennent pas Charlotte Charpot qui a enseigné sept ans partout en France avant de mettre un terme à sa carrière à sa carrière de prof pour se consacrer à l'écriture.

"Il faut savoir que lorsqu'on entre dans une salle des profs, on a au moins un enseignant en larmes, une enseignante hystérique, des cris, des hurlements, des batailles des insultes", a confié l'auteure de Madame, vous êtes une prof de merde !.

"Ça ne m'étonne pas" :

Selon les premiers éléments de l'enquête, une réunion houleuse se serait tenue la veille du drame à Béziers. Une réunion que l'enseignante qui a tenté de mettre fin à ses jours aurait très mal vécue. "On en arrive à retourner la violence que l'on subit au quotidien contre soi-même, ou contre l'autre. C'est ce qu'il s'est passé avec cette enseignante. Elle a retourné le geste fatal contre elle-même, parce qu'elle n'en pouvait tout simplement plus", commente sa consoeur.

Une "ambiance d'agressivité"

Si le procureur de la République de Béziers a évoqué "une tentative de suicide en lien avec l'activité professionnelle de la professeure", les syndicats préfèrent rester prudents en parlant d'un "double facteur" : "des difficultés professionnelles et des difficultés personnelles".

Un positionnement qui suscite l'indignation de Charlotte Charpot. "Ce geste-là, dans le lieu où il a été commis, est lié au métier. Qu'on n'aille pas dire qu'elle était sans doute en dépression par ailleurs. C'est faux. Elle a posé un acte extrême et ça ne m'étonne pas".

Face à ce contexte de tension permanente, Charlotte Charpot a elle-même fait le choix de quitter la profession. "Moi, j'ai quitté le métier un beau jour, en me disant le matin : soit c'est moi qu'on poignarde, soit c'est moi qui agresse un élève parce que je ne peux plus supporter l'ambiance d'agressivité autour de moi", a-t-elle raconté.