L'édito politique de Claude Askolovitch

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
La campagne européenne terminée avant d'avoir commencée

MOF : L’édito politique d’Europe 1, bonjour Claude Askolovitch. La campagne européenne se termine déjà... Le problème, c’est qu’elle n’a peut-être jamais commencé... Selon vous, on vient de vivre un ratage démocratique....

C.A : C’est une campagne dont beaucoup de gens ont eu envie de se débarrasser... parce qu’elle faisait peur aux grands partis... il y avait la peur du PS, et l’impatience de l’UMP de proclamer, on a gagné et de passer à autre chose... Mais avant la peur, il y aussi une campagne très compliquée... Pour réussir une élection, il faut savoir à quoi elle sert... Elire un homme, ou choisir une politique... Une élection, c’est un moment fondateur... L’élection européenne, elle ne recommence rien... L’Europe une construction continue... les politiques se poursuivent, les grands agendas existent... Ensuite, on a encore compliqué les choses... Personne n’a réussi à fixer les débats sur un ou deux thèmes... sur lesquels il y a aurait eu une dispute... Nicolas Sarkozy a essayé de le faire avec la Turquie... ça n’a pas pris... ou simplement dans son électorat... et c’est peut-être mieux... c’était un débat piégé. La gauche a un peu essayé avec Barroso... mais il n’existe pas assez. Elle a essayé avec les services publics... ou son emprunt européen... c’est sérieux, et c’est concret... Mais c’est compliqué parce que la réalité européenne n’est pas celle d’un clivage dur entre la droite et la gauche... et avec la crise, tout le monde est sur le terrain de la protection... les partis conservateurs parlent comme des socio-démocrates modérés...

MOF : On a dit que tout le monde avait en tête des enjeux nationaux... ça a abimé la campagne selon vous?

C.A : Ce qu’on voit... comme par hasard, les deux listes qui se sont le mieux sortie de cette campagne ce sont deux listes qui sont incarnées... et qui jouent quelque chose en Europe. Daniel Cohn Bendit et ses écolos, parce que Cohn Bendit est un homme politique européen avant tout ; et l’UMP parce que l’Europe est devenue un thème vital pour Nicolas Sarkozy... Maintenant, sur les enjeux nationaux. Il ne faut pas être hypocrite. Ca a toujours existé, ça existe à l’étranger, et c’est normal... C’est le produit de la proportionnelle.... L’Europe ressemble au premier tour de la présidentielle, mais sans les risques... on vient pour se montrer... pour affirmer son existence comme Bayrou, ou pour commencer à exister comme Mélenchon... C’est parfois une illusion...

MOF : Pour vous, l’Europe va sortir affaiblie de cette campagne ?

C.A : Non... parce qu’elle existe et qu’elle va continuer... Ce sont plutôt les partis politiques... qui ne sont pas au niveau... et peut-être nous... les medias... Ce n’est pas seulement dans les dernières semaines... on devrait peut-être faire vivre le parlement européen pendant 5 ans. Enfin... c’est une consolation... la banalité de la campagne... montre aussi que l’Europe s’est banalisée. Ca faisait 20 ans, qu’on se disputait entre pro-européens et anti-européens... c’est pour ça que les campagnes étaient animées... là, c’est terminé... L’Europe existe, même si on doit lui donner une structure politique et démocratique... L’abstention, c’est aussi un consentement.