L’édito de Catherine Nay

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
Nicolas Sarkozy et l'outre-mer

Quatre mois après une grève générale sans précédent, qui avait paralysé la Guadeloupe, puis la Martinique, Nicolas Sarkozy, comme il l'avait promis, a rendu visite aux Antilles.... Un voyage de 2 jours. D'abord à Fort de France, où il a annoncé l'organisation d'un référendum sur un statut d'autonomie ; mais, a-t-il précisé, qui ne rime pas avec l'indépendance...

L'autonomie cela fait longtemps qu'on en parle en Martinique. C'était une vieille revendication d'Aimé Césaire, le maire de Fort de France à laquelle Jacques Chirac avait acquiescé durant sa campagne présidentielle de 2002. Mais pour transformer leur département région en assemblée unique et offrir une marge d'action plus grande aux élus, il fallait modifier l'article 73 de la Constitution ; ce qui a été fait en mars 2003. Promesse tenue. Mais l'article révisé précisant que tout changement de statut ne pouvait intervenir qu'après consultation populaire. Les élus proposant, la population disposant, l'Etat n'intervenant pas dans la campagne.

En décembre 2003, 4 référendums étaient organisés en Martinique, en Guadeloupe, à Saint-Martin et à Saint-Barth. Deux îles qui voulaient être détachées de la Guadeloupe.

Résultat : un "oui" massif dans ces 2 petites îles. Mais un "non" qui l'a emporté de justesse en Martinique. En revanche un "non" massif : 73%, en Guadeloupe. La population craignant d'être larguée par la France. D'ailleurs les Antillais aiment à rappeler qu'ils sont devenus Français bien avant les Savoyards et les Niçois. La Guyane, la Réunion ne veulent surtout pas qu'on leur parle d'autonomie.

Ce qui a échoué en 2003 peut-il réussir en 2009 ou 2010 ?

En Martinique tous les élus, les présidents du Conseil régional et Conseil général, le maire de Fort de France, tous avancent que les rapports avec la France doivent être redessinés. Ils réclament une marge d'action plus grande, à eux de convaincre la population martiniquaise.

En Guadeloupe, où il était hier soir, Nicolas Sarkozy a prononcé un long discours, souvent interrompu par les applaudissements... Mais il n'a pas proposé ce changement de statut…

Parce que ce n'est pas une exigence des élus qui ont, au contraire, demandé un délai de dialogue supplémentaire de 18 mois avant d'évoquer un possible changement institutionnel. En Guadeloupe la population n'est pas prête. Elle craint même qu’un statut d'autonomie la prive de l'aide de Bruxelles; ce qui ne serait pas le cas. Mais ça serait mettre la charrue avant les bœufs après une crise sociale historique émaillée de violences : un syndicaliste a été tué. C'est toute l'île qui doit se reconstruire.

Nicolas Sarkozy a fait un long discours mais il n'a pas fait d'annonce.

Parce qu'il attend la fin de la grande concertation ; les états généraux qui continuent jusqu'à fin septembre. Les décisions, a-t-il dit, seront prises en Octobre.

C'était un discours de responsabilité que les Guadeloupéens prennent leur destin en main et ne se contentent plus d'assistanat... Et d'appel au dialogue; sans le nommer il a tancé le LKP et son leader Domota (absent de la réunion) qui en Guadeloupe utilise le droit de grève comme un instrument de propagande. Aucune solution, dit-il, ne peut naître du désordre. Il demande aux Guadeloupéens de se parler entre eux. De sortir de leurs fantasmes de l'oppression coloniale, qui a existé, certes, mais c'est le passé. Il faut regarder devant, abandonner les préjugés. Construire l'avenir de la Guadeloupe. Il dit même la construction de cette "nouvelle France".

D'autant que la Guadeloupe a des atouts.

Oui un climat tropical et une biodiversité qui ne sont pas exploités... Du soleil qui pourrait assurer son indépendance énergétique, la mer. Pourquoi, s'interroge-t-il, importer 50% du poisson et 40% des fruits et légumes alors qu'il y a de l'eau et des terres. Le tourisme, et pas seulement balnéaire, le tourisme vert. Et il se réjouit, dans une île où la moitié de la population a moins de 30 ans, que le service militaire adapté permette à 86% des jeunes sans formation, de s'insérer.

C'est la première fois qu'un président leur a tenu ce langage

A ceux qui lui reprochaient la brièveté de son séjour, il a répondu efficacité. Serrer les mains n'est pas le plus difficile. Ce qu'on attend de moi ce sont des décisions, je vous demande de vous engager et début octobre, nous déciderons ensemble. Et bien sûr il n'a pu s'empêcher de tacler le discours exotique dégoulinant de bons sentiments de ses prédécesseurs.