Graphiste, les dessous du métier

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Victor Nicolas , modifié à

Comment illustrer la couverture d’un roman ? Les graphistes dévoilent les dessous de leur métier.

Un homme en costume vu de dos, et qui cache derrière lui un couteau de cuisine. C'est la couverture du livre Un père idéal, de Paul Cleave. Avec ce visuel le lecteur comprend tout de suite l'ironie du titre. Il rentre dans un univers à la  Dexter, du nom de ce personnage de série policier et tueur en série à la fois. Donner envie de rentrer dans un ouvrage grâce à l'illustration de la couverture, c'est le métier des graphistes. Rémi Pépin, qui a conçu cette couverture de l'homme au couteau, travaille pour différentes maisons dont Sonatine, 10/18, et Calmann-Lévy entre autres. Il raconte comment il aborde chaque projet : « L’éditeur m’envoie un résumé de l’ouvrage. Ensuite, je transforme des mots et une histoire en images. Ça peut être une moto ou une arme à feu, car je fais beaucoup de polars. Puis je commence la recherche iconographique, qui est le nerf de la guerre. »

Pop surréaliste

Pour trouver un visuel, il consulte des banques d’images en ligne ou des galeries, spécialement créées pour des graphistes professionnels. Par la suite il peut les retravailler, en modifiant la couleur ou la texture par exemple. Il obtient ainsi un visuel avec une ambiance qui lui convient. Julianna Barnault quant à elle travaille comme graphiste chez Actes Sud, principalement pour la collection Babel Noir. Pour illustrer les ouvrages, elle fait ses recherches « sur Internet, via des sites comme Flickr ou Tumblr, mais aussi dans des galeries d’art. »

Elle cherche avant tout à donner aux couvertures une identité visuelle. Cet ADN vient de la charte graphique, une bande noire sur fond rouge, mais aussi du style des visuels, façon « pop surréaliste ». Un enfant avec de grands yeux étranges, une forêt aux arbres sombres… Les plus célèbres des images de cette collection restent sûrement les couvertures de la trilogie Millenium, des œuvres de l’artiste américain John John Jesse pour les deux derniers tomes. C’est une collègue de Julianna Barnault qui a songé à cet artiste, dont le style correspond à celui de cette collection.

Cataclysme ou Invisible

Car un éditeur chercher le plus souvent à créer une identité graphique, de façon à ce que ses romans se repèrent facilement en librairie. C’est le cas pour Anne Defreville, directrice artistique des éditions Buchet-Chastel. Cet éditeur vient de publier 06h41, l’un des premiers ouvrages sélectionnés pour le Prix Relay Europe 1. Pour cette histoire de rencontre dans un train, elle a sélectionné une photographie de rails en noir et blanc. Elle l’a ensuite retravaillée pour lui donner une teinte pourpre. En général, l’éditeur peut donner son accord tout de suite ou après plusieurs choix de couverture. Il peut la faire valider par l’auteur ou non, en fonction des relations qu’ils entretiennent.

Enfin certains titres sont plus difficiles à réaliser que d’autres. « Dernièrement j’ai illustré la couverture d’un roman qui raconte un cataclysme, donc c’est très visuel, et j’ai eu tout de suite une bonne intuition », raconte Julianna Barnault. Mais quand aucun élément particulier ne ressort, le choix se fait moins évident. C’est le cas du roman L’invisible, qu’on devine par nature difficile à illustrer, pour lequel Rémi Pépin s’est finalement décidé pour… un puzzle.

Les salaires d’un graphiste dans l’édition atteignent généralement 2.200 euros bruts en début de carrière, et 3.000 euros bruts après une dizaine d’années d’expérience, selon des chiffres du Centre d’information et de documentation jeunesse (Cidj). Certains sont en poste fixe, et d’autres comme Rémi Pépin, sont freelance, et travaillent donc pour différents clients. Ils sont généralement attirés par le côté artistique de cette profession. Et cherchent à mettre des images sur les mots des auteurs.