Dans quel monde on vit ? Pierre-Marie Christin

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
Israël-Palestine : quand l'histoire se remet en route.

Ce matin, un vent de changement souffle sur le Proche-Orient. Le Premier ministre israélien donne son accord pour un état palestinien sous conditions. Une décision saluée par Washington mais rejetée par les pays arabes qui y voient un piège grossier. Alors le décryptage, l’analyse, dans quel monde on vit Pierre-Marie Christin ?

C’est vrai. Il y a eu de temps : la satisfaction américaine qui était mesurée mais qui a été immédiatement exprimée puis la réaction très négative et absolument unanime des pays arabes et des Palestiniens. "C’est un plan qui enterre la paix, qu’aucun pays arabe ne peut accepter" dit le président égyptien Moubarak qui est pourtant assez ouvert vis-à-vis d’Israël et très fermé vis-à-vis du Hamas. Un négociateur palestinien qui s’appelle Saeb Erekat disait hier : "C’est carrément une gifle à la figure de Barack Obama"...Lequel bizarrement pourtant dit "Non, ce discours, c’est un grand pas en avant".

Alors comment vous expliquez ces contradictions ?

Et bien parce qu’en fait, Netanyahu ne s’adressait pas aux Arabes mais aux Américains et aux Israéliens. Il fallait à la fois qu’il évite une crise avec Washington et une explosion de son gouvernement qui va du travailliste Barack à l’extrême droite de Lieberman. C’était un exercice d’équilibre, de grand écart...Et bien il a réussi. Obama tient le minimum vital, la fameuse formule de l’état palestinien qui a été prononcé. Même chose pour la gauche travailliste. La situation était tellement bloquée que même le ministre Herzog, considéré comme la plus grande colombe d’Israël, salue un processus qui va mener à l’état palestinien mais du côté de l’extrême droite et bien on est content aussi puisqu’on ne touche pas aux colonies. Un leader des colons, Wallerstein, ravi, salue le haut niveau de sionisme du Premier ministre. Tout ça est très politicien mais c’est très habile.

Tout le monde est content sauf les plus concernés, les Palestiniens et les Arabes…

Oui et ils ont de très très bonnes raisons d’être mécontents parce que le maintien des colonies rend absolument improbable un état palestinien. Gaza est toujours sous un blocus impitoyable. En exigeant la reconnaissance d’Israël comme état des Juifs, Netanyahu tend à nier l’histoire et la réalité palestinienne, et le million d’Arabes Israéliens qui vivent dans le pays. En fait, il tend une main mais qui ressemble plus à un poing fermé que les Arabes ne veulent pas, ne peuvent pas prendre aujourd’hui.

Donc en réalité, on n’a pas avancé ?

Ben quand même, un petit peu…Parce que c’est Barack Obama qui est au centre de tout ça. C’est lui qui va devoir parler aux Arabes en insistant non pas sur les conditions impossibles mais sur la négociation possible. Et puis il va bien sûr maintenir la pression sur Netanyahu en demandant peut-être quelques avancées par exemple sur Gaza. Ca va prendre beaucoup de temps mais ce qui se passe en Iran met encore plus d’incertitude dans tout cela. Ce qui est bien, ce qui est intéressant, ce qui est même passionnant, c’est que là-bas, l’histoire s’est remise en route.

Phrase du Jour :
"Qu’une guerre soit juste, nul ne saurait l’affirmer avant la paix. Ce sont les paix justes qui font les guerres justes." Bernanos