Dans quel monde on vit ? Pierre-Marie Christin

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
Vers la fin de l’Amérique blanche

En 2008, les Etats-Unis ont battu le record historique du nombre de naturalisation. Plus d’un million d’immigrants ont prêté serment à leur nouveau pays, principalement d’ailleurs des Sud-américains et des Asiatiques. Dans quel monde on vit Pierre-Marie Christin ?

Bonjour Marc-Olivier, bonjour à tous. Vous voyez Marc-Olivier que finalement les Américains ont tort de vouloir conquérir le monde parce-que c’est le monde qui vient à eux malgré la crise, malgré les guerres, malgré les années Bush – c’était encore 2008. C’était hier à la première page de Los Angeles Times, c’est très important pour eux, parce-que c’est la Californie qui bénéficie en premier de cette énergie nouvelle qui est sans doute l’un des secrets de cette Amérique qui se régénère tout le temps. Viennent ensuite le Texas et la Floride. Vous pouvez donc commencer à oublier cette Amérique européenne qu’on aime tant et qu’on croit connaître en courant à New York.

Qui sont ces nouveaux Américains Pierre-Marie ?

Ils sont…Ils étaient plutôt Mexicains, pour presque ¼, et puis Indiens, Philippins, Chinois, Cubains, Vietnamiens. Plus de 30% ont un diplôme supérieur, c’est pas seulement des terrassiers. Selon le dernier recensement qui date lui de 2006, 12.5% des Américains sont nés à l’étranger. C’est sans doute beaucoup plus aujourd’hui parce-que cette proportion n’a pas cessé d’augmenter depuis les années 80. En Californie, si la tendance actuelle est confirmée, les caucasiens - comme on dit là-bas pour dire les Blancs, et sachez que les Sud-américains pour les Américains, c’est pas des Blancs - seront minoritaires des 2026 et ça n’est qu’un début puisque 8 millions de Sud-américains remplissent aujourd’hui même les conditions pour être naturaliser et Barack Obama vient d’obtenir l’accord – et ça aussi c’est quasi historique – des grands syndicats pour légaliser des millions de clandestins qui dans quelques années pourront devenir citoyens.

Et on a une idée de cet accroissement historique Pierre-Marie ?

Il y a quelque chose de conjoncturel. Il y a une intense campagne des associations dans les écoles, dans les entreprises, à la télévision mais surtout, d’après plusieurs études sociologiques, il y a un changement de motivation. Il y a l’un de ces nouveaux citoyens américains qui s’appelle Yamas qui le dit dans Los Angeles Times : "J’ai compris que c’était comme ça qu’on pouvait changer quelque chose dans ce pays", et c’est ça qui est important parce-que traditionnellement devenir Américain c’est un acte personnel d’adhésion en bloc aux idéaux américains, ceux-là veulent changer l’Amérique, ils veulent plus d’état, ils veulent des investissements publics, des services publics, des assurances santé payées par les entreprises. Paradoxe, l’Amérique est de moins en moins européenne mais socialement de plus en plus. Vous avez remarqué que c’est quand même le programme d’Obama. Tous ces nouveaux citoyens ont voté massivement Obama. D’après un centre de recherches politiques, son élection était donc inscrite dans la démographie bien avant d’être inscrite dans l’Histoire.

La phrase du jour : Tocqueville "En politique, ce qu’il y a souvent de plus difficile, c’est de voir ce qu’il se passe sous nos yeux"…C’est valable ici d’ailleurs.