Chaque jour, Vincent Hervouet traite d’un sujet international.
J moins deux avant les élections législatives et présidentielles en Turquie. Et il y a un suspens.
Tous les scrutins en Turquie sont des référendums pour ou contre Erdogan. Des plébiscites. Le scrutin est anticipé, le résultat aussi.
Mais il y a un retournement de l’économie. Du coup, l’opposition rêve que Recep Tayip Erdogan trébuche, sur la toute dernière marche qui le hisse au trône du sultan.
Car s’il est réélu, il profitera de la nouvelle constitution qui donne tous les pouvoirs au Président.
Vous me direz qu’il les a déjà, avec l’état d’urgence.
Oui, mais il aura cinq ans devant lui et beaucoup d’eau aura coulé sous les ponts du Bosphore en 2023. Erdogan fait la course avec son voisin Vladimir Poutine à moins que ce soit avec l’autre, Bachar el Assad. Les trois hommes ont atteint le sommet à peu près en même temps et sont prêts à tout pour y rester.
L’opposition turque présente cette fois une alternative crédible.
Muharrem Ince est la révélation de la campagne. Une langue bien pendue, un batailleur qui sait parler au peuple, le faire rire, le faire rêver. Comme Erdogan ! S’il y a un second tour, Il rassemblera tous les opposants, notamment les Kurdes.
Car il y a aussi Selahattin Demirtas, le champion kurde, réapparu dimanche. Deux ans qu’il est aux oubliettes. En prison comme six députés de son parti, tous accusés de liens avec les terroristes du PKK. Il a enregistré en prison la vidéo de la campagne officielle. Il est allé au parloir comme d’autres vont en meeting. S’il obtient plus de dix pour cent des voix aux législatives, il privera de majorité absolue ce vieux renard d’Erdogan allié aux loups gris du parti nationaliste…
Dans cette vidéo, il dénonce le régime.
Il a dit "la partie effrayante du film est encore à venir".
On pense à Midnight Express qui racontait l’évasion d’un prisonnier.
Le film donne de la Turquie une image déplorable. C’était prémonitoire.
Recep Tayip Erdogan a jeté en prison 50 000 suspects. Dont une centaine de journalistes. Il a limogé 170.000 personnes. Tous accusés d’être des putschistes.
Il dénonce son ancien mentor, le prédicateur Gullen.
Dans le monde entier, les barbouzes turques traquent les gülenistes. Des milliers d’agents des services secrets quadrillent la communauté turque en Europe. Des tueurs traquent ceux du PKK.
Les Européens ferment les yeux.
Ils ont été aveugles ! Erdogan les fait maintenant chanter. Lui qui dénonce l’occident en est aussi le garde-frontières. Il a déjà touché trois milliards pour fermer les vannes de l’immigration. Et Bruxelles s’apprête à en verser trois autres.