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Tous les samedis et dimanches, Vanessa Zhâ et Marion Sauveur nous font découvrir quelques pépites du patrimoine français. Aujourd'hui, direction le Sud-ouest pour une balade au Pays Basque, au coeur de la vallée de la Nive. L'occasion de déguster un fromage qui fête ses 40 ans d'Appellation d'origine protégée : l'Ossau-Iraty.

En balade ce week-end au Pays Basque. Marion Sauveur, vous nous emmenez au coeur de cette région où l’on fête les 40 ans de l’Appellation d'origine protégée d’un fromage. 

Ce fromage, c’est l’Ossau-Iraty. Le fromage emblématique de la région : une tomme pressée, non cuite, au lait entier de brebis. Son goût s’affirme avec l’âge et lui donne un bon goût de noisette. On fabrique l’Osso-Iraty au Pays Basque mais aussi dans le Béarn. C’est d’ailleurs le seul fromage au lait entier de brebis en AOP au Béarn et Pays Basque. 

L’Ossau-Iraty basque et l’Ossau-Iraty béarnais sont les mêmes ? 

Non, ce sont deux fromages différents. Au Pays Basque, les affineurs bichonnent l’Ossau-Iraty dans des caves sèches avec des brosses sèches. Tandis que dans le Béarn, les fromages patientent dans des caves humides et on les frotte avec un torchon humidifié à l’eau salée. Tout ce travail permet au fromage basque d’être plus sec en bouche, parfumé, aromatique, et au béarnais d’avoir une croûte humide, une pâte onctueuse et fondante. Ils n’ont pas la même taille non plus : le basque est plus petit (2-3 kg) que le béarnais (4 kg). 

L’Ossau-Iraty se fabrique depuis toujours ou presque. On a retrouvé des écrits datant du Ier siècle, expliquant que les fromages de brebis de la région étaient vendus sur les marchés toulousains. Les bergers auraient commencé à fabriquer l’Osso-Iraty à même leurs chalets de montagne, les "Cujalas" ou les "Cayolars", il y a plus de 2.000 ans !  

C’est un fromage qui est surtout fabriqué l’hiver, comme me l’a expliqué Beñat Saint Esteben, producteur de lait à Macaye, au coeur du Pays Basque. “La saisonnalité, elle s’explique surtout parce que la brebis est un animal rustique qui permet d’entretenir les coins accidentés. Elles préparent leurs petits agneaux pour la prochaine saison de juin à septembre. Les brebis sont en général en montagne. Donc pendant cette période là, le fromage Ossau-Iraty s’affine. Il peut aller jusqu’à 10 mois à 1 an d’affinage. Et à partir d’octobre, les brebis descendent dans les vallées. Elles vont donner du lait à partir du moment où elles font l’agneau. Elles vont d’abord allaiter leur agneau pour ensuite produire du lait, au plus tard début janvier. Jusqu’à juillet, on a du fromage qui est transformé”. 

Certains bergers réalisent un fromage en été. Les brebis sont nourries à l’herbe et donnent au lait un bon goût floral et un fromage au goût plus herbacé. Ce fromage d’estive, comme on l’appelle, peut se déguster à partir du mois de novembre. C’est un fromage d’exception que les Basque et Béarnais adorent avoir à leur table à Noël, accompagné d’une confiture de cerises noires et d’un verre de Jurançon. 

Des adresses ?  

L’Ossau Iraty se déguste sur le plateau de fromage, avec une confiture de cerise noire basque : la cerise d'Itxassou. Mais il se cuisine aussi. 

  • A Larrau, Pierre Etchemaïté propose une tartiflette : des oignons et des lardons revenus avec des pommes de terre et l’Ossau-Iraty. Il la sert dans des pommes de terre en robe des champs passées au four, en accompagnement d’un bel agneau de lait. 
  • A Barcus, dans la maison de famille Chilo, Pierre Chilo réalise en ce moment une gaufre de mais avec un crémeux à l'Ossau-Iraty et des anchois marinés ainsi que des cannelloni de boeuf servis avec un crémeux de brebis. 

Enfin, il existe une route du fromage, 200 km de parcours pour découvrir les fermes où est récolté le lait, les fromageries où se fabrique l'Osso-Iraty, et les caves d'affinage. A Espelette, vous pourrez découvrir le centre d'interprétation, qui est la maison de l'AOP Ossau-Iraty. Vous aurez même la chance de pouvoir en déguster. 

Vanessa, on part sillonner cette route du fromage qui n’est pas que gastronomique.

Non, il y a de belles pépites du patrimoine à découvrir, surtout dans la vallée de la Nive, entre Saint-Jean-Pied-de-Port et Saint-Jean-de-Luz, où la plupart des villages basques sont classés "Plus beaux villages de France". Vous avez Ascain juste au pied de la Rhune, Sare que Pierre Loti appelle Etchezar dans Ramuntcho, Ainoha, Espelette que vous connaissez pour ses piments rouges qui sèchent justement en ce moment. Sur place allez faire un tour chez Mon Pimentier. Il organise une dégustation sensorielle dans le noir. Vous en sortez pimenté mais aussi calé de A à Z sur le piment d’Espelette, qui n’est pas du tout originaire du Pays Basque. Il a été importé des Amériques par Christophe Colomb.

Cette vallée de la Nive, ça doit être une enclave très verte, apaisante.

C’est justement ce calme qui attire Edmond Rostand après le succès de Cyrano de Bergerac. Au moins les Basques ne le harcelaient pas pour un autographe, contrairement aux parisiens. C’est pour ça qu’il choisit d’y construire la villa de ses rêves, la villa Arnaga, à Cambo-les-Bains. C'est une immense ferme basque, mais avec une décoration hyper luxueuse, bourrée de curiosités comme cette horloge que nous fait découvrir la conservatrice Beatrice Labat. "C'est une horloge qui nous est expliquée par son fils, Jean Rostand. Elle possède un cadran un peu particulier, puisqu'elle porte quatorze heures au lieu de douze. C'était une façon élégante d'évincer les importuns qui voulaient se faire inviter à déjeuner le midi. Il leur expliquait : 'Non, il est quatorze heures !'". Elégant et surtout malin.

Si on pousse vers Saint-Jean-Pied-de-Port, vous nous proposez quoi ? 

Je vous propose de faire le tronçon du GR10, qui vous emmène au pic d’Iparla. C’est une des plus belles randonnées du Pays Basque : vous passez le long de bergeries en ruines, les vautours tournoient au-dessus de vous, il y a des spots assez vertigineux. En tout cas si vous n’êtes pas motivé par la randonnée, il faut au moins aller à Bidarray, rien que pour vous installer sur la Place du fronton et admirer la vue sur les crêtes d’Iparla.

Une adresse pour dormir ?

Une valeur sure : L’Hôtel Bonnet, 80 euros la nuit à Saint-Pée-sur-Nivelle, entre Cambo-les-Bains et Saint-Jean-de-Luz. Ou Joangi, une ancienne ferme du 17e siècle, décorée de manière contemporaine, à cinq minutes de Saint-Jean-Pied-de-Port.