La "nuit de l'élevage en détresse" des agriculteurs

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Gabriel Vedrenne avec AFP , modifié à
AGRICULTURE - Plusieurs milliers d'agriculteurs, éleveurs et producteurs de lait, ont manifesté dans la nuit de jeudi à vendredi dans toute la France, principalement dans l'Ouest, pour dire leur "ras-le-bol" face à l'absence de remontée des prix de leur production.

Les réunions, consultations et autres tables rondes n'y font rien : les agriculteurs, et plus particulièrement les éleveurs, estiment que les prix agricoles ne remontent pas assez pour qu'ils puissent gagner correctement leur vie. Pour mieux se faire entendre, une "nuit de l'élevage en détresse" a donc été organisée entre jeudi et vendredi, à l'appel de la FNSEA et des Jeunes Agriculteurs (JA). Au menu : barrages routiers, opérations escargots, ballots de paille et pneus incendiés.

Des milliers d'agriculteurs ont convergé vers les préfectures par convois de plusieurs dizaines de tracteurs avec remorques chargées de paille, fumier, pneus, etc. Opérations escargot entraînant des ralentissements, tags de magasins de grande distribution - "on ne rigole plus", "voleur", "mangeons français"-. Les éleveurs de porcs et de bovins, mais aussi les producteurs de lait, entendaient protester contre la non application, selon eux, de l'accord conclu sous l'égide du ministère de l'Agriculture, il y a quinze jours, censé faire remonter les prix.

03.07.Agriculture.eleveur.laitier.DAMIEN MEYER  AFP.1280.640

Les raisons de la colère. Les éleveurs estiment que les trop faibles prix de la viande, de porc comme de boeuf, ne leur permettent pas de couvrir leurs coûts de production. Le revenu des producteurs de viande bovine a ainsi chuté à environ 12.000 euros par an, selon la FNSEA. "Comment ne pas se sentir trahis alors que tous les opérateurs et les distributeurs, en présence du ministre, ont juré, la main sur le coeur, que les producteurs seraient mieux payés demain", a commenté jeudi Jean-Paul Goutines, président de la FDSEA Pays de la Loire.

"Leclerc est l'un des plus gros bandits" de la grande distribution, a accusé Alain Bernier, président de la FDSEA 44. "Il faut, a-t-il ajouté, que les gens comprennent que se nourrir a un prix. Ca se joue parfois à des centimes". En Loire-Atlantique, à Saint-Etienne-de-Montluc, les agriculteurs ont visé la SCA Ouest, plus grande centrale d'achat de l'enseigne Leclerc du grand Ouest. Là, avec une vingtaine de tracteurs, 200 à 300 agriculteurs ont déversé du fumier et du lisier.

Le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll a demandé mercredi au médiateur des relations commerciales agricoles de contrôler ces accords, pour voir si les différentes parties ont tenu leurs engagements d'augmenter les prix payés aux éleveurs, notamment les industriels et la distribution.

Le principal syndicat chahuté. Mais cette soirée n'a pas été de toute quiétude pour le président de la FNSEA Xavier Beulin, pourtant coorganisateur de cette "nuit de l'élevage en détresse". A Saint-Brieuc, dans les Côtes d'Armor, ce dernier a en effet été chahuté par les éleveurs excédés et désespérés. "Êtes vous prêts à vous battre pour mettre sous surveillance pendant l'été les opérateurs, obtenir cinq centimes de plus pour la viande bovine, une revalorisation des prix du porc et du lait", a-t-il demandé aux manifestants. "Dès ce soir, on est en capacité de rappeler à l'ordre les opérateurs", a-t-il poursuivi en proposant de faire du mois de septembre, si le bilan n'est pas positif, "un mois de protestation comme on n'en a pas connu depuis longtemps en France".