Réforme du Droit du travail : ce qui s'est fait ailleurs en Europe

La France doit-elle s'inspirer du "Plan Agenda" en vigueur en Allemagne depuis 2005 ?
La France doit-elle s'inspirer du "Plan Agenda" en vigueur en Allemagne depuis 2005 ? © ALAIN JOCARD / AFP
  • Copié
M.L avec AFP , modifié à
Nombre de nos voisins européens ont réformé leur droit du travail au cours des dernières années. Tour d’horizon des différents modèles.

François Hollande l’a assuré mercredi : la France ne “copie pas les autres pays européens” avec la loi Travail, mais tente de “préserver son modèle social tout en l’adaptant”. Dans les faits, la plupart des pays européens ont connu d’importantes réformes en la matière ces dernières années. Tour d'horizon. 

  • En Allemagne, des “mini-jobs” à 400 euros par mois

L’exemple allemand est souvent cité comme un modèle à suivre. Le 23 février, Manuel Valls se félicitait même que la ministre du travail allemande ait “salué” et qualifié de “texte très équilibré” le projet de loi El Khomri.

En Allemagne, le plan Agenda 2010, introduit en 2005 par le gouvernement social-démocrate de Gerhard Schröder, a rendu le marché du travail plus flexible. Pour faciliter les embauches, il a notamment créé des "mini-jobs”, à 400 euros par mois, exonérés de charges.

Le plan a également remis à plat le système des aides sociales, avec l’introduction d’une allocation (Hartz IV) calculée au plus juste, vers laquelle bascule tout chômeur au-delà d'un an de non-activité.

Si le bilan est plutôt positif du point de vue du taux de chômage (4,5% en Allemagne, contre 10,5% en France), le SPD, parti de Gerhard Schröder, ne s'est toujours pas remis de cette réforme, considérée par beaucoup comme une trahison de l'héritage social-démocrate.

  • En Italie et en Espagne, un licenciement facilité

Simplifier le licenciement, mais uniquement pendant les premières années d’un contrat, c’est la stratégie adoptée par les gouvernements espagnol et italien dans les années 2010. Dans son “Jobs Act”, la gauche du premier ministre italien Matteo Renzi a créé un nouveau contrat à durée indeterminée “aux garanties croissantes” : un licenciement facilité pendant 3 ans, puis rendu de plus en plus complexe.

En Espagne, le gouvernement sortant de Mariano Rajoy, à droite, a également créé un nouveau contrat à durée indeterminée dans un contexte de crise, en 2012. Ce dernier permet le libre licenciement sans justification pendant un an. En parallèle, les indemnités de licenciement ont été réduites.

S’il est un peu tôt pour dresser un bilan du “Jobs Act”,  l’Italie a renoué avec la croissance en 2015 (0,8%) après trois années de récession, et le chômage est passé de 12,4% à 11,4% en dix mois. En Espagne, le taux de chômage a légèrement baissé, passant de 22,5% en 2012 à 20,8% aujourd’hui.

  • En Grèce et au Portugal, des réformes faites sous la pression

En 2012, dans le cadre d’un deuxième plan de sauvetage financier UE-FMI, la Grèce a procédé à une série de réformes : baisse du salaire minimum (de 751 à 580 euros), affaiblissement des conventions collectives, salaire minimum au rabais pour les moins de 24 ans… Le dernier plan conclu en juillet 2015 entre Athènes et la zone euro prévoit, en outre, une remise à plat du droit du travail.

Au Portugal, le précédent gouvernement de droite a profondément remanié le code du travail, également après négociation avec l’UE et le FMI, en mai 2012. Les horaires de travail et les critères de licenciement ont été assouplis, et le plafond des indemnités abaissé.

Le chômage a continué d’augmenter jusqu’en janvier 2013 au Portugal  (17,8%). Il a aujourd’hui baissé à 13%. Même constat en Grèce, où le taux de chômage a atteint un pic en juillet 2013 (27,9%), avant de redescendre légèrement (24,5% actuellement).  

  • Des réformes moins radicales au Nord 

Au Danemark, en 2010, une réforme a réduit de moitié la durée maximale des allocations-chômage. Elles restent néanmoins parmi les plus généreuses au monde, selon le modèle de la “flexisécurité”, mis en place dans les années 1990, qui combine un haut niveau d’indemnisation (environ 90% du salaire) et une faible protection de l’emploi. Le taux de chômage y est de 6%.

En Finlande, où le chômage touche 9,5% de la population, le gouvernement mène depuis dix mois des discussions tendues pour créer un “pacte social”, qui impliquerait une réduction des salaires et une augmentation de la part des cotisations salariales. La réforme se fait dans la longue tradition de négociations tripartites (exécutif, patronat et syndicats).

En Suède, en 2006, la droite au pouvoir a augmenté les cotisations et réduit les allocations à 65% du salaire au-delà de 300 jours de chômage. Revenue aux affaires en 2014, la gauche a réaugmenté le niveau des indemnités. Le chômage y est de 7,1%.

 

 

Le cas particulier des “contrats zéro heure” britanniques. David Cameron ne les a pas créés. Mais depuis son arrivée au 10, Downing Street en 2010, le recours aux “contrats zéro heure”, qui ne spécifient aucun temps de travail et ne garantissent pas de revenu fixe, a explosé.

Ce dispositif est très critiqué par les travaillistes qui voient dans ce système une manière de faire baisser le taux de chômage (5,1% aujourd’hui). A noter également qu’un salarié lié par ce type de contrat ne peut aller travailler dans une autre entreprise.