Perrine Hervé-Gruyer 1280 Hugo Mathy
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Anaïs Huet , modifié à
Perrine Hervé-Gruyer et son mari sont permaculteurs en Haute-Normandie. Leur credo : respecter et imiter au maximum les mécanismes de la nature pour produire une nourriture saine et en quantité.
INTERVIEW

Ceux qui ont vu le documentaire Demain de Cyril Dion, sorti en décembre 2015, ont peut-être reconnu Perrine Hervé-Gruyer, vendredi chez Matthieu Belliard sur Europe 1. Avec son mari Charles, cette Normande a remis au goût du jour la permaculture en France, il y a dix ans. 

La permaculture, c'est quoi ? Il convient d'abord d'expliquer ce qu'est au juste la permaculture. Inventée dans les années 1970 en Australie, cette méthode de culture s'inspire de l'écologie naturelle pour produire fruits et légumes, en respectant évidemment l'environnement, mais aussi l'harmonie des animaux, insectes et micro-organismes qui y vivent. Perrine et Charles Hervé-Gruyer, agriculteurs bio depuis 2006, découvre cette philosophie en 2008. "Elle est venue donner du sens à nos pratiques agricoles", explique la permacultrice dans le studio d'Europe 1, délocalisé au salon de l'Agriculture.

 

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"On a le label bio, mais on est beaucoup plus que bio. En réalité, on produit nos légumes comme la nature produirait n'importe quelle plante. On va vraiment imiter les principes et les règles de fonctionnement de l'écosystème qui nous entoure, pour avoir une productivité digne de ce nom. C'est du bio-mimétisme", précise Perrine Hervé-Gruyer. "Notre credo était que l'on pouvait produire de façon systémique, être économiquement viable, tout en étant vertueux écologiquement."

Sans tracteur et sans pétrole. Pour cultiver ses fruits et légumes, le couple Hervé-Gruyer a choisi de se passer des tracteurs et autres engins mécaniques. Dans leur ferme située dans la vallée du Bec Hellouin, en Haute-Normandie, tout se fait à la main. Là encore, le choix se veut réfléchi, raisonné et prudent. "Tout le monde nous dit que le pétrole sera demain non seulement rare, mais aussi inabordable. Quand on voit les charges d'exploitation d'une entreprise agricole aujourd'hui, la note 'pétrole' (logistique, produits phytosanitaires, tracteurs, machines…) est énorme", souligne la permacultrice. 

Ce que l'on peut voir comme des contraintes ne sont en fait que des avantages pour Charles et Perrine. "On a réussi à prouver que sur une toute petite surface de 1.000 m², on arrivait à générer un revenu décent pour un agriculteur qui s'installait. Aujourd'hui, c'est aberrant, car on cultive des hectares et des hectares et les agriculteurs ne s'en sortent pas", observe-t-elle. 

Des territoires qui renaissent. Et dix ans après le début de l'aventure, force est de constater que le couple a remporté son pari haut la main. "Mon mari gagne 2.500 euros sur l'exploitation, après avoir payé les salariés, les charges, etc. Donc ce n'est pas inintéressant. On arrive non seulement à vivre décemment, mais aussi à créer une dynamique économique sur le territoire, à créer de l'emploi, des échanges avec les autres entités locales…", se réjouit Perrine Hervé-Gruyer. En observant le chemin parcouru en une décennie, cette pionnière de la permaculture croit plus que jamais en l'avenir de sa méthode : "Ces territoires ruraux qui sont en train de se paupériser et de s'isoler, on arrive à les faire renaître avec de petites entités humaines comme celle-là."