Logement : plus d'expulsions à l'approche de la trêve hivernale ?

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Noémi Marois avec AFP

Alors que dimanche entre en vigueur la trêve hivernale, les expulsions se multiplient de manière illégale selon des associations.

Six "opérations d'intérêt national" dans le Grand Paris pour relancer la construction de logements en Ile-de-France, la reprise en main par les préfets du logement social dans 36 communes récalcitrantes.... voici pour les annonces du gouvernement pour lutter contre le mal logement en France. Mais dans la réalité, à en croire plusieurs associations, les expulsions s'accélèrent avant que la trêve hivernale ne commence dimanche. Problème, elles se feraient de manière illégale car sans solution de relogement.

Droit au logement opposable. C'est le Réseau Stop aux expulsions locatives (Resel) qui l'assure : des familles sont menacées d'expulsion ou expulsées sans relogement, alors qu'elles sont protégées par le droit au logement opposable. Le Dalo permet en effet aux personnes en attente d'un logement social et menacées d'expulsion de saisir l'Etat.

Selon l'association, entre 80 et 85% des expulsions du secteur privé sont ainsi rendues illégales. De plus, elles ont tendance à se multiplier à quelques jours du début de la trêve hivernale. Du 1er novembre au 30 mars, les locataires, qui ne payent plus leur loyer, ne pourront plus être expulsés.

Plus d'expulsions en 2015 ? La Fondation Abbé Pierre, elle, dénonce mercredi dans un communiqué, la hausse des décisions de justice d'expulsions locatives de 4,8% en 2015. Un nombre auquel il faut ajouter celui "des ménages qui quittent leur logement du fait de la procédure, ainsi que les expulsions et évacuations de squats, de bidonvilles". La Fondation regrette que "les lois Alur et Dalo tardent à s'appliquer".

En attente d'un logement social. Lundi, le Resel s'est rassemblé à Paris pour dénoncer ces expulsions qui violent la loi Alur, selon lui. Et il a brandi des cas emblématiques de son combat. Dans le 10e arrondissement de la capitale, une mère et ses trois enfants ont été sommés de remettre la clé de leur logement au commissariat. A défaut, ils risquent d'être expulsés d'ici le 31 octobre, a expliqué Benoît Filippi, de Resel. Pourtant, endettée après une séparation, la mère a été reconnue prioritaire Dalo. Cela veut dire que l'Etat doit lui trouver un logement social et qu'il ne peut, selon une circulaire de 2012, l'expulser sans lui avoir trouvé un logement.

Spéculations. Début octobre, une autre famille a été expulsée, après que son appartement a été "acheté occupé" par une nouvelle propriétaire qui lui a ensuite donné congé, a précisé Benoît Filippi. Le Recel voit dans ces transactions un "caractère spéculatif". Les propriétaires achètent en effet "moins cher parce qu'occupé" (le tiers du prix du marché) et revendent ensuite vide donc plus cher.

"Nous sommes confrontés à une multiplication des expulsions locatives à Paris de ménages de bonne foi, dont des Dalo reconnus", a dénoncé Ian Brossat, jugeant "aberrant que l'Etat reconnaisse le Dalo d'une famille et puisse ensuite expulser cette même famille".

Se faire expulser pendant la trêve hivernale, c'est possible. Les expulsions de logement pour impayés sont suspendues l'hiver mais il existe trois exceptions. Le propriétaire peut en effet récupérer son bien s'il est prévu une solution de relogement aux expulsés. L'expulsion peut aussi avoir lieu si un arrêt de péril est pris contre le logement. Enfin, dans le cas de personnes entrées par voie de fait, des squatteurs par exemple, le juge peut décider de passer outre la trêve.