"Optimisation" fiscale : Bercy met fin à l’ambiguïté

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RECADRAGE - Le ministère des Finances a publié mercredi une liste des montages fiscaux qu’il juge abusif.

Devenue l’un des sports préférés des grandes entreprises et des foyers fortunés, l’optimisation fiscale ressemble, à bien des égards, au hors-jeu dans le football : les cabinets fiscaux s’évertuent à mettre en place des montages fiscaux aux limites de la légalité pour prendre un temps d’avance et permettre à leurs clients de payer le moins d’impôts. Mais dans un contexte de lutte contre les déficits et de généralisation de ces pratiques fiscales, l’Etat a décidé de hausser le ton. Le ministère des Finances a donc publié mercredi une liste des montages fiscaux qu’il juge abusifs, une manière de clarifier les règles du jeu et d’empêcher les entreprises d’expliquer qu’elles ne savaient pas être en tort.

La "transparence" face à l’ambiguïté. Confronté à un nombre grandissant de montages fiscaux complexes, le ministère des Finances passe de plus en plus de temps à les décortiquer pour déterminer s’ils sont légaux ou abusifs. Et pour cause : l’innovation fiscale va bien plus vite que le législateur.

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© ERIC PIERMONT/AFP

Pour rattraper ce retard, le ministre des Finances et le secrétaire d’Etat au Budget ont décidé mercredi de lancer une opération "transparence" : détailler les montages qu’ils jugent abusifs pour mettre fin à l’ambiguïté dont profitent les contribuables indélicats. "Ces exemples doivent permettre aux entreprises ou aux particuliers de connaître à l’avance les risques auxquels ils s’exposent en cas de recours à ces schémas (fiscaux, ndlr) et, s’ils sont mis en œuvre, les inciter à y mettre fin", a précisé Bercy.

Ces schémas fiscaux que la France prohibe. Le ministère de Finances a donc ouvert une nouvelle rubrique sur son site internet pour répertorier les "montages destinés à réduire indûment l’impôt". Ces pratiques abusives sont actuellement au nombre de 17 mais Bercy a prévenu que sa liste pourrait évoluer, puisque l’optimisation fiscale consiste justement à trouver continuellement de nouvelles failles juridiques.

Parmi les pratiques prohibées, Bercy pointe notamment la "délocalisation de profits dans un pays où ils sont soumis à une fiscalité plus favorable dans le cadre d’une restructuration". Une pratique plus connue sous le nom de "prix de transfert" et qui consiste à minorer les bénéfices réalisés en France et à gonfler artificiellement ceux réalisés dans un pays à la fiscalité plus clémente par la maison-mère ou une autre filiale du groupe. Mc Donald’s est l’une des dernières entreprises pointées du doigt : le groupe de restauration est soupçonné d’avoir rendu ses restaurants français presque déficitaires en leur faisant payer des royalties – le droit d’utiliser la marque – plus élevées que la moyenne et qui sont ensuite transférées dans une filiale au Luxembourg. Résultat, des bénéfices - et donc un impôt - très faibles en France, où travaillent 69.000 salariés, tandis que la filiale au Luxembourg engrange des profits, alors même que l’entreprise n’y compte que 13 salariés.

Voici la liste des pratiques jugées illicites :

- Management package
- Déduction de dividendes du résultat
- Délocalisation de profits suite à restructuration
- Versement non justifié de commissions
- Minoration fictive de la base de calcul de l'ISF
- Perception non déclarée de salaires
- Détournement de commissions au profit d'un dirigeant
- Délocalisation déguisée de personnel
- Abus de convention fiscale
- Non application de retenue à la source sur dividendes
- Double déduction d'intérêts d'emprunt
- Contournement des règles territorialité des droits de mutation à titre gratuit
- Non application de la TVA à des prestations de services dissimulées
- Utilisation abusive d'un PEA
- Utilisation abusive d'un PEA par interposition d'une société
- Non application de la TVA sur des ventes sur internet
- Non prise en compte de revenus dans le dispositif de plafonnement ISF

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