Le Grenier

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Si le grenier constitue originellement le lieu de stockage des céréales, il est rapidement devenu synonyme univoque de « combles ».

Si le grenier constitue originellement le lieu de stockage des céréales, il est rapidement devenu synonyme univoque de « combles ».

 

 

D’extensions sémantiques en abus de langage, nous sommes pourtant parvenus à une sorte d’accord linguistique qui estime qu’un grenier, au sommet de la maison, ne sert à rien si ce n’est de débarras ; alors que les combles fournissent uniquement une isolation naturelle sauf si l’on précise qu’elles peuvent être aménagées en pièce habitable. Hélas, les choses ne sont pas si limpides et méritent qu’on s’y attarde quelques instants.

 

Etymologiquement, « grenier » provient de « guernier » en vieux français, lui même issu du latin granaria, dont le sens est irréfragable : local d’entreposage du grain. Il est d’ailleurs attesté dès le XIIIe siècle pour décrire différents types d’entrepôts agricoles. Mais nous nous intéressons ici à la partie supérieure de l’habitation que les Anglais appellent parfois, non sans une certaine poésie, « sky parlour », sorte d’espace en prise directe avec les cieux.

 

 

 

 

 

Un abri inhospitalier.

 

Comme nous avons eu l’occasion de le voir dans un précédent dossier à propos du parquet, les planchers sont rapidement apparus dans les fermes pour isoler la partie habitable de la maison de la réserve à foin (fenil), à paille (pailler) ou à grain (grenier). Il fallait bien mettre à l’abri ses maigres récoltes, les conserver à portée de main d’une part et en favoriser la surveillance d’autre part. Evidemment, l’exode rural massif des XIXe et surtout XXe siècles a rendu inutiles ces lieux de stockage qui se muèrent, au fil du temps, en débarras.

 

De toute façon, dans les maisons, on disposait de suffisamment de place pour loger tout son monde et on ne voyait guère l’intérêt d’aménager de quelque façon que ce fût cet espace inhospitalier. D’autant que les techniques et matériaux de l’époque n’en facilitaient guère l’isolation et la domestication (au sens propre du terme).

 

 

 

 

 

Quand le grenier se décline…

 

Pour être tout à fait précis, sachez que si ce réservoir à céréales se situait habituellement au-dessus de la maison d’habitation, il pouvait également constituer un bâtiment par lui-même, tel le « regard » savoyard qui permettait à plusieurs paysans de réunir en un même lieu de stockage leurs moissons. Il existait également, dans les bourgs, et ce depuis l’antiquité romaine, des greniers publics à l’usage de tous les villageois, notamment pour y stocker d’une année sur l’autre le surplus des moissons (si, si, ça arrivait !). Et, faute de place dans cette modeste rubrique, je n’évoquerai pas ici les greniers à sel de sinistre mémoire puisqu’ils servaient à la perception de l’impôt le plus détesté de l’histoire de France, la gabelle. …

 

 

 

 

...et s’interprète.

 

Le dernier étage d’un bâtiment a toujours titillé les architectes qui ont rivalisé d’audaces et de techniques pour accommoder cet espace indispensable entre toit et logement. Ainsi, parlerons-nous d’attique, de mansarde, de soupente, je vous en passe et des plus techniques. Pour l’anecdote, il est amusant de constater que nos amis anglophones traduisent « grenier » par « attic », un mot lui-même issu du français « attique », qui désigne la partie supérieure d’une construction, dissimulant peu ou prou le toit.

 

La mansarde constitue, d’une certaine manière, un grenier (au sens moderne du terme) ou, si vous préférez, des combles. Ce qui la distingue, c’est que chaque versant du toit est brisé en deux parties (ce qui fait quatre pans pour un toit complet). Evidemment, vous avez déjà compris que ce vocable prenait sa racine dans le patronyme de l’architecte, sinon l’inventeur du moins le promoteur de cette technique, François Mansart.

 

 

 

 

 

Le comble du grenier

 

Etymologiquement, le terme « comble » vient de la locution adverbiale a cumble qui indique le dépassement des bords d’une mesure (la goutte qui fait déborder le vase…) ; ce qui, en langage courant, se muera rapidement en plus haut degré d’un bâtiment certes, mais aussi, de façon plus imagée, l’apogée d’un sentiment ou d’une qualité : le comble du bonheur, la mesure est à son comble, etc. De la même façon, chacun connaît l’expression « de fond en comble » qui, à l’origine, signifie « de la cave au grenier ».

 

Pour tout dire, les combles servent de support au toit. En fait, et vous aurez tout compris en une phrase, le grenier se situe dans les combles ; ces derniers pouvant se montrer aménageables en habitation ou servir de débarras, voire de simples réceptacles à isolation quand la hauteur n’autorise qu’une circulation à genoux ou à plat-ventre !

 

 

 

 

 

Janvier et février comblent ou vident le grenier (adage paysan).

 

Il n’y a donc aucun abus de langage à employer l’un ou l’autre vocables, bien que le XXIe siècle ait entériné sinon des définitions strictes, au moins des acceptions populaires. Si vous précisez qu’une maison dispose d’un grenier, on comprend qu’il y a, au moins au faîte du toit, une hauteur suffisante pour autoriser une station debout. Quand on parle de combles, il s’agit plutôt d’un espace à la verticale réduite autorisant uniquement une isolation, voire d’un vide-sanitaire, sauf s’ils sont réputés « aménageables ».

 

Cela exprimé, la discussion reste ouverte…