La chambre est-elle forcément destinée au coucher ?

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A l’évocation du mot chambre, vous imaginez probablement ce petit nid douillet agrémenté d’un lit voluptueux, et d’une décoration cosy. Non sans raison, certes, mais ce serait négliger que le vocable désignait, à l’origine, n’importe quelle pièce d’habitation, sans attribut particulier.

A l’évocation du mot chambre, vous imaginez probablement ce petit nid douillet agrémenté d’un lit voluptueux, et d’une décoration cosy. Non sans raison, certes, mais ce serait négliger que le vocable désignait, à l’origine, n’importe quelle pièce d’habitation, sans attribut particulier.

 

 

D’où la précision qu’apportaient nos anciens en indiquant chambre à coucher pour signifier la pièce dans laquelle on dort habituellement et qu’on préserve pour une intimité plus ou moins luxurieuse.

 

Un mot directement emprunté au bas latin camera, de même sens, lui-même issu du latin classique qui décrivait un toit ou un plafond voûtés, auquel l’usage populaire a ajouté un « b » (de la même façon que numerus a donné nombre) et que des accents régionaux ont prononcé ch.

 

 

 

Travailler en chambre.

 

Mais n’allons pas trop vite en besogne car si, effectivement, le dictionnaire de l’Académie française, en 1762, indique que le terme s’applique à la plupart des pièces d’une maison. Littré, pour sa part, un siècle plus tard, précise qu’elle est principalement affectée à l’usage particulier d’une personne. Et dont le contexte permet de préciser à quoi elle sert : chambre de travail, de réception, d’aisance…

 

 

 

La noblesse de chambre.

 

Ainsi, chez les riches, il s’agissait plutôt d’un espace situé à l’écart, souvent précédé d’une antichambre, sorte d’arrière-salle de la pièce commune. Dans ces chambres, on tenait conseil, la famille se réunissait pour parler de choses graves. Mais, pour dormir, on s’isolait à l’aide de tentures, de tapisseries, usant d’alcôves le cas échéant.

 

Un espace qui deviendra privé au XVIe siècle avant de bénéficier d’une porte près d’un siècle plus tard quand la notion de chambre à coucher privative se fera jour.

 

A l’inverse, ce n’est pas parce qu’un lit trônait dans une pièce que cela en faisait une chambre à coucher car ce lit pouvait être d’apparat, ce qu’on peut découvrir encore aujourd’hui dans de nombreux châteaux.

 

 

 

Garder la chambre.

 

Diderot magnifie la chambre à coucher qu’il décrit comme une pièce considérable dans un grand bâtiment, destinée au maître ou à la maîtresse du logis, avec estrades, colonnes, cheminée… Viollet le Duc n’est pas en reste puisqu’il parle d’un endroit retiré, à l’intérieur d’un palais !, et destinée à recevoir un lit.

 

Pourtant, jusqu’au siècle des Lumières, chez les nobles et les bourgeois, on n’a qu’une chambre (pour les époux) qu’on cède le cas échéant à un parent ou à un étranger auquel on veut faire honneur. Même s’il arrivait souvent qu’on partageât la même chambre en ajoutant un lit, voire la même couche.

 

 

 

La chambre secrète de Vénus.

 

On voit que tout cela ne laissait guère de place aux communs des mortels qui lui, le plus souvent, vivait dans une unique pièce qui remplissait tous les usages et qui, le soir, se transformait en dortoir familial. Il faudra attendre le XIXe siècle pour que l’Eglise incite fortement les bons Chrétiens à prévoir une chambre conjugale isolée pour des raisons éminemment morales. Les lits clos n’ont alors plus de raison d’être et ils disparurent peu à peu, tout comme les tentures de séparation. Les bourgeois s’aménagèrent une chambre à coucher et firent de même pour leurs enfants. Bientôt imités par la populace avant que le phénomène ne se répande à la campagne. Où il faudra attendre l’entre-deux guerre pour que le lit ne soit plus installé dans la pièce principale de la maison.

 

 

 

 

La chambre du roi.

 

Comme le démontre Georges Duby, on remarquera que le politique est pensé comme une maisonnée, expliquant alors que le vocabulaire de la pratique du pouvoir appartienne au champ lexical domestique. Ainsi salle du trône, hôtel de ville, lit de justice, sans oser évoquer la notion contemporaine de la cuisine politicienne, et bien sûr chambre.

 

Ce dernier vocable décrivant alors un espace clos aux dimensions réduites, où se tient une assemblée. A l’image de la chambre des comptes ou de la chambre du roi où ce dernier tenait lit de justice, de la chambre parlementaire chère à nos députés et sénateurs, ou bien encore de la chambre ardente de notre bon roi François Ier. Sans compter ses innombrables acceptions techniques au nombre desquelles on peut citer la chambre d’un canon, d’une cloche, noire quand il s’agit d’un laboratoire de photo.

 

 

 

 

 

 

Des camarades de chambrée.

 

Alors que le diminutif chambrette ne pose pas de problème puisqu’il s’agit d’une petite chambre (et accessoirement un sorte de poire mais là n’est pas notre propos), et ce depuis le XIIe siècle, la chambrée est, à l’origine, la réunion de soldats dans un même logement, que ce soit une chambre, bien sûr, ou une tente. Un mot populaire qui aura tôt fait de s’appliquer à d’autres catégories sociales, ce que confirme Littré qui l’attribue aussi bien aux ouvriers qu’à n’importe quel groupe pourvu que ses membres couchent dans la même pièce, soit son acception actuelle. Ce qui nous amène, pour l’anecdote, au mot camarade qui connaît une origine identique puisqu’il signifiait initialement chambrée puis compagnon, avec la même racine grecque que notre chambre : kamara.

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