La France bientôt en récession ?

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Jean-Louis Dell'oro , modifié à
L'Insee prévoit une légère contraction de l'activité fin 2011 et début 2012.

L'hiver sera rude pour l'économie française. D'après les prévisions de l'Insee publiées jeudi, l'Hexagone connaîtra un recul de son PIB pendant deux trimestres consécutifs. Une mauvaise nouvelle synonyme d'une nouvelle récession. Le PIB devrait ainsi se replier de 0,2% au quatrième trimestre 2011 puis de 0,1% au premier trimestre 2012, avant de légèrement remonter la pente au deuxième trimestre de l'année prochaine (+0,1%).

Le scénario de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) est donc loin d'être optimiste pour le pays. Précisons cependant qu'il s'agit encore là d'un scénario médian sur des données particulièrement difficiles à anticiper dans le contexte actuel. Traduction : la réalité pourrait être bien meilleure… ou encore pire.

"Difficile" d'atteindre 1% de croissance en 2012

Il faut souligner cependant que l'ampleur de cette récession serait vraisemblablement assez faible. Rien de comparable pour l'instant avec l'année 2009 où la France avait connu sa pire récession depuis 1945 avec une contraction du PIB de 2,2%.

Reste que les prévisions de croissance pour 2011 passent désormais à 1,6%, alors que le gouvernement tablait jusque là sur 1,75%. Et pour l'année prochaine, l'Insee estime qu'il sera "difficile" d'atteindre la prévision de 1% de croissance sur laquelle s'est appuyé le gouvernement pour son deuxième plan de rigueur.

Les raisons de la crise

La faute encore et toujours à la crise de la dette dans les pays de la zone euro. "La dégradation de la situation économique, perceptible à partir de l'été 2011, s'est confirmée à l'automne", indique l'Institut. La crise d'aujourd'hui se décompose en trois étapes.

Après avoir soutenu les banques, les entreprises et la consommation dans la foulée de la crise des subprimes, les Etats commencent à avoir des difficultés à emprunter. Puis c'est au tour des banques de connaître de fortes tensions. Les investisseurs privés sont de plus en plus frileux pour leur prêter de l'argent.

Alors que l'Europe leur demande de mettre plus d'argent en réserve, les établissements bancaires rechignent également à se prêter entre eux et les actions de la Banque centrale européenne (BCE) pour leur fournir de l'argent frais n'ont pas réussi à débloquer la situation jusqu'ici. Enfin, les conditions de crédit se durcissent pour les entreprises et les particuliers : c'est l'économie réelle qui est touchée en bout de chaîne.

Face à leur endettement chronique, les Etats ont par ailleurs entamé une cure d'austérité pratiquement tous au même moment. Des coupes budgétaires qui ont affaibli la croissance et pèsent sur la consommation, principal moteur de la croissance.  Dans ce contexte morose, les entreprises voient leurs carnets de commandes se vider. Elles préfèrent donc réduire la voilure et limiter les investissements.

Un chômage à 9,6% mi-2012

Dans le même temps, le chômage de masse s'installe dans le paysage. L'Insee estime que le taux de chômage en métropole, qui s'établit à 9,3% au troisième trimestre, pourrait augmenter à 9,6% d'ici mi-2012.

Sur les six derniers mois de l'année, ce sont près de 14.000 postes qui auront été supprimés selon les prévisions de l'Insee. Au premier semestre 2012, cela devrait se détériorer avec 61.000 suppressions de postes.

Avec cette dégradation du marché du travail et un pouvoir d'achat en berne, les ménages ont en outre tendance à constituer des bas de laine de précaution. Leur taux d'épargne, qui avait atteint 17,1% au deuxième trimestre 2011 (un record depuis 1983) restera élevé à 16,8% en moyenne en 2011.

L'inflation va baisser

Maigre lot de consolation, la France ferait mieux que ses voisins, notamment grâce à une bonne tenue de la consommation intérieure. L'Espagne devrait connaître par exemple un recul de son PIB de -0,5% au dernier trimestre de cette année, toujours selon l'Insee.

Autre conséquence de cette récession annoncée : l'inflation devrait baisser nettement et passer de 2,3% en octobre à 1,4% en juin 2012. Ce qui pourrait laisser plus de marge de manœuvre à la BCE pour intervenir, elle qui doit dans ses statuts avant tout maintenir la hausse des prix en dessous de 2%.