L'égout ne serait-il qu'un cloaque ?

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Evidemment, les effluves méphitiques que suggère la simple évocation d’égouts, ne devraient pas vous conduire à un intérêt passionné pour le sujet ; mais ce serait oublier le sens originel du vocable, à savoir l’écoulement des eaux pluviales par n’importe quel moyen : tuiles, conduits ou tout autre canal.

Evidemment, les effluves méphitiques que suggère la simple évocation d’égouts, ne devraient pas vous conduire à un intérêt passionné pour le sujet ; mais ce serait oublier le sens originel du vocable, à savoir l’écoulement des eaux pluviales par n’importe quel moyen : tuiles, conduits ou tout autre canal.

 

Car nul besoin d’un doctorat en étymologie pour comprendre que égout est un simple déverbal de égoutter, autrement dit : perdre son eau goutte à goutte. Et c’était bien là le sens premier du mot même si les canalisations souterraines destinées à l’évacuation des eaux usées ne datent pas d’hier. Seulement voilà, jusqu’à une époque récente, on les appelait cloaques, du latin cloaca, de même sens.

 

 

 

 

L’égout du toit.

 

Ainsi que son étymologie le laisse percevoir, l’égout était, en langue française, l’extrémité du bas du toit qui permettait d’évacuer au loin les eaux pluviales afin que ces dernières ne ruissellent pas le long de la façade, occasionnant des dégâts que l’on peut facilement imaginer. Un égout formé parfois de simples tuiles saillantes, ce qu’on appelle le battellement, d’ardoises scellées en bas du comble, ou parfois d’un canal de récupération à l’image du chéneau, ce caniveau formant partie de la toiture. Ainsi distinguait-on l’égout simple, composé de trois tuiles, de l’égout double doté de cinq tuiles ; ce qui tend à démontrer qu’arithmétique et architecture n’ont pas toujours fait bon ménage mais là n’est pas notre propos.

 

 

 

 

Le cloaque.

 

Résumons-nous : jusqu’au XVIIe siècle, ce qu’on appelle aujourd’hui les égouts se disait cloaque, parfois au féminin d’ailleurs, ce qu’atteste la première édition du dictionnaire de l’Académie française, en 1694, qui précise toutefois que le mot cloaque s’attribuait plutôt aux ouvrages anciens ou, plutôt, antiques. Non sans logique puisqu’on estime que les Romains furent sinon les inventeurs (car Grecs, Egyptiens, Phéniciens maîtrisaient la construction de canaux souterrains) mais au moins les grands promoteurs de ce système d’écoulement des eaux usées et des immondices de la ville.

 

 

 

 

 

 

Rome, ville d’eau.

 

Si l’on en croit Pline ou Tite-Live, c’est Tarquin l’Ancien, roi légendaire de la Rome antique quelque six siècles avant notre ère, qui eut l’idée de creuser à espaces réguliers des fosses sous le pavement des rues qui, non seulement laissaient le pavé sec mais récupéraient également toutes les ordures plus ou moins ménagères ou biologiques. Rome était déjà une très grande ville et il fallait impérativement l’assainir par des égouts, d’autant que la topographie du lieu, une vallée cernée par sept collines, rendait courantes les inondations dues au déferlement des eaux pluviales sur la ville basse.

 

 

 

 

Cloaca maxima.

 

Rome comportait ainsi une multitude de petits collecteurs qui se réunissaient en un immense et unique canal, le cloaca maxima qui se jetait alors dans le Tibre, un procédé quelque peu écologiquement incorrect qui en faisait un fleuve particulièrement pollué. Un tout-à-l’égout imaginé avec intelligence puisque pentes et réservoirs se succédaient pour conduire un volume d’eau suffisant, avec la puissance nécessaire, pour charrier toutes les ordures. Ainsi les Romains, champions de l’acheminement de l’eau par leurs systèmes d’aqueducs, maîtrisaient tout aussi bien son évacuation.

 

 

 

 

A la mode française.

 

A l’image de la plus grande partie du génie romain, l’usage de ces égouts se perdit à la chute de l’Empire. Non entretenus, délaissés, ils furent oubliés et les villes se transformèrent en véritables… cloaques. Il fallut attendre pas moins de six ou sept siècles pour qu’on s’intéressât à nouveau au problème en reprenant une partie du savoir-faire romain. Jusqu’alors, au mieux, on creusait des tranchées au milieu de la voie que l’on recouvrait le plus souvent de dalles mais pas forcément, permettant ainsi aux eaux usées de s’évacuer plus ou moins bien en fonction de la pente de la voie, jusqu’à la rivière ou le fleuve voisins.

 

 

 

 

Une modernité retrouvée.

 

Pour donner une idée de la pénurie ambiante, à la fin du XVIIe siècle, dans Paris, il n’y avait guère que deux kilomètres d’égouts souterrains pour huit kilomètres à ciel ouvert. Il faudra attendre 1740 que Turgot se préoccupe du grand égout ceinturant la ville en l’enterrant, puis la fin du siècle pour que Eugène Belgrand, à la demande du préfet Haussmann, profitant de la reconstruction du centre de Paris, l’étende à près de neuf cents kilomètres pour atteindre, aujourd’hui, plus de deux mille kilomètres.

 

Mais il n’y eut pas que Paris qui s’équipa d’égouts au XIXe siècle, les grandes villes s’y intéressaient tout autant avec, notamment, Brest, Besançon, Montpellier, Grenoble…. Même si, à la fin du siècle, à peine quinze pour cent des grandes agglomérations (plus de cinq mille habitants) bénéficiaient d’un réseau d’égouts digne de ce nom.

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