Espionnage : Renault a accusé sans preuve

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avec AFP , modifié à
Un enregistrement du 14 février prouve que Renault savait que ses accusations étaient bancales.

L’enregistrement d’une réunion interne à Renault, retrouvé par la police et dévoilé lundi par L'Express.fr et France 2, fait s’enliser un peu plus le constructeur automobile. Cet enregistrement prouve, sans doute possible, que les trois cadres accusés d’espionnage ont été licenciés sans preuve tangible.

La réunion enregistrée est celle de convocation au siège de l'entreprise de Dominique Gevrey, le M. Sécurité de Renault, cheville ouvrière du dossier, seul mis en examen pour "escroquerie en bande organisée". C’est l’enquête interne de ce membre du service de sécurité de Renault qui a conduit au licenciement des trois cadres. Face à lui, Christian Husson, le directeur juridique de Renault, et l'avocat de l'entreprise Jean Reinhardt.

"Le scénario catastrophe peut exister"

Dominique Gevrey se voit pressé par le directeur juridique de Renault Christian Husson de fournir des preuves. "Donne-nous des pistes, aide-nous à trouver la solution!", lui demande-t-il, appuyé par l'avocat de Renault, Me Jean Reinhart, selon le verbatim de la réunion publié sur le site de L'Express.

"Tout tient en une personne qui nous a donné des renseignements extrêmement précis, extrêmement circonstanciés, au millimètre et à la virgule près. Est-ce que cette personne nous a baladés, le scénario catastrophe peut exister ?", s'interroge Me Reinhart.

Aucune preuve des supposés comptes en Suisse

Alors que Carlos Ghosn s’est justifié en personne dans les médias du sérieux de l’enquête menée en interne par Renault, le groupe n’a rien fourni de concret à la Direction centrale du renseignement intérieur, désormais chargée de l’enquête, ni le moindre écrit du mystérieux informateur, ni même son nom. Dans l’enregistrement, Dominique Gevrey révèle qu’il détiendrait pourtant les rapports écrits de l’informateur, sans les avoir fournis à la DCRI.

Surtout, Christian Husson et Me Reinhart s’inquiètent de n’avoir aucune preuve écrite des comptes en Suisse prétendument détenus par les trois cadres. "La pièce qui déclenche notre plainte, c'est qu'il y a des comptes offshore. Si on n'a pas cette pièce, tout s'écroule", s'alarme Christian Husson. "Si jamais la DCRI apprenait avant nous qu'il n'y a pas la soudure [des comptes en Suisse], là, c'est la fin des haricots pour la boîte, pour Ghosn, pour tout le monde, ça part en couilles mais grave ! C'est la bombe atomique !", dit encore Christian Husson.

Reinhardt "convaincu qu'il n'y avait pas de source"

Interrogé par l’AFP, Renault a confirmé lundi soir la tenue de cette réunion, mais a souhaité s’abstenir de tout commentaire pour le moment. Sur France 2, Me Reinhart affirme : "nous étions convaincus qu’il n’y avait certainement pas de source", évoquant le "discours vaseux" de Dominique Gevrey.

L’enquête de la DCRI se poursuit, sans mettre en cause Carlos Ghosn pour le moment.