Chez Areva, "il y aura des destructions d'emploi"

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INTERVIEW E1 - Europe 1 recevait jeudi matin Jean-Pierre Bachman, coordinateur CFDT Areva, et Bruno Blanchon, responsable de la branche atomique de la CGT Energie.

Au lendemain de la publications de résultats catastrophiques pour Areva, qui a essuyé des pertes de 4,8 milliards d'euros en 2014, les représentants des salariés de l'entreprise n'ont pas caché leur inquiétude. "Areva peut mourir, tout à fait. On est en danger, c’est une question de survie. Dans un an, on peut très bien arrêter le paiement et être dans une situation catastrophique", a prévenu Jean-Pierre Bachman, coordinateur CFDT Areva. Ce dernier et Bruno Blanchon, responsable de la branche atomique de la CGT Energie, sont revenus sur les origines de ce désastre et le sauvetage qui se prépare.

"Il y aura des destructions d’emploi". Face à l’ampleur des pertes enregistrées en 2014, la direction d'Areva n'a pas tardé à annoncer un plan d’économies d'un milliard d'euros. Une rigueur qui risque de se traduire notamment par des suppressions d'emplois, même si le gouvernement a assuré qu'il n'en était pour l'instant pas question et que la direction a promis de privilégier les départs volontaires.

Un discours qui ne rassure par les représentants des salariés. "Si on veut trouver un milliard, cela ne va pas se faire comme ça. Cela va toucher l’emploi, de manière importante, cela touchera les rémunérations, les conditions de travail, les statuts collectifs, les garanties collectives, le temps de travail. C’est extrêmement préoccupant", a réagi Jean-Pierre Bachman. Et ce dernier d'évoquer "plusieurs milliers" d'emplois menacés : "il y aura des destructions d’emploi et c’est quelque chose qui va impacter la filière et les sous-traitants", a-t-il précisé.

"Ce n’est pas aux salariés de payer". Les délégués du personnel sont d'autant plus inquiets qu'ils estiment devoir payer pour les erreurs des autres. "C’est sûr que ce n’est pas aux salariés de payer les erreurs stratégiques de la direction mais aussi la démission de l’Etat face à ses responsabilités", a estimé Bruno Blanchon. "Si on regarde la perte opérationnelle, c’est 1,2 milliard. Nous on peut agir sur les 1,2 milliard. Le reste (3,6 milliards, ndlr), c’est purement financier, c’est forcément l’actionnaire. Les salariés ne peuvent pas réassurer le risque de l’actionnaire", a renchéri le délégué CFDT.

Car pour la CFDT et la CGT, la responsabilité du naufrage actuel incombe avant tout à la direction : "les conseils d’administration, l’Etat, les dirigeants de l’époque ont fait des erreurs stratégiques. Les représentants de l’Etat ont voté les décisions dans les conseils d’administrations. Il y a des instances de l’Etat qui siégeaient et pouvait stopper un certain nombre de décisions. L’achat d’UraMin pouvait être stoppé", a assuré Jean-Pierre Bachman. Ce qu'a confirmé Bruno Blanchon : "on avait prévenu en tant que syndicaliste, notamment dans les comités centraux d’entreprises, sur la valeur réelle des mines, sur les délais et les couts qui étaient annoncés".

Comment rebondir ? Si un plan d’économies semble inévitable, le salut d'Areva ne passera pas par cette seule solution. Le spécialiste français du nucléaire va d'abord avoir besoin d'argent frais : "au moins 3,9 milliards", selon le représentant CFDT. Mais il n'y aura pas de salut sans réorganisation de la filière : "Nous, à la CFDT, on ne parle pas de renflouement. On parle de coopérer, de travailler ensemble, gagner des marchés à l’export, ne pas recommencer les histoires d’Abu Dhabi." Areva et EDF sont condamnés à s'entendre.

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