"Un nom à coucher dehors", une expression née de la méfiance des taverniers

Quelles sont les origines de l'expression "un nom à coucher dehors" ? © Pixabay
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Stéphane Bern

Dans l'émission d'Europe 1 "Historiquement vôtre", Stéphane Bern se penche chaque jour sur les racines d'une expression du quotidien. Vendredi, il s'intéresse aux origines de l'expression "un nom à coucher dehors", qui signifie avec peu de manières qu'un patronyme vous semble difficile à prononcer ou à retenir.

Stéphane Bern propose chaque jour, dans Historiquement vôtre avec Matthieu Noël, de partir à la découverte de ces expressions que l'on utilise au quotidien sans forcément connaître leur origine. Vendredi, l'animateur nous explique les racines de "un nom à coucher dehors".

Avez-vous des noms à coucher dehors ? Sachez en tout cas que cette expression, pas des plus sympathiques, vient du Moyen-Âge. Les taverniers étaient naturellement méfiants, et il faut dire que des malandrins couraient les rues et parfois ils demandaient une chambre à l’auberge. Ces derniers devaient alors montrer patte blanche, c’est-à-dire ne pas se montrer inquiétant ou louche. 

"Montrer patte blanche" est d'ailleurs une expression qui remonte à La Fontaine et sa fable du loup, de la chèvre et du chevreau. Le loup y tente de pénétrer chez la chèvre, et le chevreau lui dit "montrez-moi patte blanche où je ne vous ouvrirai point". Le loup, patte noire et velue, s'en retourne chez lui comme il était venu.

Un étrange tri de la clientèle

Mais revenons à nos noms à coucher dehors. Quand on voulait louer une chambre, ceux qui avaient un nom chrétien étaient favorisés. Si vous veniez avec une particule, on vous choyait. Les autres passaient leur chemin ou dormaient à l’écurie entre deux canassons.

En Angleterre, on parle de "jaw-breaking word", un mot à casser la mâchoire. En hongrois, on dit avoir un "nom tarabiscoté", chez nous aussi d’ailleurs. Chez les Hollandais, c'est "avoir un nom pour se fouler la langue". Ayons une pensée pour tous les handicapés patronymique de France et de Navarre, comme ceux qui à travers l’histoire ont fait rire les écoliers : le gendarme Merda qui tira sur Robespierre, le chevalier de la Crotte qui a combattu aux côtés de Bayard et celui qui a écrit "ses baisers laissent leur velours, sur mes lèvres pâles et roses, je les sens là toujours, je crois avoir mangé des roses". Des vers signés du poète Jules Troccon.