Qui est Ruth Handler, ce personnage aperçu dans le film Barbie ?

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Eloïse Bertil
Dans le film "Barbie" de Greta Gerwig, le personnage joué par Margot Robbie rencontre une femme âgée nommée Ruth qui lui est présentée comme "le fantôme qui hante les locaux de Mattel". Quelle est sa véritable histoire ? Réponse en interview avec Anne Monier, conservatrice au département des jouets du Musée des arts décoratifs, dans le podcast "Au coeur de l'Histoire".
PODCAST

Qui est Ruth Handler, la mystérieuse femme que rencontre Barbie au QG de Mattel dans le film réalisé par Greta Gerwig actuellement au cinéma ? Dans "Au coeur de l'Histoire", Anne Monier, conservatrice au département des jouets du Musée des arts décoratifs, raconte l'histoire de la créatrice de la poupée Barbie. 

"Barbie est un jouet qui est né de l'imagination d'une femme, Ruth Handler", affirme Anne Monier. "Elle regardait sa fille Barbara, une pré-adolescente de 10 ans, jouer avec des poupées en papier sur lesquelles elle collait des robes. Et Ruth s'est demandée si ce ne serait pas plus excitant de faire ça sur une poupée adulte en 3D...". Les poupées commercialisées dans les années 1950 aux Etats-Unis ont une apparence de petite fille, à l'image du public qu'elles visent. Anne Monier explique : "le but, c'est que la petite fille s'identifie à sa maman et qu'ainsi elle prenne l'habitude du maternage, du soin des enfants." Mais Ruth Handler constate que sa fille préfère donner des rôles d'adulte à ses poupées. Elle est alors à la tête de l'entreprise de jouets Mattel, qu'elle a fondé en 1945 avec son mari designer Elliott Handler. "C'est elle qui gérait, tandis que son mari était le créatif, ce qui est déjà une répartition des rôles étonnantes à l'époque", soulève Anne Monier.

Alors même que ses collaborateurs considèrent une poupée adulte un produit invendable, Ruth Handler se lance dans la fabrication de son nouveau jouet. Très vite, elle rencontre un problème concernant l'anatomie de la poupée. C'est lors d'un séjour en Europe qu'elle découvre la poupée allemande Bild Lilli, créée d'après le personnage de la BD qui paraissait dans le journal Bild Zeitung. "Barbie a ses racines liées à une poupée allemande qui n'est pas vraiment un jouet", déclare Anne Monier dans "Au coeur de l'Histoire". "C'est une sorte de bibelot qu'on peut offrir en cadeau à une jeune femme que l'on courtise, avec une connotation un peu coquine", confirme Anne Monier. En effet, coiffée d'une queue de cheval blond platine et maquillée avec un trait d'eye-liner épais, Lilli est à l'origine un genre de caricature pornographique, une femme qui représente le fantasme érotique masculin. 

Ruth Handler ramène la poupée aux Etats-Unis pour s'inspirer de son design et créé une version "jouet" à laquelle elle donne le nom de Barbie en référence à sa fille Barbara. Anne Monier raconte qu'il y a alors "tout un travail qui va être fait pour l'adapter aux petites mains d'un enfant, pour travailler sur le plastique, pour créer un contact plus agréable." Tout comme Lilli, la première poupée Barbie ressemble beaucoup à la pin-up des années 1950, avec la taille très fine. "C'est le canon de beauté de l'époque, mais c'est aussi un impératif parce que pour un enfant, c'est quand même très facile de saisir Barbie à la taille avec sa toute petite main pour la manipuler, l'habiller." 

Avec la création de Barbie, Ruth Handler révolutionne le symbole de la poupée. "Barbie va permettre aux petites filles de se projeter dans leur future vie de femme, mais pas du tout dans leur vie de mère ou dans leur vie d'épouse. Barbie n'a pas de mari. Dans la maison de Barbie, il n'y a pas de cuisine. Barbie se promène dans sa voiture, rencontre ses amis et surtout a des carrières", affirme Anne Monier. Très vite, les modèles de Barbie se diversifient pour créer une déclinaison de métiers alors très peu féminins, comme Barbie chirurgien dans les années 70 ou Barbie astronaute dans les années 80. D'ailleurs, Ruth Handler n'avait pas envisagé d'introduire un élément masculin dans l'univers de Barbie : ce sont les petites filles qui ont écrit à Mattel pour demander un Ken. "Elles avaient quand même envie de se projeter dans des romances, d'avoir un amoureux pour aller au bal, pour aller au restaurant etc. Mais Ken ne décide de rien : la voiture est à Barbie, la maison est à Barbie, l'avion est à Barbie."

Pour écouter l'interview d'Anne Monier dans son intégralité, retrouvez le podcast "Au coeur de l'Histoire" sur votre plateforme d'écoute préférée.

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