"Philadelphia" et "Les tontons flingueurs" : les films de la vie de Roselyne Bachelot

Roselyne Bachelot a raconté les films de sa vie samedi dans "CLAP !".
Roselyne Bachelot a raconté les films de sa vie samedi dans "CLAP !". © Europe 1.
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Dans l'émission cinéma d'Europe 1, "CLAP !", un invité répond chaque semaine à un questionnaire cinéma sur les films de sa vie. A l'occasion de la réouverture mercredi des salles obscures, c'est la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, qui s'est prêtée samedi à l'exercice. 
INTERVIEW

Tous les samedis dans CLAP !, un invité, qu'il soit ou non du monde du cinéma, se soumet à un questionnaire personnel sur les films de sa vie. Samedi, c'est la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, qui s'est confiée au micro d'Europe 1, à l'occasion de la réouverture le 19 mai des salles obscures. 

Votre premier souvenir de cinéma ?

Mon premier souvenir est un choc émotionnel très important. J'étais en pension et on nous apprend qu'on va nous emmener au cinéma. C'était la première fois de ma vie que j'entrais dans une salle, je me souviens que ça coûtait un franc. J'ai 7 ans et je n'ai pas d'argent. Mais ma grand mère habitait dans le village de mon pensionnat. 

J'ai donc fait le mur pendant un créneau d'un quart d'heure où je savais que je n'étais pas surveillée. J'ai couru et suis arrivée chez ma grand mère. Je lui ai dit qu'il me fallait absolument 1 franc, je crois qu'elle n'a pas bien compris pourquoi. Elle m'a donné l'argent et j'ai pu voir Heïdi, de Luigi Comencini. Je m'en souviens peut-être parce qu'il avait fallu conquérir cette place de cinéma de haute lutte. C'était un film un peu gnangnan, il faut bien le reconnaître, mais c'était un contexte unique.

Votre meilleur souvenir en salle ?

J'en ai tellement. Mais mon meilleur souvenir en salle implique encore ma grand-mère. Elle ne savait ni lire ni écrire mais elle adorait le cinéma. Quand j'étais avec elle en vacances, elle m'y emmenait plusieurs fois par semaine. Au moment des scènes d'amour, elle me disait de mettre la main devant mes yeux… Mais vous pensez bien que j'ouvrais les doigts au maximum !

Elle était dingue de films américains et en particulier de western. Je pense que mon meilleur souvenir à ce moment là, c'est L'homme aux Colts d'or, avec le trio magique Henry Fonda, Richard Widmark, Anthony Quinn. J'ai vu tous les western des années 1950 et 1960 à ce moment-là.

Votre pire souvenir en salle ?

Mon pire souvenir en salle, c'est Salo, les 120 jours de Sodome de Pier Paolo Pasolini. Je me souviens l'avoir vu au cinéma Katorza, à Nantes. C'est la seule fois de ma vie où j'ai eu un malaise. J'ai été obligée de sortir de la salle quand a commencé le fameux cycle de la merde. Je me suis dit "C'est pas possible que ça se passe au cinéma". Tout en reconnaissant la valeur du film, c'était pour moi insupportable. 

Un film dans lequel vous aimeriez vivre ?

Avec quelques copines, on a fondé une sorte de cinémathèque quand on avait 20 ans et on passait des films. Ca a été pour moi une découverte puisque je suis passée d'un rôle passif de spectateur à l'analyse des films. Celui qui m'a sans doute le plus marquée, que j'ai le plus décortiqué avec mes amies, c'est La règle du jeu, de Jean Renoir, une satire sociale inouïe.

Moi qui vivais dans un milieu bourgeois, je regardais les gens qui étaient autour de moi d'une autre façon. Et puis cette caméra de Renoir, cette profondeur de champ qui permet à la fois de suivre les protagonistes sur le premier plan et sur l'arrière plan… Je me suis dit à ce moment-là que j'aimerais tourner dans ce genre de film.

Et je dois dire qu'une de mes phrases cultes est la phrase du cuisinier à Madame de La Bruyère, qui vient de lui demander de saler ses plats au sel marin. Il dit ensuite à ses aides : "J'accepte les régimes, mais pas les manies." C'est une phrase que je dis quand je me dispute avec quelqu'un qui a des revendications un peu absconses.

Quel est le film que vous aimez mais vous avez honte de l'avouer ?

J'ai un peu honte d'aimer Amélie Poulain, mais je ne devrais pas. J'adore ce film, je l'ai vu au moins trois fois. Je devrais peut-être plutôt dire que j'ai vu dix fois Les sept Samouraï ou Citizen Kane.

Quel est le film qui vous a fait le plus rire ?

C'est Les Tontons flingueurs. Avec mon fils, qui est dingue de ce film, nous passons des déjeuners de dimanche où nous récitons tous les deux les répliques cultes. La scène de la cuisine nous remplit de bonheur.

Le film qui vous fait le plus pleurer ?

C'est Philadelphia, ou éventuellement Forrest Gump. Ces films déclenchent chez moi des torrents de larmes irrépressibles. C'est peut-être aussi parce que cela correspond à des combats de ma vie. Pour Philadelphia, j'ai été dans les premières équipes qui ont lutté contre le Sida, pour que les malades soient soignés et intégrés dans la société. Et puis Forrest Gump porte un regard tellement tendre sur le handicap intellectuel. Et l'acteur qui joue dans les deux (Tom Hanks, nldr) n'y est sans doute pas pour rien.

Quelle est la bande originale qui a le plus marqué votre vie ?

C'est encore celle de La règle du jeu. Cette bande originale mélange à la fois de la musique classique avec En revenant de la revue, de Bourvil. C'est quelque chose qui m'a plu parce qu'elle s'intègre dans l'ensemble de l'œuvre. C'est évidemment une musique qu'on peut se passer et se repasser.